Par Jacques Henry
Qu’est-ce qui fait qu’une femme et un homme puissent trouver une harmonie leur permettant d’envisager une vie de couple ? Il s’agit là de la préoccupation des sites de rencontre, on parlait autrefois des agences matrimoniales, qui à l’aide de logiciels spécialisés analysent maintenant les « préférences » de chacun des potentiels partenaires, femmes ou hommes pour organiser des rencontres « mathématiquement favorables ». Et c’est un marché juteux !
Mais quelle est la part de vérité quand, après avoir payé une certaine somme d’argent, le site (ou l’agence) vous propose « le » ou « la » partenaire idéal(e) pour une rencontre qui a le maximum de chances de se concrétiser en une union durable. C’est ce qu’ont voulu savoir avec précision des spécialistes du comportement humain en grande partie issus de l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA) en analysant avec la plus grande rigueur les réponses à deux questionnaires englobant plus de 28.000 personnes, femmes ou hommes, hétérosexuels, en quête de l’âme sœur. Et les résultats obtenus sont intéressants à plus d’un titre.
Au cours de l’évolution, les êtres humains ont privilégié les couples stables dans le temps afin d’assurer une descendance, avec cependant quelques exceptions de sociétés où apparaissaient des structures polygames. Il est intéressant de rappeler que la polygamie ne peut exister que lorsque l’homme peut subvenir matériellement et financièrement aux moyens de subsistance de plusieurs femmes, ce qui rend cette situation relativement rare même quand elle est autorisée par la loi. Par instinct, la femme recherche un partenaire susceptible, donc, de lui assurer le gite et la nourriture pour qu’elle puisse s’occuper des enfants à naître. Les sites de rencontre se sont rendus compte que les hommes ayant un statut social élevé et un revenu confortable étaient beaucoup plus sollicités que ceux qui, en toute honnêteté, déclaraient au contraire une situation sociale moins enviable.
Dans ce contexte, les femmes recherchent un partenaire plus âgé et ayant suivi des études éventuellement supérieures dans la mesure où ces deux critères constituent un espoir de ressources stables et de statut social élevé. À l’inverse, les hommes recherchent une partenaire plus jeune ayant un potentiel reproductif plus élevé. Ces deux critères expliqueraient qu’il existe presque toujours une différence d’âge marquée chez les couples qui se sont formés en faisant appel aux services d’un site de rencontre.
Si l’on s’intéresse à l’attractivité physique, il apparaît que les hommes sont « plus regardants » que les femmes. Un critère utilisé est l’indice de masse corporelle (BMI en anglais) systématiquement indiqué par les agences de rencontre. Ce n’est pas la fraîcheur de la peau ou la symétrie du visage qui sont importants mais la silhouette. Et ce critère de sélection est valable aussi bien pour les hommes que pour les femmes : assez paradoxal dans un pays, les États-Unis, où près de 60% de la population est en surpoids…
Bref, cette étude a analysé une série de critères allant des revenus financiers, du niveau d’éducation, de la couleur des cheveux, la taille, le poids, le passé sexuel et matrimonial et enfin le désir (ou non) de fonder ou refonder un foyer. La question était à peu près la suivante : « quels traits trouveriez-vous désirables ou indésirables chez un (ou une) partenaire en vue de fonder un couple stable sur le long terme ? »
Il est apparu très nettement que le critère principal de sélection chez l’homme est l’apparence physique et chez la femme le niveau de revenus, en d’autres termes on peut se demander si ce genre d’institutions a de réelles chances de succès ! Comme l’indique la figure ci-dessous tirée de l’article paru dans la revue Personality and Individual Differences en accès libre, la femme privilégie les revenus financiers et la stabilité professionnelle de l’homme alors que ce dernier attache une plus grande importance à l’aspect physique de sa « future partenaire ». Selon les âges, plus l’homme est âgé plus il est sélectif et c’est l’inverse chez les femmes. Cependant, au-delà de la quarantaine, les critères de sélection des hommes s’estompent quant à l’aspect physique des femmes recherchées. Pour les non-anglophones le mot slender signifie sveltesse ou minceur, c’est selon.
Comme on pouvait s’y attendre le niveau éducatif joue un grand rôle dans les critères de sélection. De même, une femme ou un homme se considérant comme satisfaisants en termes d’apparence physique ou disposant de revenus confortables sont beaucoup plus sélectifs. Ceci n’est pas surprenant dans la mesure où l’apparence joue un grand rôle, en particulier aux États-Unis. Encore que les femmes sont généralement moins sélectives quant à l’aspect physique de leur éventuel futur partenaire, 58% contre 80% pour les hommes. Mais en définitive c’est le désir de créer une union stable qui l’emporte rationnellement au niveau individuel. Reste à trouver des statistiques sur le taux de réussite des couples se formant par l’intermédiaire de sites de rencontre, aucune donnée fiable n’existe. En étant optimiste ce serait quelques pour cents…
- Référence : Melissa R. Fales, David A. Frederick, Justin R. Garcia, Kelly A. Gildersleeve, Martie G. Haselton, Helen E. Fisher, « Mating markets and bargaining hands: Mate preferences for attractiveness and resources in two national U.S. studies », Personality and Individual Differences, 2016; 88: 78 DOI: 10.1016/j.paid.2015.08.041
—
Sur le web.
La présentation statique (photo, description) est je crois trop peu révélatrice des attitudes naturelles et du comportement des personnes ; la féminité et la virilité, le charme, le parfum, la gestuelle, la démarche, la manière d’être, seul ou en société, le niveau de langage à l’oral, la voix, l’intonation, l’humour, le sourire et le rire ; ce sont des critères fondamentaux et vivants dans une rencontre difficiles à décrire et mettre en avant sur des sites, même si textes et photos se voyaient remplacés par des vidéos.
Les critères objectifs que l’on recherche sont peut-être trop éloignés du caractère instinctif de l’attirance, la quantité et la nature des informations à collecter risqueraient d’être abusivement indiscrets et invasifs pour un résultat incertain.
« Les femmes privilégient les revenus financiers »… Oui sans doute… Notons cependant que cette étude a été réalisée à Los Angeles, je me permets de supposer qu’en France, les résultats seraient légèrement différents.
D’autre part, des statistiques sérieuses concernant le marché du dating existent.
On parle notamment de plus d’1 million de couples formés (dont 200 000 mariages) grâce aux sites de rencontre en France, rien qu’entre 2005 et 2010 (IPSOS).
Selon une autre étude de Claims TNS, 1 français sur 5 connaît un couple qui s’est formé grâce à un site de rencontre.
Travaillant moi même pour plusieurs sites de ce secteur, au vu des témoignages que nous recevons régulièrement, je ne suis pas loin de penser que si la démographie se porte bien en France, c’est en partie grâce aux sites de rencontre.
1 million en cinq ans, ce n’est pas si conséquent en fait, et un français sur cinq qui connaît quelqu’un qui, ça me paraît étrange comme démarche dans l’étude.
La question est aussi de savoir combien de temps ces couples ont duré (les 200 000 mariages à ce titre me paraissent plus intéressants), parce que si l’on considère qu’un couple de deux semaines est important d’un point de vue statistique, c’est un peu faussé.
Après, il est logique, dès lors que de nouveaux lieux existent que des gens s’y rencontrent, il y a sûrement des couples qui se sont formés via facebook ou des réseaux sociaux du genre, ou sur des mmo, ou même sur des sites de cul qui sait ? Il serait intéressant de faire comparaison, entre les rencontres virtuelles fortuites et celles faites grâce aux sites de rencontres.
http://www.ted.com/talks/amy_webb_how_i_hacked_online_dating?language=fr
-> Je vous invite à regarder cette vidéo amusante potentiellement intéressante pour votre travail, il me semble qu’il y a encore un grand nombre de lacunes à combler concernant les sites de rencontre, bien qu’elles ne soient pas insurmontables.
Sur quoi exactement vous basez vos doutes qu’une française s’intéresse moins à l’argent qu’une américaine?
Est-ce que c’est réellement l’argent en soi, ou le fait d’avoir des revenus au-dessus de celui des femmes interrogées ?
Ça change un peu la donne et les explications potentielles.
« Est-ce que c’est réellement l’argent en soi, ou le fait d’avoir des revenus au-dessus de celui des femmes interrogées ? »
Le fait qu’une femme préfère des revenus plus élevés, ça s’appelle l’hypergamie.
Mais je note votre esquive sciemment choisie de répondre à côté à ma question sur la différence entre la fr et la ricaine.
Tout dépend ce qu’on cherche. Si c’est une aventure passagère, certainement le physique pour les hommes et le revenu pour les femmes sont certainement des critères importants. Mais si on cherche ‘l’âme soeur’, une relation harmonieuse et durable, je pense que les qualités humaines de notre compagnon sont le plus importants.