Bon, l’État n’est pas parfait, convenons-en. Mais il a quand même quelque chose pour lui, c’est son indéniable côté justicier qui lui permet de remettre un peu l’église la mosquée la mairie au milieu du village et de rappeler aux Libéraux, ces rêveurs qui poursuivent “une utopie qui se saborde dès qu’elle est en contact avec la réalité”, selon le mot maintenant célèbre d’un exégète du libéralisme journalistico-compatible, que sans lui, ils seraient bien enquiquinés dans leur monde injuste où règnerait à n’en pas douter la loi du plus fort.
Heureusement, donc, l’État est là, ce qui lui permet de rendre justice, embrasser la Veuve, instruire l’Orphelin et redresser les torts, à grands coups de pied au derche s’il le faut.
Prenez la “nouvelle économie”, ou disons plus exactement pour éviter d’utiliser ce concept un peu creux, l’économie capitaliste habituelle qui utilise les technologies de l’information pour se passer de l’État : en s’introduisant progressivement un peu partout, y compris dans le domaine de la solidarité, ces nouvelles entreprises offrent des gains de productivité, de nouveaux modes de consommations et de nouveaux développements commerciaux qui viennent percuter de façon directe (et parfois violente) les petites habitudes de nos sociétés post-industrielles dont beaucoup se sont accommodées d’un rythme d’adaptation assez pépère aux innovations techniques. Ici, on peut bien sûr penser aux hôteliers, aux restaurateurs ou, si l’on veut monter crescendo en violence, aux taxis dont quelques croupières sont actuellement taillées par des entreprises comme Uber.
Et pour tailler, ça taille puisqu’avec l’arrivée d’Uber en France en général et à Paris en particulier, ce sont des quasi-monopoles installés depuis des décennies (en tout bien tout honneur, n’est-ce pas) qui se sont fait rapidement remettre à leur place. Nul doute que les chiffres d’affaires des principales centrales de taxis parisiens ont ressenti les effets de l’arrivée des VTC Uber puis d’UberPop dans la capitale, poussant leurs chauffeurs à des exactions relatées dans ces colonnes.
Mais mais mais attendez quelques secondes ! Une corporation en danger ? Des petits arrangements entre amis, qui remontent à loin, sont le cul dans les ronces ? C’est intolérable ! Vite, il faut que l’État intervienne, pardi ! Après tout, n’est-ce pas le rôle de l’État de venir en aide aux faibles et aux opprimés ? Et qui, mieux que la corporation des taxis, représente mieux les faibles et les opprimés devant les conducteurs Uber et UberPOP ?
C’est décidé, et l’action se déroulera en deux temps, trois mouvements, ou à peu près.
Déjà, pour commencer, il s’agira de revoir de fond en comble les lois et les décrets, histoire de museler une application qui rendait les clients heureux et permettait de résoudre un vrai problème (celui de trouver des moyens de transports efficaces, sûrs et peu coûteux dans une capitale mise en coupe réglée par un nombre volontairement limité et contrôlé de taxis). Pour cela, il suffira de faire gratter une solide loi par un député irréprochable, par exemple Thévenoud. Question immaculée conception, y’a pas plus blanc. Cette loi rendra particulièrement complexe le bon développement et la croissance des VTC, tout en mettant un frein définitif aux tentatives d’utiliser sa voiture particulière pour arrondir ses fins de mois (via UberPoP).
Dans un second temps, parce que justice doit être faite et parce que les contribuables sont d’humeur badine, l’État ira mobiliser une partie de leur argent pour développer puis déployer une application directement concurrente à celles déjà en place. Oui, monsieur, c’est bien là le rôle de l’État de se lancer dans les applications mobiles ! Oui d’abord, et même qu’ensuite c’est bien évidemment le rôle de l’État de favoriser une corporation et ses lobbies, même que je vous ferai dire que de toute façon, cette application était justement envisagée dans la loi Thévenoud évoquée juste avant (ça tombe bien, non ?). Nananère.
Et voilà comment vous, contribuables, participez directement à la création de Le.Taxi, petit bijou de technologie moderne et innovante développé — pour un budget pour le moment inconnu — par la Délégation à la Sécurité et à la Circulation Routières ainsi que l’indispensable Secrétariat Général pour la Modernisation de l’Action Publique, parce qu’en République Française du Bisounoursland, l’Action Publique est sans cesse modernisée, et que pour la moderniser, il faut absolument un Secrétariat Général.
En plus, Le.Taxi, c’est une application aux données accessibles via l’open data pour créer des services à valeur ajoutée, qui ne devrait pas trop espionner les taxis qui l’utiliseront (c’est Bercy qui le dit) et qui ne devrait donc pas non plus être utilisée pour permettre de déduire les revenus des artisans. Tout va bien.
Vous (consommateur, contribuable, artisan taxi) ne l’aviez pas demandé ? Vous l’avez quand même. Vous n’en aviez pas besoin ? C’est pas grave, si vous saviez vous en passer avant, vous pourrez toujours vous en passer maintenant, plus les frais. Les autres applications étaient gratuites ? Celle-là aussi, modulo vos impôts. Vous ne comprenez pas du tout pourquoi l’État se lance une fois encore dans l’informatique alors que de nombreux et coûteux exemples précédents montrent qu’il s’y prend comme un manche de pioche ? Ce n’est pas grave, lui, il le sait et c’est tout ce qui compte.
Oui, grâce à vous, grâce à Thévenoud, grâce aux mous du genou qui nous gouvernent, vous allez adorer Le.Taxi, une application étatique qui tente la concurrence de ce que le privé fait déjà, en mieux, gratuitement. ? Et tout ceci sera un succès, tout ceci se passera bien, ? tout ceci n’ira pas au drain, tsoin tsoin ? …
Et le plus beau, dans tout ça, c’est qu’en favorisant ainsi outrageusement les taxis, l’État remplit une fois encore avec brio sa mission de créer des richesses, de l’emploi et d’aider les masses laborieuses, les sans-dents sans-travail et les peu diplômés en … les empêchant purement et simplement de bosser ! Eh oui : l’analyse des données, réalisée ici avec soin, tend bel et bien à suggérer que l’émergence d’Uber a bien profité aux milieux (relativement) modestes, ce qui donne un éclairage franchement bizarre à cette nouvelle tentative de l’État dans l’informatique mobile.
Bon, résumons-nous : certes, l’État n’est pas parfait, mais il assure bel et bien la Justice, celle du plus fort, du plus corporatiste et du plus riche. Et c’est bien le principal, non ?
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Sur le web
Les intrusions de l’état dans l’économie n’ont plus de limites (en avaient-elles avant ?), le pir est que certaines personnes vont trouver ça “normal”.
Le seul point qui me permet de rester optimiste est que, bien qu’atteind d’interventionite aigüe, notre cher (non ce n’est pas une faute) Etat sera toujours dépassé par la technologie et à moins de virer carrément dictature, il ne pourra pas empêcher les changements (tant économiques que sociale) qu’entraînent ces technologies.
Extrait de la foire aux questions sur le.taxi:
Disposer d’informations aussi précises ne pose-t-il pas des problèmes de respect de la vie privée ?
Non, le registre de disponibilité des taxis veille au respect de la vie privée
On croit rêver… Le.taxi ne respecte pas les règles les plus élémentaires de la CNIL! Quelles sont les données collectées? Dans quel but? Combien de temps sont-elles conservées? Qui peut – accéder? Comment peut-on consulter, ou faire supprimer ses données personnelles?
Le.taxi ne respecte pas les règles les plus élémentaires de la CNIL!
Mais si c’est l’état, il peut s’assoir dessus, non ❓
On attend avec impatience la valeur du budget de développement de cette application. Et éventuellement les sous-traitants qui ont pu intervenir…
Bah, au moment ou la catastrophe sera avérée, une autre débilité sera sur les rails, parée au lancement.
Tant que les français laisserons quelques dizaines de types légiférer, ça continuera.
Si le peuple votait les lois comme en Suisse ce serait le grand massacre de l’étatisme et du corporatisme.
T’emballe pas avec la Suisse (j’y vis depuis plus de 40 ans), nous aussi nous avons des problèmes du même genre avec l’état, même si c’est moins aigu parce qu’on est moins étatistes.
Exemple:
http://www.lematin.ch/suisse/armee-gaspille-700-millions-projet-rate/story/22015841
http://www.jlrv.ch/2011/09/larmee-suisse-%E2%80%93-entre-misere-et-aveuglement/
Libertarien: “nous aussi nous avons des problèmes”
Le système “sans problème” n’existe pas mais entre le système français en faillite et le système Suisse qui squatte les premières place de quasi tous les classements, quand même !
Pour préciser: ces choses sont des rêves inaccessible en France:
État à 35% du PIB (57%)
Dette à 34.2% (100%)
chômage des jeunes à 3.7% (24%)
Liberté économique: 4eme (70eme)
Compétitivité: 1er (22eme)
etc. etc.
“système français en faillite”
certes mais que le monde entier nous envie, c’est bien connu.
C’est vrai que la médiocrité vue de l’enfer, c’est le paradis …
Au Québec, une collègue de travail s’est faite suivre par une voiture après avoir pris un Uber à la gare.
Arrivée sur l’autoroute, girophare et demande de se mettre sur le côté (ils sont en plein sur la 740 pour ceux qui connaissent, bonjour sécurité !).
Deux hommes descendent de cette voiture, ce sont des gardiens (pas la police donc, comme on aurait pu le croire) engagés par les corporations de taxis pour traquer les personnes utilisant Uber.
Ils ont menacés d’appeler le 911 pour dénoncer l’usage illégal de ce service.
Les corpos sont prêtes à tout quand on touche à leur monopole.
Faire arrêter quelqu’un par des gardiens de sécurité au Québec?
C’est illegal d’arrêter une voiture, ils auraient du effectivement appeler le 911 mais pas pour uber.
Comme Von Mises l’avait dit dans “l’action humaine” une société d’économie mixte, cela n’est pas possible.
L’économie est dynamique, soit elle tendra vers l’économie de marché à 100 %, soit vers l’économie planifiée.
En France, nous allons tranquillement depuis au moins 40 ans vers une économie planifiée, avec tous les problèmes afférents.
Excusez moi H16, je ne connais pas le journaliste qui a dit ce célèbre mot ??
Seb Caré, dans un article de Libé récent.
stéphane: “L’économie est dynamique, soit elle tendra vers l’économie de marché à 100 %, soit vers l’économie planifiée.”
Et inversement.
Une économie purement de marché ou planifiée n’étant pas possible, l’économie va naviguer entre les extrêmes et restera, de fait toujours mixte CQFD.
C’est la position du curseur qui est importante, c’est aussi une question de culture. Les français avec leur fascination des pouvoirs verticaux faite d’hommes providentiels sont un peu abonnés à l’économie planifiée tandis que dans le nord on est beaucoup plus méfiant, donc plus libéral.
Tentant de boycotter cette application merdouilleuse, y compris du point de vue du respect de la concurrence (il y a des lois sur ce thème, que l’état est en charge de faire respecter. Si, c’est vrai, juré craché). Et de faire circuler par SMS ou tout autre moyen la liste de ceux qui sont susceptibles de vehiculer lès paroissiens qui seraient susceptibles de le souhaiter. Non ?
On a l’impression de lire une fiction où l’Etat contrôlerait tout.
Le calendrier français:
1789…….2015, 2016, 2017, 2018, 2019, 2020, 2021, 1984…..1789.
curieusement blablacar qui pourtant concurrence aussi un peu les taxis, n’est pas inquiétée.
Sans doute car rachetée par la SNCF
Si vous ne souhaitez plus cet état il faut cesser de voter.C’est aussi simple que cela.
Pas de légitimité, pas de délégation de pouvoir.
Fin de l’histoire.
de réduire les revenus des artisans pas déduire
Il s’agit bien de déduire le revenu pour réduire… le revenu 😉
donc…l’état doit laisser disparaitre les Taxis , soit , et il se passera quoi a part mettre des millions de personnes (ex taxi) sous la coupe de sociétés gigantesques car leur marché est mondial ?
l’état doit laisser disparaitre les Taxis
Ce n’est pas ce que dit l’article.
mettre des millions de personnes (ex taxi) sous la coupe de sociétés gigantesques
Personne n’oblige les chauffeurs à signer chez avec une de ces sociétés. Uber a des concurrents. Si les chauffeurs ne sont pas contents ils peuvent aller voir ailleurs en quelques clics. Idem pour les clients.
Avec le système de licence, aujourd’hui ce sont les taxis qui sont en position de quasi-monopole.
tout fini en monopole ou en entente plus ou moins cordiale et le taxi n’échappe pas a la règle . mais la vie est ‘mal faite’ , personne ne veut disparaitre même pour de bonnes raisons et fera tout ce qui est possible pour rester en vie..d’où le lobbying .
le taxi uber est une quasi perfection pour le client , d’un clic tu as le service et , pour l’instant , un petit prix , s’en suivra sans doute un début de concurrence entre fournisseurs de clics puis une entente courtoise ou a couteaux tirés(dans les pneus) ..le client en fera les frais , comme dab, demandera de la régulation et on se retrouvera avec des G7 et cie…..avec un service ‘à l’uber’ et un prix de Taxi normal …finalement , c’est cool pour le client et si l’état permet de passer directement à ça , on évitera un tas de misères sur les routes
tout fini en monopole ou en entente plus ou moins cordiale et le taxi n’échappe pas a la règle
Quelle règle? C’est une nouvelle théorie?
c’est cool pour le client et si l’état permet de passer directement à ça , on évitera un tas de misères sur les routes
L’etat ferait mieux d’assurer les conditions d’une concurrence équitable plutôt que de développer des logiciels afin de favoriser les taxis au détriment des VTC…
Pondre un logiciel ? L’État sait faire, avec l’argent du contribuable.
Je souhaite au logiciel Taxi le même succès que le remarquable logiciel de paie des armées, Louvois.