Intérêts négatifs, société sans cash : 2 exemples en Europe

Pourvu que l’Italie et la Suède comprennent leur erreur avant que d’autres ne leur emboîtent le pas.

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Intérêts négatifs, société sans cash : 2 exemples en Europe

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 8 novembre 2015
- A +

Par Bill Bonner

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« Alors là, j’aurais vraiment tout vu » est une expression qui, tout comme « on a atteint la fin de l’Histoire » et « je ne te quitterai jamais », se révèle souvent prématurée. C’est pourtant ce que nous avons dit hier. Pas à haute voix. Nous l’avons simplement articulé, dans un étonnement muet.

Cette semaine, le gouvernement d’Italie a vendu des bons à deux ans rapportant MOINS 0,023%.
Nous ne savons pas ce qui est le plus ridicule : que les Italiens aient pu emprunter de l’argent à taux négatif… ou que la presse ait rapporté cette transaction avec tout le sérieux du monde. Cela aurait dû provoquer des hurlements de rire, un dédain écrasant et une dérision sans fard.

Mais ici, nous ne pointerons pas du doigt en ricanant. Nous n’aurons pas recours à nos sarcasmes habituels. Nous n’enverrons pas tout balader avec force jurons. Non : nous allons faire preuve de dignité ; nous voulons simplement savoir ce que ça signifie.

Un taux d’intérêt négatif implique un monde étrange, peut-être même un monde qui ne peut réellement exister. Prêter à moins de zéro suggère que l’on pense que la valeur actuelle du cash est inférieure à sa future valeur, c’est-à-dire en déflation… et l’on doit aussi supposer que le risque de défaut ou d’inflation frôle le zéro. Cela permet aux Italiens d’aller construire des routes ou verser des retraites avec de l’argent qui leur a coûté moins que rien.

Combien de temps cela va-t-il durer ?

Nous n’en savons rien. Mais tant que les taux restent sous le zéro (et ils pourraient baisser plus encore !), l’argent sera gratuit.

Imaginez que vous achetez une maison. Maintenant vous pouvez voir le méfait à l’œuvre ! Si les prêteurs acceptent un taux négatif ne reposant sur rien d’autre que la bonne foi et le crédit du gouvernement italien, ils seront à coup sûr d’accord pour vous prêter de l’argent sur une maison.

Vous vous retrouveriez avec un bien étrange prêt hypothécaire, qui vous rapporterait des intérêts au lieu de vous coûter de l’argent. Au taux italien, une maison à un million rapporterait environ 19,16 euros par mois.

Voilà qui fait naître de profondes questions métaphysiques. Si un prêt hypothécaire a des intérêts négatifs, ça implique que la maison (dont la valeur en capital est équivalente) a également une valeur négative : visiblement, il faut payer quelqu’un pour y vivre. Et si les maisons valent moins que rien… on peut se demander ce que vaut une voiture… une bague en diamant… ou une croisière de luxe.

Est-ce que ça signifie que l’argent lui-même n’a pas de valeur ? Voire carrément une valeur négative ? Après tout, on ne peut plus le donner à quelqu’un en échange d’un versement d’intérêts positifs ; à présent, il faut payer ce quelqu’un pour le stocker à votre place… comme s’il s’agissait d’un meuble n’entrant plus dans votre maison : vous ne l’aimez plus mais vous n’avez pas le cœur de le jeter.

Et si l’argent n’a pas de valeur, que se passe-t-il lorsque vous embauchez un jardinier, par exemple, pour arracher les mauvaises herbes ? Devez-vous le payer, ou bien est-ce l’inverse ? Combien d’heures doit-il travailler pour vous avant que vous consentiez à accepter son argent ?

Toute cette affaire est si contre-nature que nous en avons le souffle coupé en y pensant. Nous sommes tout déconfits. Mais vous êtes une personne intelligente, cher lecteur. Peut-être que vous pourrez nous aider à comprendre.

Il y a quelque chose de pourri au royaume de Suède

Tout ça n’était qu’un prélude à l’étrange cas de la Suède. Tout ce que nous savons de ce pays, c’est ce que nous avons appris en regardant le film Millénium. Ce que nous en avons retenu dans les grandes lignes, c’est que les Suédois tendent à être des meurtriers, des sadiques, des lesbiennes ou des mauviettes boutonneuses. Peut-être que ça explique le système financier tortueux que les Suédois sont en train de créer. Selon Business Insider :

« La Suède se prépare à être le premier pays à plonger ses citoyens dans une expérience économique fascinante et terrifiante : des taux d’intérêt négatifs dans une société sans cash.
La banque centrale suédoise, la Sveriges Riksbank, a maintenu mercredi son taux directeur à -0,35%, le niveau auquel il est depuis juillet.

Même si les banques n’ont pas encore répercuté ce taux négatif sur les consommateurs suédois, elles sont confrontées à une pression croissante pour le faire tant que les taux demeurent à leur niveau actuel. C’est un problème dans la mesure où la Suède est le pays au monde le plus proche d’une société sans cash, entièrement électronique.

Il faut savoir que la Suède est un endroit où, si l’on utilise trop de cash, les banques appellent la police en croyant que vous pourriez être un terroriste ou un criminel. Les banques suédoises ont commencé à supprimer les distributeurs de billets dans les régions rurales, irritant les personnes âgées et les agriculteurs. Selon Crédit Suisse, la règle de base en Scandinavie est la suivante : ‘si vous devez payer en espèces, c’est que quelque chose ne va pas’.

La résistance s’organise, et certaines personnes protestent contre l’extinction prochaine des espèces. Björn Eriksson, ancien chef de la police nationale suédoise et désormais à la tête du Säkerhetsbranschen, un groupe de lobbying pour le secteur de la sécurité, a déclaré au journal The Local : ‘j’ai entendu parler de personnes gardant des espèces dans leur four micro-ondes parce que les banques ne veulent pas l’accepter’. »

Les lecteurs alertes auront reconnu cette affaire de taux négatifs : nous la suivons depuis quelque temps déjà et nous prédisons que cette politique sera bientôt en action dans la plupart des économies développées. Nous sommes d’avis que les autorités limiteront l’utilisation du cash autant que possible pour étendre leur pouvoir sur l’économie et être en mesure de taxer et dépenser à leur guise sans autre forme de processus démocratique.

La Suède est en avance : nous ne pouvons qu’espérer qu’elle fasse un bon bout de chemin rapidement… et explose en vol avant que nous ne soyons tous atteints.


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  • bien sur que les autres vont leur emboiter le pas ; ils en rêvent , ils en salivent rien que d’y penser ; et comme d’habitude ils feront passer leur désir et leurs intérets sans réfléchir plus loin que leur nez ……c’est toujours quand les conneries sont faites qu’ils se rendent compte de leurs érreurs…..érreurs payés par les citoyens bien sur et sur le long terme ….

  • « que se passe-t-il lorsque vous embauchez un jardinier, par exemple, pour arracher les mauvaises herbes etc … accepter son argent ? » : petite blague qui circulait à l’est lors de la chute de l’ex Urss : un oligraque discutant avec un autre : – avant on les payait une misere et ils venaient bosser, après on ne les a plus payés et ils venaient quand même
    – et si on leur faisait payer l’entrée de l’usine ?
    bon , nous y sommes … nous avons passé le mur du son monétaire , retrournement de valeur , ça va devenir instable à géométrie constante

  • je ne comprends rien , l’argent a toujours eu des taux négatifs, l’usure , sauf qu’aujourd’hui l’absence d’inflation rend visible ce qu’est réellement l’argent , un truc qui doit vous bruler les mains et vous devez vous en débarrasser pour ce que vous voulez , de la moutarde , des actions des terrains n’importe quoi mais débarrassez vous en !!

    • Et s’il y a panne du lecteur de carte, comment payez-vous ❓ Oui, cela peut arriver, l’électronique n’est pas infaillible, sinon, un coup de pelleteuse malencontreux. Alors avoir du cash lors d’un voyage, c’est toujours utile.
      Sinon, c’est encourager le travail au noir, paiement en liquide, car le cash ne disparaîtra pas, c’est la petite graisse de l’économie.

      • cela m’est arrivé a l’étranger à 4 h du mat pour prendre l’unique ferry…ce n’est pas drôle mais on n’en meurt pas 😉

        mais , en effet , cela va dans le sens du ‘tout contrôle’ par l’état…ce que je me fous totalement , je n’ai rien a cacher..dans ma vie ‘sociale’ et respectueuse des lois iniques de la république .
        le cash ne disparaitra pas ..malheureusement , les états reprennent toujours les ‘bonnes’ idées des autres si cela les arrange

  • La Suède est actuellement très dynamique, j’espère qu’ils vont pas foutre ce pays magnifique en l’air !

  • Une question qui prend alors tout son sens: dans un monde NIRP et privé de la fonction de réserve de valeur de la monnaie (puisque de cash) tel que vous le décrivez, que deviennent les pensions?
    Les engagements des états vis à vis de leurs fonctionnaires deviendront-ils super privilégiés par rapport au privé, et au capital disponible pour la création de nouvelles richesses (small business)?

  • En prélevement sur mon compte mois après mois des « frais » de toute sorte, j’en conclut aussi que mon compte est en phase « négatif »..A la fin de l’année, le total des frais finalement c’est la mème chose que les taux d’intéret négatifs..

    • Rien à voir, les frais n’ont rien d’anormal car ils sont la rémunération d’un service rendu pour la gestion d’un compte courant (s’ils sont trop élevés, faites jouer la concurrence). Il faut bien que les banques vivent car elles aussi victimes de la baisse des taux due à la concurrence déloyale de la BCE qui crée des tombereaux de monnaie sans demander d’intérêt significatif. Elles ont donc du mal à faire fructifier le peu que vous laissez sur votre compte courant.
      Tout le mal vient de la gestion délirante de la création monétaire. L’argument du soutien économique pour cette création n’est par ailleurs qu’un masque, l’objectif des états est de pouvoir s’endetter (donc refiler le mistigri à leurs successeurs et à nos descendants) sans en payer le prix. La création monétaire n’est donc rien d’autre qu’un impôt de plus. A l’échelle européenne, la BCE fait à peu près la même chose que la banque de France autrefois quand elle faisait des avances gratuites à l’état.
      Les taux négatifs ne sont pas une nouveauté. Quand la monnaie se dépréciait autrefois plus vite que les taux d’intérêt nominaux, il s’agissait bien d’un taux réel négatif.
      La parade est connue : il ne faut pas garder d’avoirs monétaires, il faut les convertir dès que possible en biens réels (actions, immobilier…).

  • La Suisse applique également les taux négatifs pour faire payer la soit-disante sécurité du franc suisse…je pense par ailleurs que les taux négatifs sont une manière de faire baisser les prix notamment immobilier qui ont atteint dans certains pays des sommets inaccessibles, votre parallèle avec votre prêt hypothécaire en est la preuve. Le problème vient des conneries de la BCE, de la Fed et autres qui ont injectés des billiards de dollars/euros/yen sur les marchés et aujourd’hui la masse monétaire est tellement énorme que théoriquement l’argent ne vaut plus rien…

  • Si on ne peut plus s’échanger des Euros, on échangera des Dollars US.

  • Allez, hop hop hop, c’est parti pour le progrès. On emboîte le pas, svp.

  • « Prêter à moins de zéro suggère que l’on pense que la valeur actuelle du cash est inférieure à sa future valeur, c’est-à-dire en déflation… et l’on doit aussi supposer que le risque de défaut ou d’inflation frôle le zéro. » …

    Je suis d’avis qu’il s’agirait plutôt d’un signe qu’un certain nombre d’investisseurs et de gestionnaires de portefeuilles commence à croire à un éclatement inévitable de la bulle financière. Ces gestionnaires cherchent donc à protéger leurs placements contre un effondrement des valeurs boursières et immobilières. Selon cette vision, seule la puissance de l’état avec sa capacité de contrôle de la monnaie est en mesure de garantir la valeur de leurs placements. En ces temps d’instabilité économique où les actifs financiers menace sérieusement de s’effondrer, les gestionnaires de portefeuille acceptent donc de payer une prime à l’état en échange d’une assurance de l’état sur la valeur de l’argent qu’il lui confie.
    Un déplacement des valeurs boursières et immobilières vers les obligations d’états pour fin de protection contre un effondrement des actifs financiers, si effectivement il a lieu à cette fin, constitue une forte pression à la baisse sur les taux des obligations car il provoque une augmentation inhabituelle de la demande pour ces obligations. Un tel phénomène n’est pas encore perceptible sur le volume des transactions boursières mais s’il prend de l’ampleur, il faudrait alors y voir un signe imminent de l’effondrement boursier car il pourrait en être le facteur déclencheur ou un puissant accélérateur.

    Donc dans cette hypothèse, les taux d’intérêts négatifs seraient le signe d’une demande plus forte pour les obligations d’état qu’en est l’offre actuelle. Cette forte demande pour les obligations d’état serait motivée par la nécessité pour les investisseurs de protéger les valeurs de leurs placements contre un effondrement prévisible des autres actifs financiers. Les états qui en sont plus que conscients maintiennent un politique monétaire qui leurs permet d’offrir une telle garantie à court et moyen terme et en profite au passage pour se financer à des taux réduits et même négatifs selon la demande.

    • Je ne suis pas sur que les obligations d’état soient tant demandées. Si c’était vrai elles ne s’accumuleraient pas au bilan de la BCE. A moins d’y être forcé par la réglementation (assurances et banques ) personne de sensé n’achète des obligations rapportant si peu et risquant de perdre fortement leur valeur en cas de reprise de l’inflation. Pour se protéger d’un effondrement monétaire, les titres de propriété d’actifs réels (en dernière analyse une action est une part d’un outil de production) sont bien plus intéressants car ils gardent leur valeur intrinsèque indépendamment des soubresauts monétaires.

      • Pour que les taux des obligations d’états baissent, c’est qu’il-y-a une demande plus forte que l’offre, autrement, les gouvernements n’auraient d’autre choix que d’offrir de meilleurs taux pour pouvoir continuer à emprunter. S’ils peuvent offrir des taux de plus en plus bas, c’est qu’il-y-a assez de demande pour vendre leurs obligations à ces taux.

        Ce que vous dites à propos des actions est vrai pour de l’argent que vous placez pour le long terme. Mais à court terme, si vous avez une grande quantité d’argent à placer mais dont vous savez que vous aurez besoin de récupérer dans les trois à cinq prochaines années, si prévoyez une forte correction boursière d’ici là, dans quel type d’actifs financiers allez-vous investir ? Je ne crois pas que vous allez acheter des actions quand vous anticipez que dans deux ou trois ans il ne sera possible de les revendre qu’à 50% ou moins du prix que vous les avez acheté.

        • La demande d’obligations d’état est très dépendante de la BCE. Si elle n’en achetait plus ou n’en prenait plus en collatéral (ce qui dissuaderait les banques ordinaires d’en acheter), la demande chuterait et les états devraient accepter de payer des taux d’intérêt plus fort pour émettre d’autres obligations, les obligations anciennes en circulation seraient alors fortement dépréciées.

          • Mais malgré ces interventions de la BCE sur le marché des obligations d’état européens qui entraînent les taux à des valeurs négatives, il-y-a tout de même des investisseurs qui en demande. Ce phénomène témoigne de la très grande confiance qu’ils accordent aux obligations européennes comparativement à la stabilité à court et à moyen terme des actions en bourses et ce malgré le fait qu’ils doivent désormais payer un intérêt négatif pour les obtenir. Voir le lien suivant : http://fr.investing.com/rates-bonds/world-government-bonds, on peut y constater que les obligations de l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, le Danemark, l’Espagne, la Finlande, la France, l’Irlande, les Pays-Bas, la Suède et la Suisse se vendent toutes actuellement à des taux négatifs pour les échéances à court et à moyen terme.

            • J’avoue ne rien comprendre à ce mystère (je subodore un règlement vicieux poussant à ce comportement) . Pourquoi ne pas simplement garder du cash dans ce cas (sans le déposer en banque puisque celles ci ne sont pas à l’abri d’un phénomène de type Chypre) ? Par ailleurs si les obligations d’état étaient si populaires, la BCE n’aurait pas besoin de les acheter et il n’y aurait pas besoin de QE. Je vous accorde que les actions peuvent baisser mais ce n’est rien à coté du plongeon que feront les obligations si les taux remontent !

  • Nous atteignons ici le sommet de l’imposture démocratique. Ce type de régime fondé sur le suffrage prétendu universel a permis aux partis politiques de prendre définitivement le pouvoir sur les peuples. La philosophe Simone Weil avait prévu cette dictature des partis agissant sous le masque de la démocratie dès les années 40. Nous y sommes.

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