Régionales 2015 : l’ensemble de la classe politique a perdu

Le Parti Socialiste et Les Républicains pourront-ils continuer comme avant, sans aucune remise en question ?

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Régionales 2015 : l’ensemble de la classe politique a perdu

Publié le 14 décembre 2015
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Par Nathalie MP

Nous avons donc enfin les résultats des élections régionales. Non pas que ces élections auront un impact colossal sur nos vies quotidiennes. Les régions gèrent un budget qui représente 2,5% du budget total de la France et leurs compétences principales, transports et lycées, dépendent largement de décisions nationales. Mais « enfin », car elles ont pris une tournure politique particulièrement aiguë lors du premier tour qui a placé le Front national en tête des partis avec 28% des suffrages exprimés et plus de 6 millions de voix, l’abstention se situant à 50%. Cependant, comme on commençait à le pressentir pendant l’entre-deux tours, le formidable score du Front national a finalement débouché sur un échec assez retentissant : le parti de Marine Le Pen, présent dans toutes les régions au second tour, n’en a décroché aucune. La gauche en obtient cinq en métropole et la droite sept. L’abstention recule à 41,3%. 

Tableau des résultats

régionales 2e tour

– Alsace Champagne-Ardenne Lorraine : 48% (Droite) – 36% (FN) – 15% (Gauche)
– Aquitaine Limousin Poitou-Charentes : 44% (Gauche) – 34% (Droite) – 22% (FN)
– Auvergne Rhône-Alpes : 41% (Droite) – 37% (gauche) – 23% FN
– Bretagne : 51% (Gauche) – 30% (Droite) – 19% (FN)
– Bourgogne Franche-Comté : 35% (Gauche) – 33% (Droite) – 32% (FN)
– Centre Val-de-Loire : 35,4% (Gauche) – 34,6% (Dr) – 30% (FN)
– Île-de-France : 44% (Droite) – 42% (Gauche) – 14% (FN)
– Languedoc Roussillon Midi Pyrénées : 45% (Gauche) – 34% (FN) – 21% (Droite)
– Nord Pas-de-Calais Picardie : 58% (Droite) – 42% (FN)
– Normandie : 36,4% (Dr) – 36,1% (Gauche) – 28% (FN)
– Provence Alpes Côte d’Azur : 54% (Droite) – 46% (FN)
– Pays de la Loire : 43% (Droite) – 38% (Gauche) – 20% (FN)

– Corse : 35% pour la liste régionaliste de Gilles Siméoni
– Réunion : 53% (Droite) – 47 % (Gauche)
– Guyane : xx
– Guadeloupe : xx
– Martinique : xx

La répartition des sièges se fait selon la règle suivante :

« Au second tour, la liste qui arrive en tête obtient un quart des sièges à pourvoir. Les autres sièges sont répartis à la représentation proportionnelle entre les listes ayant obtenu au moins 5% des suffrages exprimés au second tour. »

Ainsi, dans les douze Conseils régionaux de la métropole, la droite aura 778 sièges, la gauche 539 sièges et le FN 354 (sauf erreur de calcul de ma part).

En voix, les fusions et désistements de l’entre-deux tours ne permettent pas de situer valablement la droite et la gauche. Par contre, le FN, inchangé dans son périmètre, progresse encore en totalisant 6,8 millions de voix tout en stagnant à 27,3% des suffrages exprimés en raison de la plus forte participation.

Par force politique

  • Avec cinq régions sur douze en métropole, la gauche fait mieux que ce qui était prévu avant les attentats de novembre, compte tenu de l’échec de ses politiques sur le plan économique comme sur le plan de la sécurité intérieure, mais moins bien que ce qu’elle s’imaginait pouvoir réaliser après le premier tour malgré les ralliements des verts et du Front de gauche.
  • À l’inverse, la droite qui n’avait pas vraiment performé au premier tour se retrouve en première position pour le nombre de régions gagnées (sept). On est loin d’une vague bleue, mais les apparences sont pour ainsi dire sauves.
  • Le Front national n’obtient finalement aucune région, mais il arrive en deuxième position non seulement en NPDCP et PACA, régions de duels avec la droite, mais aussi en Alsace Champagne-Ardenne Lorraine et en Languedoc Roussillon Midi Pyrénées où il était confronté à des listes de droite et de gauche. Au total, il aura 354 élus dans les douze conseils régionaux de métropole, alors qu’il en avait 118 dans la précédente mandature. Il continue donc sa progression dans toutes les instances politiques du pays.

Que penser de tout cela ?

Le Front national se retrouve dans une situation qui lui plait beaucoup. Aurait-il gagné des régions, qu’il aurait pu crier victoire et broder sur l’élan qui le porte vers la présidentielle de 2017. Mais la victoire est toujours à double tranchant car ensuite il faut montrer de quoi on est capable ou incapable. Dans les circonstances actuelles, le Front national échappe à toute situation immédiate de responsabilité. Il reste dans l’opposition et peut se consacrer à ce qu’il fait le mieux : se poser en victime des petits arrangements de l’UMPS, et broder sur l’élan qui le porte vers 2017.

Est-il anormal qu’un parti qui a recueilli 28% des voix ne soit pas « représenté » ? Eh bien en réalité, le FN est représenté puisqu’il a 354 élus. Au premier comme au second tour, il était présent dans les douze régions de la métropole. Les Français ont eu tout loisir de voter pour lui. À l’issue du vote, qui a vu se mobiliser beaucoup plus d’électeurs qu’au premier tour, aucune région ne lui a donné la première place. Ce n’est pas une conspiration, c’est le résultat du vote. Le fait que le Parti socialiste ait retiré ses listes en NPDCP et PACA a bien sûr beaucoup joué, mais c’est là aussi le jeu normal des élections et du tripartisme. Notons que dans ces deux régions la gauche n’a plus aucun élu régional. Aujourd’hui, il me semble qu’on peut dire que le FN est un parti comme les autres, avec les mêmes possibilités que les autres et les mêmes accès aux électeurs. Mais il a perdu les élections. Ça arrive.

On peut se réjouir de l’échec de Marine Le Pen dans le Nord. Son programme est non seulement désastreux, il est borné. Sa morgue comme sa vulgarité étudiée sont insupportables, et l’idée de remédier au manque de libéralisme de la politique française par un projet complètement fermé et encore plus étatiste que ce qui se pratique actuellement est absurde.

Toujours est-il que le résultat du premier tour qui a octroyé la première place au FN dans six régions a donné des sueurs froides à plus d’un responsable politique. Si au second tour, tout semble « rentré dans l’ordre », si tout le monde ou presque se félicite du « sursaut républicain » etc. etc., ce serait une terrible occasion gâchée que de s’imaginer pouvoir continuer comme avant, sans aucune remise en question. Ce genre de semonce n’est pas nouvelle, on l’a vécue en 2014 pour les Européennes, puis en 2015 pour les Départementales et maintenant pour les Régionales. Au lendemain des votes, tous les responsables politiques jurent la main sur le cœur qu’ils ont entendu les électeurs. Hier soir, par exemple, Nicolas Sarkozy a déclaré :

« Ce serait une grave erreur de passer, comme trop souvent, d’une élection à une autre comme si les Français ne nous avaient rien dit. »

Et puis plus rien, si ce n’est un petit vote par-ci par-là qui vient conforter les avantages des élus ou ceux de leurs amis.

Or il se trouve que si de nombreux  électeurs votent par adhésion directe aux idées du Front national, beaucoup d’autres le font de plus en plus en reconnaissant la totale aberration du programme de ce parti, mais dans l’idée de bousculer notre classe politique. On se demande bien ce que le Parti socialiste pourra tirer comme leçon de tout cela, si ce n’est qu’on commence à entendre des appels pour que la gauche redevienne la gauche, celle dont « l’ennemi, c’est la finance qui n’a pas de visage. » 

Si la gauche doit redevenir la gauche, cela devrait être l’occasion pour la droite de prendre son destin en main en se démarquant une bonne fois pour toutes des politiques collectivistes et étatistes qui sont la marque de ses deux adversaires politiques et qui ne produisent aucun résultat valable. Il serait bien sûr tout à fait contre-productif de se lancer dans un « grand soir » libéral pur et parfait qui renverse tout en un instant. Les Français, tellement habitués à l’encadrement de l’État, doivent être apprivoisés. Il est en revanche parfaitement possible d’imaginer un chemin progressif de réduction du poids de l’État, de réforme de nos structures les plus pénalisantes, à commencer par le marché du travail et notre système éducatif, et de libération des énergies créatrices et innovantes, à commencer par la suppression du principe de précaution, qui ne protège rien mais pétrifie tout.

Rappelons-nous :  Marine Le Pen nous menaçait de la charia dans notre Constitution si on laissait notre sort entre les mains des autres partis, tandis que Manuel Valls nous promettait la guerre civile si on votait pour le FN (et a continué hier soir sur sa lancée). Et n’oublions pas : le Front national, c’est ce parti qui propose de restaurer la peine de mort par référendum, et le parti socialiste, c’est celui qui, au pouvoir aujourd’hui, envisage de rétablir la délation fiscale rémunérée.

Face à tant d’hystérie racoleuse et irresponsable, y aura-t-il juste assez de monde pour avoir le courage de regarder la réalité en face, observer ce qui se passe dans le vaste monde, cesser de compter sur la pensée magique de l’exception française qui justifie toujours les mesures anti-démocratiques et voir enfin tous les immenses bénéfices de la liberté ?


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  • Nathalie, ça fait déà deux fois il me semble que vous abordez la peine de mort du programme de MLP.
    Vous semblez être contre, certes c’est votre droit mais je ne vois pas pourquoi vous mettez cela à charge de MLP quand bien même elle serait décidée par référendum.
    Il y en a qui par les attentas se posent beaucoup moins de questions éthiques.

      • Bonjour Jesrad
        Et donc quoi ?
        On peut mettre cette mesure à charge de quelqu’un ou pas suivant l’idée qu’on s’en fait et je ne pense pas que ce soit lié intimement à l’opinion politique droite-gauche au sens où ce n’est pas clivant.
        Mettre cela au même niveau que la délation fiscale me semble un peu cavalier.

    • Il y a une différence entre rétablir la peine de mort par référendum et rétablir la délation fiscale rémunérée. Les francais ne voteront pas la peine de mort. Par contre la délation fiscale rémunérée, là, on nous demande pas notre avis. La démocratie à deux balles du PS. Il me semble qu’en corée du Nord, certains gagnent leur vie grâce à la délation.

      • Sondage 8 mai 2015 : 52% des français pour le rétablissement de la peine de mort (Le Monde)
        Et je vous dis pas si on fait ce sondage maintenant !
        C’est bien le problème d’ailleurs avec ces avis qui changent suivant les circonstances.

    • « Il y en a qui par les attentas se posent beaucoup moins de questions éthiques. »

      C’est vrai que la peine de mort pour des gens qui comptent mourir en martir, ça peut que marcher…

  • « Le fait que le Parti socialiste ait retiré ses listes en NPDCP et PACA a bien sûr beaucoup joué, mais c’est là aussi le jeu normal des élections et du tripartisme. »
    Ce serait vrai s’il y avait un minimum de convictions communes entre la droite et la gauche. Si l’on pose la question aux intéressés, ils répondront par la négative. Je pense au contraire que s’allier contre un parti pose un problème démocratique.
    De plus, une région dirigée par le FN aurait privé ce parti de ses arguments classiques, comme vous le soulignez bien.
    En dehors des persoectives que vous tracez pour la droite et que je rejoins, nous allons à la carastrophe en 2017.

  •  »On peut se réjouir de l’échec de Marine Le Pen dans le Nord. Son programme est non seulement désastreux, il est borné. Sa morgue comme sa vulgarité étudiée sont insupportables, et l’idée de remédier au manque de libéralisme de la politique française par un projet complètement fermé et encore plus étatiste que ce qui se pratique actuellement est absurde. »

    Amen

  • Les sotscialistes ont gagné. Si si. Sinon, le parti LR aurait raflé presque toutes les régions, la Bretagne étant socialiste. Le pognon va continuer à rentrer dans leurs caisses : c’est leur motivation principale, le reste n’étant qu’accessoire.

    Ils ont gagné le droit de s’emmêler les pinceaux en commettant les mêmes erreurs à plus forte dose…

    Il est en revanche parfaitement possible d’imaginer un chemin progressif de réduction du poids de l’État

    Il n’y a pas d’autre solution sensée. Faute de la faire, cela finira par de la casse. Ils sont prévenus : ils en seront responsables.

  • La palissade: l’avantage avec la peine de mort, c’est qu’elle évite la récidive. 100% des gens exécutés n’ont pas récidivé. lol

    Sérieusement maintenant. Qu’est ce qui est le plus inhumain ? Laisser moisir quelqu’un en tôle à vie ou lui proposer au bout d’un certain temps de peine, des petits cachets pour qu’il s’évade définitivement et sans retour possible. Bien sur, avant une telle proposition, un parcours doit être mené.

  • Au niveau national, le FN a fait mieux que le Ps et ses alliés. C’est plus des deux tiers des électeurs ( presque 70%) qui ont voté pour la droite ou l’extrême droite. Au second tour, le FN a amélioré son sort par rapport au premier. Le FN est second au second tour derrière LR et ses alliés et devant le ps et ses alliés.
    Il y a quand même un grand écart entre LR et ses alliés et le FN en terme de voix ( plus de 10 %).

    Rappelons que « grâce  » au Fn, la gauche a conservé 2 régions peut être même 3.C’est le FN qui a permis à la gauche de ne pas avoir de déroutes.
    Alors qu’elle arrête de dire qu’elle s’est sacrifiée. Elle a abandonnée là où sa défaite était assurée.

  • Article fort intéressant et dépassionné, qui interroge sur l’avenir de la France qui se tourne toujours sur le passé
    Le FN s’est normalisé, mais il a perdu son âme. Les excès de langage de JM hérissaient le poil d’une majorité, mais était un baume contre lincurie et à médiocrité de ceux qui nous gouvernent depuis la mort de Pompidou
    On peut rêver de Thatcher, voire Camerone ou même de Merkel avant la déferlante de l’immigration.
    Je pense que l’avenir va s’ouvrir pour Marion

  • Le Parti Socialiste et Les Républicains pourront-ils continuer comme avant, sans aucune remise en question ?

    Pour le PS, ou plutôt pour l’exécutif du PS, la réponse est clairement oui : la situation actuelle est la seule solution qu’ils aient pour rester au pouvoir, quitte à faire quelques trahisons et forfaitures.

    Pour les Républicains … la question est clairement sur la table et a déjà éclaté hier soir dans une passe d’arme entre NS et NKM, voir même plus tôt en constatant le discours complétement raté et à coté de la plaque de Juppé qui essayait de revêtir le costume du Grand Charles sans se rendre compte de combien il semblait ridicule et dépassé par les événements.

    En tout cas, le message adressé à la droite est ultra clair, reste à savoir si ils sont en mesure de bien vouloir l’entendre : LR a absolument tout à perdre si ils ne reconstruisent pas une position qui les démarquent complétement des socialistes et des nationaux socialistes.

    On en vient presque à regretter qu’ils aient conservé l’IDF : avec cette demi victoire-demi défaite, rien n’est plus sur qu’ils arrivent à tirer les conséquences de ce qui se passe.

  • Une bonne nouvelle quand même : NKM est virée de la direction du parti LR ! Celle qui traite de connards ceux qui ne pensent pas comme elle (les climato réalistes – ou sceptiques), et qui se drape dans la liberté d’expression bafouée pour commenter son éviction, çà ne manque pas de saveur !

  • « Le fait que le Parti socialiste ait retiré ses listes en NPDCP et PACA a bien sûr beaucoup joué, mais c’est là aussi le jeu normal des élections et du tripartisme. »

    On nous fait le coup depuis des années, élections après élections : on va voir ce qu’on va voir, le FN va s’emparer de ceci ou cela. Résultat : rien du tout. Que dalle.

    Il n’y a de tripartisme que dans les commentaires des journaux, pas en France, car pour qu’il y ait tripartisme il faudrait que le FN soit autrement mieux représenté dans les exécutifs, ne serait-ce que locaux. M’enfin là, maire d’un arrondissement de Marseille, de Béziers, etc. bof bof quoi

  • au final on aura entendu que les socialistes:

    socialistes de gauche(ps), et le cousin dit de droite(lr), mais qui une fois au pouvoir fait quasi la même chose; socialistes écolo, socialistes marxistes,socialistes nationalistes(fn), ….

    Le scandale c’est le non respect du temps de parole des autres candidats sur les chaines et radios nationales ou subventionnées.

  • « Le Front national se retrouve dans une situation qui lui plait beaucoup. Aurait-il gagné des régions, qu’il aurait pu crier victoire et broder sur l’élan qui le porte vers la présidentielle de 2017. Mais la victoire est toujours à double tranchant car ensuite il faut montrer de quoi on est capable ou incapable. Dans les circonstances actuelles, le Front national échappe à toute situation immédiate de responsabilité. Il reste dans l’opposition et peut se consacrer à ce qu’il fait le mieux : se poser en victime des petits arrangements de l’UMPS, et broder sur l’élan qui le porte vers 2017. »

    En fait cette défaite arrange peu Marion Maréchal Le Pen, mais doit certainement arranger Marine Le Pen (dont le vrai prénom est Marion en fait, mais passons). En effet, présidente de région, elle n’aurait pas eu assez de temps pour troller les plateaux de télé et organiser des meetings pour 2017, sans parler de son mandat européen.

    • Pas assez de temps ? Mais Le Drian, alors, lui il a assez de temps pour mener les multiples guerres de la France, il est cumulard dans un parti qui les dénonce, et les électeurs plébiscitent son cumul…

      • Le Drian dispose de personnes fiabes autour de lui, à qui il peut déléguer beaucoup de choses au CR de Bretagne. Ce n’est pas le cas du tout de Mme Le Pen, elle aurait donc dû se coltiner beaucoup de choses elle-même.

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La sociologie électorale privilégie l’approche inductive et fait régulièrement le point sur l’évolution du profil des abstentionnistes. L’économie politique préfère l’approche déductive et l’hypothèse de rationalité.

Elle pose une question simple : est-il rationnel de voter ?

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