Par Nathalie MP.
En septembre 2012 François Hollande annonçait avec beaucoup d’assurance à Claire Chazal que la courbe du chômage devait s’inverser avant un an. Il s’y était engagé, il s’y engageait, il s’y engagera jusqu’à son dernier souffle, enfin, jusqu’à la fin de son mandat, puisque bien sûr il ne pense absolument pas à la suite. Depuis, les mauvais chiffres s’accumulant, l’échéance a été repoussée de nombreuses fois, attestant de l’inanité complète des politiques retenues pour y parvenir. Mais, on va voir ce qu’on va voir, le Président va annoncer pour la millième fois un grand plan pour sa réélection, heu pardon, pour l’emploi.
Quant à savoir si l’on peut nourrir quelques vrais espoirs pour 2016, ne le demandez pas à la ministre du Travail Myriam El Khomri, elle n’en sait rien, n’y peut rien, ne comprend rien, mais donne quand même des avis contradictoires du jour au lendemain sur le sujet. Le 9 janvier 2016 : Non, M. France Inter, la courbe du chômage ne s’inversera pas en 2016. Puis le 11 janvier : Oui, M. Europe 1, la courbe du chômage s’inversera en 2016. Et avant : Non, M. Bourdin, je n’ai aucune idée des modalités du CDD (Contrat à durée déterminée). Oui, Françaises, Français, mes chers compatriotes, je suis ministre ! Ministre du travail !
Comment le chef de l’État a-t-il pu s’engager aussi guilleret sur un critère aussi lourd de signification pour le pays ? Ce n’est pas vraiment un mystère. Après la crise vécue depuis 2008 qui avait largement terni le quinquennat de Nicolas Sarkozy, pour le plus grand bien du retour de la gauche au pouvoir, François Hollande était convaincu qu’un inéluctable retournement de cycle économique interviendrait rapidement après son élection de 2012. Cela lui permettrait de se prévaloir d’une appréciable amélioration de la situation économique, sans trop d’efforts pour son gouvernement, et sans trop de reniements de ses valeurs de gauche fièrement portées pendant la campagne. Il y croyait si fort que, tout en voyant l’emploi se dégrader de mois en mois en dépit de mesures anti-chômage censées tout arranger, l’inversion de la courbe du chômage est devenue la condition sine qua non de sa candidature en 2017 (1′ 13″) :
Voilà un engagement qu’on ne risque pas d’oublier. Si François Hollande veut effectivement se représenter, il devra annoncer sa candidature au début de 2017, ce qui le contraint à afficher un résultat décisif sur l’emploi en décembre 2016. Un résultat décisif consistant au minimum en une baisse du chômage pendant trois mois consécutifs, l’inversion de la courbe devra impérativement s’amorcer au plus tard en septembre.
Notons que ce serait un résultat d’une grande médiocrité. Imaginons (avec optimisme) que le chômage plafonne à son niveau actuel jusqu’en août 2016, puis recule de 25 000 personnes par mois pour les catégories A, B et C de septembre à novembre 2016, ce qui ne s’est pas vu une seule fois depuis plus de huit ans. Le nombre de demandeurs d’emploi à fin novembre 2015 pour la France avec son Outre-Mer étant de 5 743 600 dans les catégories A, B et C (*), il serait alors de 5 668 600, à comparer aux 4 621 000 de mai 2012, soit une augmentation sur le quinquennat de plus de 1 million. Rappelons qu’à ce jour la France compte 1 122 600 chômeurs en plus depuis l’élection de Hollande (voir tableau ci-dessus). Et rappelons que des pays comme le Royaume-Uni et l’Allemagne, comparables au nôtre pour la taille de leur économie et leur population, l’un étant dans la zone euro et l’autre pas, ont actuellement des taux de chômage situés entre 5 et 6 % tandis que nous dépassons les 10 %.
François Hollande a donc commencé à sortir quelque jolis lapins blancs de son chapeau lors de ses vœux 2016 aux Français. Les techniques anti-chômage tentées en début de quinquennat, telles que les contrats de génération, ayant montré leur inutilité, et les retombées du Pacte de responsabilité se faisant plutôt maigres malgré les flonflons qui continuent à accompagner ce dispositif de création d’emplois en échange de baisses de charges sur les bas salaires, il devient urgent de passer aux choses sérieuses. François Hollande a même décrété l’état d’urgence économique et sonne le rappel des bonnes vieilles méthodes socialistes : service civique pour tout le monde et plus, plan de formation pour tout le monde et plus, grands travaux pour tout le monde et plus. Si avec tout ça, il n’arrive pas à faire baisser le chômage et à calmer le chahut permanent des frondeurs, c’est vraiment à désespérer des grandes mesures emblématiques de gauche. Des esprits chagrins font observer qu’on ne met pas 500 000 personnes en formation comme ça d’un claquement de doigts. Encore faudrait-il réfléchir aux formations souhaitées, et leur mise en place pourrait prendre un certain temps.
À vrai dire, pour François Hollande, l’état d’urgence économique a surtout les allures d’un état d’urgence politique. Alors que la tradition de la Vème République donne au Président sortant la priorité pour se présenter à sa propre succession, tandis que l’opposition organise, ou pas, des primaires pour déterminer son candidat, voilà que des voix de gauche commencent à évoquer la possibilité, ou pire la nécessité, de procéder aussi à des primaires à gauche. Ainsi, un regroupement plutôt baroque incluant Daniel Cohn-Bendit, Thomas Piketty, Vikash Dhorasoo ou Philippe Torreton a lancé un appel en ce sens dans le journal Libération la semaine dernière, déclenchant pas mal de remous au parti socialiste (1′ 20″):
« Nous refusons les renoncements face aux inégalités sociales, à la dégradation environnementale, aux discriminations et à l’affaissement démocratique. » (Appel pour une grande primaire des gauches et des écologistes, 10 janvier 2016)
« Renoncement face aux inégalités, affaissement démocratique », c’est dire la défiance dans laquelle le Président de la République est tenu sur sa gauche. Mais ce n’est jamais que le simple constat du grand écart pratiqué depuis le début entre les promesses de campagne électorale et le déroulement effectif du mandat. Aux yeux des frondeurs, la timide loi Macron a transformé Hollande en ami de la finance, tandis que les projets d’inscription dans la Constitution de l’état d’urgence et de la déchéance de la nationalité pour les bi-nationaux convaincus de terrorisme en font bel et bien l’ardent défenseur d’une politique aussi sécuritaire qu’inefficace contre le terrorisme.
Ajoutons que la cote de popularité de François Hollande, soutenu pendant la période post-attentat, est retombée à ses 20 % habituels. De plus, les sondages réalisés afin de tester les candidatures possibles pour la présidentielle persistent à le donner perdant dans à peu près tous les cas de figure sauf face à Nicolas Sarkozy. Selon une enquête de l’institut Odoxa publiée hier, Emmanuel Macron serait le mieux placé pour faire gagner la gauche, tandis que la droite sortirait gagnante avec Alain Juppé. 79 % des personnes interrogées ne souhaitent pas que François Hollande se représente et 59 % aimeraient voir la tenue de primaires à gauche. Pas folichon, tout ça, pour Hollande.
Si l’on en croit les chroniqueurs politiques, cette revendication d’une primaire à gauche ne perturbe pas le Président plus que ça. En campagne électorale, il s’y était montré favorable, mais il n’est plus à un petit revirement près, comme on l’a déjà vu cent fois depuis trois ans. Comment pourrait-il participer à une primaire, allant de réunions politiques en réunions politiques pour faire valoir sa candidature aux quatre coins de la France de gauche, alors qu’en tant que Président de la République les Français attendent de lui qu’il gouverne jusqu’au bout pour inverser cette foutue courbe ? Manuel Valls, en Premier ministre loyal, a réaffirmé face à Laurent Ruquier samedi soir dans l’émission On n’est pas couché que François Hollande, futur Président sortant, est le « candidat naturel » de la gauche.
Il est cependant une primaire que François Hollande aimerait bien voir se tenir, celle qui permettrait de limiter les candidatures de premier tour entre les Verts, le Parti de Gauche et les communistes, voire également le Parti radical de gauche avec Christiane Taubira. Pour l’instant cette dernière est sous surveillance à l’intérieur du gouvernement, mais sa solidarité gouvernementale est mince. Et les socialistes ne se rappellent que trop le traumatisme du 21 avril 2002 : non seulement Jospin a été éliminé au premier tour au profit de Jean-Marie Le Pen, mais Christiane Taubira avait obtenu les 2,32 % qui auraient largement permis à Jospin de passer au second tour.
Qu’y a-t-il aujourd’hui dans le grand shaker politique de l’Élysée ? Une promesse d’inverser la courbe, une courbe qui ne s’inverse pas par les moyens naturels, un Président qui veut se représenter, des Français qui n’en veulent plus car il ne tient pas ses promesses, une ultra-gauche qui réclame des primaires à gauche, et un plan de baisse du chômage par emplois aidés. Secouons, et regardons : il n’y aura pas de primaire à gauche, François Hollande se représentera, et il pourra s’appuyer sur la courbe qui se sera inversée, il y veillera, grâce à la subventionnite aigüe qui caractérise les politiques socialistes et qui, malgré ce qu’ils en disent, rassure les Français, surtout quand ce sont les autres, les riches, les générations futures, qui paieront les impôts qui financeront tout ça. C’est du moins le plan de Hollande, les mesures pour l’emploi qu’il doit annoncer ce matin formant la première indispensable marche. De sa candidature, pas de la lutte contre le chômage.
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Sans vouloir cautionner Hollande et son bilan ou même le socialisme, je ne pense pas qu’il ne cherche qu’une réélection en soi. Selon certains chroniqueurs une fois réélu Hollande pourrait jouer la carte Valls/Macron plus librement puisque lui-même et les sympathisants penchent nettement plus au centre gauche. La difficulté est d’apparaître comme le candidat de la gauche (d’un point de vue comptable) face à la droite. Et là le bilan Hollandiste et le contexte du moment des élections seront sans doute déterminants.
Je vais peut-être choqué mais qui sait si un Macron ne peut pas incarner une sorte de Thatcher à terme.
Le coup du Président social démocrate en privé, on nous fait le coup depuis le début du quinquennat, voir depuis la campagne des élections de 2012 … C’est en fait juste un leurre très classique pour convaincre les centristes. la réalité est que Hollande mène une politique de gribouille sans colonne vertébrale et pleine de contradiction. Il peut donc exhiber des politiques de toutes sortes suivant la tendance de ses interlocuteurs. C’est juste une manipulation politique digne d’un premier secrétaire du parti socialiste cherchant un équilibre entre les motions. en mettant un peu de toutes les tendances dans sa politique. Mais au final, ce manque de structure ne mène le pays nul part et nous faisons du surplace la tête sous l’eau.
En effet c’était le cas jusqu’ici et le sera peut-être demain. Mais ce n’est pas certain : le contexte général évolue et influence inévitablement les stratégies les plus classiques. La gauche de la gauche est de plus en plus faible, et bien qu’elle reste influente pour des raisons comptables, le centre de gravité de la gauche penche toujours plus vers le centre du moins sur les aspects économiques. De plus le chômage est plus élevé qu’il ne l’a jamais été, l’endettement aussi et la France perd du terrain sur le plan international. Bref les conditions sont éventuellement réunies pour que s’opère un changement de l’intérieur, un changement non planifié mais qui s’établirait de fil en aiguille par la main invisible de l’impérieuse nécessité des temps (à condition que la démocratie persiste).
A ce titre j’oserai la vision suivante :
on dit généralement que la gauche favorise plutôt les libertés sociétales et la droite plutôt les libertés économiques. Alors imaginons un gars comme Macron (et Valls dans une moindre mesure), non encarté mais avec les mains dans le cambouis socialiste français, incarner cette révolution de palais. Nous aurions une société plus libéral à tous égards. Autrement dit il vaut mieux pour les valeurs libérales que l’évolution vienne de la gauche plutôt que de la droite car + et +=+ alors que + et – = – ou statu quo.
Enfin pour aller au bout de ma logique visionnaire, cet homme poussé par le destin n’aurait d’autre choix devant ce glissement idéologique que de dégrader la fonction présidentielle en faveur d’un parlement new look.
Votre vision est plausible. Pour autant, aura-t-il encore assez de fidèles derrière lui le moment venu?
@artemus
Excusez moi mais votre raisonnement ne tient pas une seconde.
primo parce que la défense des libertés ne se résume pas à la liberté économique. Or le gouvernement Valls multiplie les atteintes à la liberté (liberté d’expression, surveillance du web…°
Secundo parce que comme l’a bien dit Deres Hollande mène plus une politique de gribouille qu’autre chose. Et les inflexions vaguement libérales avancent masquées.
Tertio parce que je crois vraiment qu’Hollande se contrefout de l’intérêt de la France. Regardez la ridicule polémique sur la déchéance de nationalité. Il ne l’a engagée que par calcul politicien dans les heures qui ont suivi les attentats de novembre : en pleine crise, alors que des blessés par balle emplissaient les hôpitaux. Ce type n’a aucune décence !
Il ne fera pas plus de réformes dans un second mandat que dans le premier. Il sera de toutes façons tributaire des voix de la « vraie » gauche pour se faire élire.
Non, il n’y croit pas, il n’est pas stupide. Il le fait bien pour être réélu. Et si après, il arrive a pousser des gens de la classe de Macron, les autres étant tous en-dessous de tout, il gagnera peut-être son pari. Du moins en partie.
Encore faudrait il qu’il arrive au second tour de l’élection.
François HOLLANDE sera certainement présent au deuxième tour des présidentielles de 2017 et il sera élu pour un nouveau mandat de 5 ans.
Dans un geste citoyen les français sauront ainsi faire le bon choix.
Moi-Présigland est déjà candidat au cas où certains ne l’auraient pas vu. Ce qui implique qu’il n’y aura pas de primaire au PS et que les prochains chiffres du chômage serviront juste à occuper la galerie.
Il a déjà fait le coup du reniement avec la vérification démocratique de mi-mandat. Il est comme tous les socialistes : obsédé pathologiquement par le pouvoir.
Et oui, il ne faut pas sous estimer un grand professional de la politique qu’est Hollande… c’est son métier!!
Il a déja commencer sa champagne, il prepare les futurs bons chiffres du chomage (formation, emploi aide), avec le baril pas cher et des vente de rafales plus quelques commemorations contres les mechants… et hop le tour est joué!
Si en plus en face, on lui met Aubry ou Montebourg en primaire… puis Sarko-LePen… c’est du pain béni pour le père Francois!!
Pourvu que les francais voient clair!!