Taxis contre VTC : la guerre des rentes

Quelle est l’origine du conflit entre taxis et vtc ? Le point de vue du droit.

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Taxi parisien - Crédit photo : Chris Goldberg via Flickr (CC BY-NC 2.0

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Taxis contre VTC : la guerre des rentes

Publié le 23 janvier 2016
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Par Benjamin Iosca.
Un article de l’IREF-Europe

Taxi parisien - Crédit photo : Chris Goldberg via Flickr (CC BY-NC 2.0
Taxi parisien – Crédit photo : Chris Goldberg via Flickr (CC BY-NC 2.0

Le droit est partout, mais on l’ignore. Il existe derrière chaque situation une règle de droit qui l’organise, dont l’existence par définition ne se révèlera pas sans que l’on ne lui demande d’apparaitre. De façon imaginée, l’organisation des relations humaines est semblable au mécanisme d’une montre de grande complication dont la perfection est ignorée tant que le boitier qui l’abrite n’a pas été ouvert.

Les événements de printemps 2015 opposant les taxis aux VTC nous ont montré que le geste anodin de héler un véhicule ressemblant à un taxi, rendant les mêmes services qu’un taxi, circulant sur les mêmes voies, pouvait faire l’objet d’une définition juridique soumise à des interprétations.

Le point d’achoppement de ce conflit est la notion de concurrence.

Le mécanisme qui, sur un marché déterminé, permet « la formation des prix par le simple jeu de l’offre et de la demande émanant de vendeurs isolés les uns des autres »1, n’est-ce pas cela la concurrence ? En tant que telle, elle est légale et économiquement vertueuse.

Mais ce que cette définition ne fait pas apparaître est la notion de rivalité entre les entreprises ou les personnes offrant le même service. Cette rivalité non plus n’est pas illicite. Il faut ajouter que la liberté de commerce et de l’industrie protège « le droit d’offrir à sa clientèle des prestations identiques à celles d’un concurrent »2. Mieux, elle est encouragée, puisqu’elle offre les mêmes garanties que le mécanisme de concurrence exposé plus haut.

Pour comprendre les origines de ce litige, il est nécessaire de définir précisément l’activité de taxi (I), ce qui permettra de comprendre pourquoi ils ont tant défendu leur monopole (II). Il conviendra enfin d’établir le caractère indu de leur revendication (III).

 

Définition de l’activité de taxi

Les chauffeurs de taxi et les VTC offrent un service si proche qu’il est difficile de différencier l’activité de l’un de celle de l’autre. Elles ont néanmoins été visées par le législateur.

Un taxi est défini par la loi du 20 janvier 1995 comme un véhicule automobile « de neuf places assises au plus, y compris celle du chauffeur, muni d’équipements spéciaux3, dont le propriétaire ou l’exploitant est titulaire d’une autorisation de stationnement sur la voie publique en attente de la clientèle afin d’effectuer à la demande de celle-ci et à titre onéreux le transport particulier des personnes et de leurs bagages4 ».

L’activité de VTC obéit à la logique suivante : des entreprises « mettent à la disposition de leur clientèle une ou plusieurs voitures de transport avec chauffeur, dans des conditions fixées à l’avance entre les parties. Ces entreprises sont soit des exploitants de voitures de transport avec chauffeur, soit des intermédiaires qui mettent en relation des exploitants et des clients »5.

Ces deux activités obéissent toutes deux à une même logique : une logique commerciale basée sur un service de transport. Et l’on éprouve des difficultés à déceler une quelconque pratique des VTC en contradiction avec le droit de la concurrence. Mais alors, comment expliquer les graves incidents survenus à Paris au printemps 2015 ?

La raison est simple. Les taxis disposent d’une situation particulière : ils ont une autorisation de stationner qui constitue un véritable monopole. À ce titre, lorsque les VTC prennent ou sont accusés de prendre des piétons sur la voie publique, ils exercent la même activité que des taxis. Cette manière de procéder a entraîné la colère des chauffeurs de taxis qui ont souhaité défendre leur monopole.

 

La défense du monopole des taxis : discussion autour de la concurrence déloyale des VTC

Il convient de souligner que la concurrence déloyale n’existe pas en tant que telle, et repose sur un ensemble de conditions cumulatives. Parmi ces conditions, on peut citer le dénigrement, l’imitation et la confusion, le parasitisme, et la désorganisation économique. Cette désorganisation économique se manifeste par l’exercice d’une activité professionnelle nécessitant un agrément administratif, sans l’obtention de cet agrément.

Le cœur du litige entre les taxis et les VTC repose en réalité sur l’autorisation de stationner, celle-ci permettant aux taxis de prendre en pleine circulation un piéton qui les aurait hélé. Cette liberté est prise par les VTC qui n’ont pas l’autorisation de stationner.

On appelle cela le maraudage. Cette autorisation, qui s’inscrit dans le régime juridique de l’autorisation d’occupation temporaire du domaine public, n’est pas délivrée aux VTC.

En revanche, les VTC n’ont pas l’interdiction de pratiquer le maraudage électronique comme l’a souligné le Conseil constitutionnel à l’occasion d’une décision de 2015, lorsqu’il fût saisi de trois questions prioritaires de constitutionnalité posées par les sociétés UBER France SAS et UBER BV6.

En pratiquant le maraudage non-électronique, c’est à dire un maraudage directement sur la voie, les VTC se prêtent à la pratique de désorganisation du marché. Elle consiste, pour une entreprise, à se procurer un avantage par rapport à ses concurrents en utilisant des méthodes illégales de vente ou de travail.

Il convient de s’arrêter un instant sur une distinction essentielle afin de ne pas fausser le débat. On a beaucoup entendu parler de la société Uber et du service proposé par celle-ci, via une application internet UberPOP, qui propose un service de transport en voiture dont le conducteur est un simple particulier, seulement inscrit auprès d’Uber. Il ne sera question ici que de la distinction entre les taxis et les VTC. Par ailleurs, le sort du service UberPOP semble être scellé puisqu’aujourd’hui il a fait l’objet d’une décision du Conseil constitutionnel le censurant7.

Revenons au clivage Taxis/VTC. Le VTC qui stationnerait aux abords d’une gare ou d’un centre-ville dans l’attente d’éventuels clients se livre à un acte de concurrence déloyale, puisque seuls les artisans taxis sont autorisés à le faire, au titre de leur autorisation de stationnement, comme le rappelle la jurisprudence8. En 2014, la loi Thevenoud confirme encore cette situation en réaffirmant que le maraudage est l’apanage des taxis9.

Le lecteur s’étonnera certainement qu’une simple formalité administrative soit au centre d’un litige qui a agité la France entière. Si les taxis dissimulent assez difficilement leur peur de perdre le monopole du maraudage, une solution simple serait d’interdire l’activité des VTC, ou alors de lever l’obligation de posséder une autorisation de stationner pour les taxis. En effet, les chauffeurs de taxi ont invoqué le prix exorbitant de l’autorisation de stationner dont ils ont dû s’acquitter pour exercer leur profession.

L’argument est-il recevable ? D’un point de vue économique, on peut comprendre leur attachement à faire respecter les restrictions d’exercice auxquelles les VTC sont soumis, en raison du prix que la possibilité de marauder leur a coûté.

Plusieurs précisions doivent être données :

En premier lieu, il convient de se détacher quelque peu du débat opposant taxis et VTC pour se concentrer sur l’obligation faite aux taxis de détenir une autorisation de stationnement pour pratiquer leur activité. La légitimité de cette contrainte nous parait ne faire aucun doute compte tenu des règles de la domanialité publique.

Les chauffeurs de taxis peuvent apparaître, au premier abord, comme de simples administrés mettant en œuvre leur liberté d’aller et venir et leur droit d’usage du domaine public routier, libre et commun à tous. Cependant, deux séries d’objections doivent être relevées.

La première concerne la nécessité d’un encadrement de la liberté d’aller et venir des taxis dans le cadre de leur utilisation du domaine. La seconde tient à l’objectif de l’utilisation des voies publiques par les artisans chauffeurs.

Le domaine public routier est affecté à l’usage direct du public. Plus précisément, les voies publiques sont destinées à la circulation publique, collective et anonyme10. Elles permettent la mise en œuvre de la liberté de circulation, qui s’inscrit dans le cadre plus général de la liberté fondamentale d’aller et venir11.

Ainsi, tant que les taxis circulent, se déplacent sur ces voies publiques, il n’y a aucune difficulté pour reconnaître qu’ils effectuent une utilisation du domaine public routier conforme à son affectation. Ils sont naturellement soumis aux diverses règlementations par lesquelles la puissance publique met en œuvre son pouvoir de police pour encadrer la circulation, le caractère fondamental de la liberté d’aller et venir n’empêchant aucunement que lui soit apporté un encadrement pour des raisons légitimes de préservation de cette liberté et de sécurité publique12. Mais ils ne font alors l’objet d’aucune mesure qui leur soit spécifique.

Les voies publiques sont également le siège de l’exercice de la liberté de stationnement, accessoire naturel et indispensable de la liberté de circulation13. Sans qu’il soit besoin de revenir sur le débat relatif au stationnement et à l’usage normal ou anormal des voies publiques qu’il suscite14, retenons simplement que, dès lors que les besoins de l’activité des artisans chauffeurs nécessitent des arrêts et des stationnements spécifiques, les distinguant des usagers traditionnels, la conformité de l’usage du domaine par rapport à son affectation se délite pour se muer en simple compatibilité15.

Les taxis sont alors soumis à deux séries de réglementations.

D’une part, ils font l’objet des règles encadrant le stationnement qui sont applicables à tous pour des raisons de sécurité publique et en vue de ne pas entraver l’usage primordial des voies publiques.

D’autre part, la spécificité de leur utilisation du domaine public routier suscite des règles qui leur sont réservées.

En effet, leur activité requiert des arrêts et stationnements fréquents et parfois prolongés voire en dehors des espaces réservés au stationnement pour les besoins du maraudage. Elle les distingue des autres usagers et les conduit à excéder le droit d’usage du domaine public appartenant à tous. Ils doivent donc être soumis à un encadrement particulier16.

Cet encadrement se manifeste par l’obligation faite aux artisans chauffeurs d’obtenir une autorisation de stationnement17. Celle-ci permet à la puissance publique de leur imposer des modalités de stationnement tenant compte de la spécificité de leur usage du domaine public dans le cadre de leur activité.

Par ailleurs, la nature même de cette activité suffit à distinguer le chauffeur de taxi du simple quidam faisant un usage commun des voies de circulation. L’usage réalisé par le taxi est directement motivé par un but commercial. Or, le domaine public n’a pas pour vocation première de servir de siège à une activité privée source de profits. La rupture d’égalité entre le chauffeur de taxi, effectuant une utilisation directement rémunératrice des voies publiques et considérée comme privative, et le quidam, se contentant d’y circuler et/ou d’y stationner dans des conditions normales, communes à tous, est alors évidente.

Le maintien d’un juste équilibre entre ces deux catégories d’administrés légitime alors l’encadrement particulier imposé au taxi. Le système d’autorisation de stationnement permet ainsi à la puissance publique d’à la fois maintenir l’ordre public sur les dépendances domaniales dont elle doit assurer la gestion et d’encadrer les avantages exorbitants que certains utilisateurs peuvent en retirer. Sa légitimité ne fait donc aucun doute.

En second lieu, rappelons que l’autorisation de stationnement est traditionnellement délivrée gratuitement. Cette affirmation est étonnante puisque l’on a pris l’habitude d’entendre qu’une licence de taxi – dénomination courante de l’autorisation de stationnement – pouvait atteindre 200 000 euros à Paris et 450 000 euros dans le Sud de la France.

Ces prix exorbitants répondent toutefois au marché de l’offre et de la demande puisque les chauffeurs de taxis sont très peu nombreux, relativement à d’autres villes de plus grande taille : « Pour 1000 habitants, il n’y en a que 3 à Paris, 9 à Londres et 12 à New-York, soit quatre fois plus qu’à Paris »18.

Cependant, rappelons qu’il existe deux moyens de se procurer une autorisation de stationnement. Dans un des deux cas, il est délivré à titre gratuit, et est accessoirement cessible. Cette particularité heurte de façon directe le droit du domaine public et les bases du droit du patrimoine, ce qui pose la question du caractère indu de leur revendication.

 

Le caractère indu de leur revendication

L’autorisation de stationnement peut être obtenue gratuitement auprès de la mairie de la commune où l’activité sera exercée. Après s’être vu délivrer un certificat de capacité et une carte professionnelle19, les artisans chauffeurs en devenir doivent s’inscrire sur une liste d’attente en vue de la délivrance de l’autorisation de stationnement. Mais le délai d’attente peut être décourageant, et leur nombre d’autorisations délivrées faible, d’autant plus que l’administration entretient cette rareté au nom du numerus clausus lui permettant de limiter le nombre de taxi.

Il est alors possible d’acquérir une autorisation de stationnement auprès d’un chauffeur de taxi en possédant déjà une. Précisons que depuis octobre 201420, les licences seront dorénavant incessibles.
Cette innovation paraît parfaitement légitime puisque, convient-il de le rappeler, les autorisations d’occupation du domaine public sont strictement personnelles21, mais surtout incessibles22.

L’autorisation de stationnement délivrée aux taxis constitue une autorisation d’occupation temporaire du domaine public routier. Elle s’insère dans la catégorie des actes administratifs unilatéraux à caractère individuel créant des droits personnels23. Elle devrait de ce fait présenter divers caractères spécifiques.

Une autorisation d’occupation temporaire délivrée par acte administratif individuel revêt traditionnellement un caractère personnel et inaliénable. Le régime dérogatoire de la domanialité publique soumet les biens incorporés au domaine public au principe d’inaliénabilité. Si la loi demeure muette à ce sujet, il est de jurisprudence constante qu’une autorisation d’occupation du domaine public est marquée par une dimension intuitu personae et présente un caractère strictement personnel qui la rend incessible24.

En effet, le but du principe d’inaliénabilité est d’assurer la protection de l’affectation au service public des dépendances domaniales en maintenant ces dernières hors du commerce. Cette protection, si elle ne s’oppose pas à ce que des personnes privées non propriétaires utilisent ou occupent privativement ces dépendances, exige que les personnes publiques propriétaires exercent un contrôle renforcé des conditions de l’occupation.

Le choix de l’occupant, en fonction de ses caractéristiques et des modalités de son occupation, constitue un élément clef de ce contrôle. Sa mise en œuvre est garantie par l’incessibilité des autorisations d’occupation temporaire strictement personnelles. De plus, le principe d’inaliénabilité du domaine public prohibe le consentement de droits perpétuels à des tiers non propriétaires. Le caractère personnel et incessible des autorisations d’occupation temporaire s’inscrit dans la lignée de cette interdiction en s’opposant à la transmission infinie, de mains en mains, du bénéfice d’une telle autorisation. Donc, les autorisations d’occupation du domaine public sont intransmissibles, qui plus est si elles sont délivrées par le biais d’actes administratifs à caractère individuel intrinsèquement empreints d’intuitu personae.

Les chauffeurs de taxis jouissent donc d’un droit totalement dérogatoire, et d’une situation quasiment monopolistique, puisque la règle de l’incessibilité est spécialement écartée par la loi pour les exploitants de taxis ayant obtenu une autorisation de stationnement avant la promulgation de la loi du 1er octobre 2014. Cette loi a, au premier abord, tenté d’atténuer le caractère exceptionnel de la situation juridique des artisans chauffeur en venant limiter la cessibilité de leurs autorisations de stationnement. Elle affirme expressément le principe selon lequel ces autorisations de stationnements sont incessibles – et qui plus est limitées dans le temps avec une durée de validité fixée à cinq ans éventuellement renouvelables. Mais, très rapidement, elle apporte un certain nombre d’exceptions venant largement relativiser ce principe. Au titre de la non rétroactivité des dispositions législatives, le texte maintient la situation des chauffeurs de taxis bénéficiant d’autorisations de stationnement avant le 1er octobre 2014.

Ces derniers conservent ainsi le droit de céder leurs licences25. Logiquement, la même cristallisation a été introduite – certes a posteriori par la loi du 6 août 201526 – pour les autorisations détenues avant le 1er octobre 2014 par des entreprises de taxis en cas de cessation d’activité totale ou partielle, de fusion avec une entreprise analogue ou de scission. Cependant, aucune condition de date de délivrance n’est évoquée concernant les situations de sauvegarde ou de redressement judiciaire, d’annulation du permis de conduire ou de décès du titulaire. La cessibilité de l’autorisation de stationnement semble ainsi maintenue dans ces derniers cas, peu importe que la licence ait été obtenue avant ou après l’entrée en vigueur de la loi du 1er octobre 2014.

L’autorisation de stationnement conserve donc largement son régime dérogatoire ainsi que sa « valeur patrimoniale »27 et s’inscrit parfaitement dans la tendance croissante à la patrimonialisation des autorisations administratives28.

On peut aisément comprendre que les chauffeurs de taxis aient vu d’un mauvais œil l’arrivée des VTC sur le marché du transport de personnes : leur patrimoine se verra diminué par la perte importante de valeur vénale de leur licence, parfois obtenue gratuitement, parfois chèrement payée, du fait de la concurrence suscitée par les VTC.

Du point de vue du client, la situation est tout autre. Tant que les sites de réservation de véhicules existeront et que les VTC accepteront, même illégalement, de prendre en course un piéton qui les aura hélé, le client, en ce qu’il est totalement étranger à ce conflit, n’aura pas d’autre préoccupation que celui d’être emmené à destination.

En cas de contrôle par des agents de police du caractère licite de la présence d’un véhicule professionnel du transport de personnes sur la voie publique, il est à priori exclu que le client soit inquiété du caractère clandestin de l’activité du chauffeur dans le véhicule où il est monté. Sa défense est fort simple : elle repose sur la théorie de l’apparence et de la présomption de bonne foi du chauffeur du véhicule.

Que faut-il penser de ces événements ?

On a vu que derrière les violents conflits ayant opposé les taxis aux VTC, se cache en réalité la régularité de l’usage du maraudage et du maraudage électronique en particulier, les tribunaux ont été en réalité saisis d’une question habituelle de droit de la concurrence.

Mais voyons au delà des faits de l’espèce. Il existe une nouvelle tendance en France, une volonté de « se passer des intermédiaires, échanger entre particuliers, éviter les acteurs traditionnels »29. On parle aussi d’une Uberisationde la société. Ce modèle collaboratif, semble combler de satisfaction les Français, et touche tous les secteurs de l’économie du tertiaire30.

Il y a donc fort à parier que cette jurisprudence Uber ne soit pas un cas isolé, mais le début d’une longue série à venir de jurisprudences de même nature. Mais le combat est perdu d’avance pour ceux qui imaginent pouvoir empêcher les chauffeurs d’Uber d’utiliser leur smartphone pour localiser des clients et se localiser eux-mêmes. Aux taxis traditionnels de les imiter pour le plus grand service des clients !

Au demeurant, pour éviter des litiges sans fin entre taxis et VTC, il vaudrait mieux mettre de l’ordre dans le droit applicable. Une réforme utile pourrait consister à demander à tous ceux qui font de la maraude une redevance annuelle, raisonnable, pour utilisation particulière de la voie publique (une centaine d’euros par mois ?). Le cas échéant, la redevance serait supérieure quand le véhicule pourrait utiliser par ailleurs les voies réservées et les arrêts taxis. Les taxis justifiant de l’acquisition de leur licence seraient exonérés de cette ou ces redevances pendant 20 ans. Les autres et les VTC y seraient assujettis. La paix serait rétablie ainsi que la liberté et un meilleur service des clients.

Sur le web

Lire sur Contrepoints notre dossier droit et justice

  1. Lamy Droit économique, concurrence distribution concurrence, éd. 2014, Lamy, §782.
  2. V° en ce sens, CA Versailles, 12e ch., 14 septembre 2006, Dict. perm. droit des affaires, étude 676, p.5544.
  3. L. no 2014-1104 du 1er oct. 2014, art. 2.
  4. Dalloz Actualité, Chap.2, folio n°2263- Police des véhicules sur la voie publique. Pierre BON, juin 2005.
  5. L. no 2014-1104 du 1er oct. 2014, art. 9.
  6. Conseil constitutionnel, 22 mai 2015, n° 2015-468/469/472-QPC.
  7. Décision n° 2015-484 QPC du 22 septembre 2015 – Société UBER France SAS et autre (II) [Incrimination de la mise en relation de clients avec des conducteurs non professionnels.
  8. Voir par exemple : Cour d’appel de Nîmes, 1ère ch. B, 19 avril 2011.
  9. Art.10, LOI n° 2014-1104 du 1er octobre 2014 relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur.
  10. LAVROFF Dmitri Georges, « Domaine des collectivités locales – Règles communes (Distinction du domaine public et du domaine privé) », Répertoire de droit immobilier, septembre 2007, § 79.
  11. Conseil constitutionnel, n°79-107 DC, 12 juillet 1979 (Rec., p. 31).
  12. L’exemple le plus célèbre est évidemment celui du Code de la route.
  13. WALINE Marcel, note sous Conseil d’État, 18 mai 1928, Laurens : D., 1928, 3, p. 65, « On ne circule pas pour circuler mais pour arriver et s’arrêter. »
  14. Conseil d’État, 18 mai 1928, Laurens, Lebon, p. 645.
  15. MELLERAY Fabrice, « L’utilisation privative du domaine public – De quelques difficultés illustrées par la jurisprudence récente », AJDA, 2013, p. 992.
  16. CE, 17 janvier 1986, Mansuy ; CE, Section, 20 octobre 1933, Vavasseur, Sirey, 1934. III. 61.
  17. Code général de la propriété des personnes publiques, article L. 2122-1.
  18. DARBERA Richard, « Rapport Attali : les craintes des taxis étaient-elles fondées ? » Transports, Editions techniques et ́économiques, 2008, pp. 86-91.
  19. Code des transports, articles L.3121-9 et L.3121-10.
  20. Loi n° 2014-1104 du 1er octobre 2014 relative aux taxis et aux voitures de transport avec chauffeur, JORF n°0228, 2 octobre 2014, p. 15938, texte n°1, article 6.
  21. CE 21 novembre 1969, Sieurs André et Manuel Koeberlin, AJDA 1970, p. 160, note P. Godfrin.
  22. CE 20 mars 1996, M. Veber, req. n° 121601
  23. CE 14 juin 1972, Elkoubi, Lebon 437 ; 18 déc. 1985, Legendre, Juris-Data no 1985-643002.
  24. Conseil d’État, n°73146, 10 mai 1989, Munoz, La Semaine Juridique édition générale, 1989, n°24, IV, p. 216 ; Conseil d’État, n°171317, 6 novembre 1998, Association amicale des bouquinistes des quais de Paris, Recueil Lebon, Tables, 1998, p. 753.
  25. Code des transports, article L.3121-2.
  26. Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, JORF, n°0181, 7 août 2015, p. 13537, article 19.
  27. Cass. première civ. 27 décembre 1963, Dame veuve Alfred Valenti c/ Sieur Marcel Valenti, AJDA 1964, II, p. 240 et 241, note H. L.
  28. BRENET François, « La patrimonialisation des autorisations administratives – Réalités et implications », Droit Administratif, n° 8, Août 2007, étude 14.
  29. http://www.challenges.fr/challenges-soir/20150707.CHA7686/uberisation-la-nouvelle-revolution-francaise.html
  30. Les pratiques de consommation collaborative sont en hausse entre 2013 et 2014. Par exemple parmi les livres acquis depuis 6 mois, 22 % ont été achetés d’occasion en 2014 contre seulement 15 % en 2013, 3 % ont été loués et 23 % empruntés. Seulement la moitié des livres acquis en 2014 ont été achetés neufs. Les marchés de l’occasion se développent depuis le début de la crise. Selon les enquêtes Budget des familles de l’INSEE, la part de produits électroménagers achetés d’occasion est passée de 2,8 % à 5,5 % entre 2006 et 2011, celle de meubles de 8,2 % à 10,1 %, celle des produits audiovisuels de 3,2 % à 4,5 %, celle des produits de jardinage-bricolage de 3,3 % à 4,4 %. CREDOC, les cahiers de la consommation, Communiqué de presse du 14 novembre 2014.
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