Charité bien ordonnée commence par l’État

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Charité bien ordonnée commence par l’État

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 5 février 2016
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Il y a des petites musiques qui se répètent inlassablement et forment le fond sonore d’une époque. Celles de la période actuelle ne sont pas toujours agréables, notamment lorsqu’elles concernent la charité.

Il y a quelques années, le murmure de ces musiques était faible, à peine audible pour tout dire. Du tintamarre produit par toute la troupe bigarrée des personnes conscientisée du Camp du Bien et qui a toujours consisté à radoter sans fin que seule une ferme solidarité étatique permettait de couvrir tous les cas et tous les besoins, la petite musique de la charité, du don ou des actes bénévoles se détachait difficilement, mais restait néanmoins perceptible pour ceux qui voulaient l’entendre ou qui se tenaient sagement à l’écart du bruit des furies collectivistes.

Cependant, en l’espace de quelques années, non seulement il devient plus difficile d’entendre le petit bruit frêle de cette charité inter-individuelle directement organisée par la société civile, mais en plus, on peut maintenant constater des efforts conscients et quasiment systématiques pour l’étouffer complètement.

En 2014, je relatais ainsi les péripéties de Devaud, une entreprises de fruits et légumes, qui se retrouvait en délicatesse avec le fisc pour avoir osé faire don de ses invendus et des fruits et légumes défraîchis, et avoir ainsi réduit d’autant son chiffre d’affaire et, conséquemment, ses impôts, ce qui constitue une faute de goût impardonnable au pays luxuriant de la solidarité organisée, on en conviendra aisément.

filoche alors là ça va ch

En septembre dernier, je notais, assez effaré, que l’apparition d’une gestion décentralisée (et numérique, de surcroît) de l’accueil des réfugiés provoquait l’agacement des associations officielles et dûment estampillées par le pouvoir républicain, laïc, démocratique, citoyen et festif. Si les gens commencent à s’organiser sans eux, où va le monde, où va le monde !?

filoche m'enfin

Dans la foulée, je constatais aussi qu’en plus des associations agacées par ces organisations spontanées de la société civile hors des sentiers battus de la solidarité officiellement aménagée, l’administration y allait de ses petites (ex)actions pour mettre, elle aussi, des bâtons dans les roues des dons et autres actes bénévoles : on apprenait ainsi que la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes — sans qui le consommateur français, ruminant paisible mais très influençable, serait déjà mort douze fois d’intoxications, de concurrence déloyale et de fraudes diverses — cherchait des poux chez la start-up française Booxup, spécialisée dans l’échange gratuit de livres.

c'est français c'est la police française

Bref, le message de l’administration, du fisc et des associations diverses reconnues officiellement est assez clair : charité bien ordonnée commence par l’État, et puis c’est tout.

Dans ce contexte, les misères qui dégringolent sur Jean-Marc Lucien n’ont plus rien d’invraisemblables.

M. Lucien est propriétaire d’une maison d’accueil de pèlerins à Saint-Privat-d’Allier, sur le chemin du pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle. En juin 2015, il est convoqué par les gendarmes tandis que les lits de sa maison sont mis sous scellées après une perquisition. En novembre, il est convoqué au tribunal : on lui reproche d’avoir dissimulé une activité commerciale et un chiffre d’affaires.

oooh filocheHorreur : l’accueil en donativo, c’est-à-dire avec la libre participation aux frais, n’est pas soumis aux impôts et autre taxe de séjour, et — catastrophe insoutenable au pays de la norme — n’a pas de statut juridique.

Pire encore (si, si, c’est possible), le nombre de pèlerins de passage dans la maison d’accueil des Lucien (entre 700 et 800 à l’année) représente vite une concurrence directe pour les gîtes, hôtels et autres chambres d’hôtes (payants, eux) du même secteur. Nous sommes en France, patrie des Droits de l’Homme, et peut-être aussi de la Jalousie et de la Délation. M. Lucien explique alors :

« Nous avons reçu de nombreuses menaces dès le départ. Sous la pression, je suis devenu auto-entrepreneur en 2014. Je déduisais le prix des repas à ce que me laissaient les gens et je déclarais le reste. En avril 2014, nous avons reçu une plainte de la communauté d’agglomération du Puy puis en septembre la Répression des fraudes a dressé un procès-verbal. Elle souhaitait que nous affichions un tarif, ce que nous avons refusé de faire puisque nous n’étions pas commerçants ! »

oh filocheAh mais saperlipopette, si maintenant des individus commencent à s’aider les uns les autres pour des prix minimums, sans rechercher le profit ou le simple commerce, mais où va-t-on ? Si on ne met pas un terme immédiatement à ces pratiques bénévoles et désintéressées, la société va très clairement souffrir ! Et puis après tout, merde à la fin, nous sommes dans un gouvernement socialiste, sous une administration pétrie de collectivisme et de socialisme, et dès lors, un exemple doit être fait pour repousser cette charité immonde loin des portes du territoire français, nomého à la fin !

Heureusement, le fisc, la Répression des Fraudes (car fraude il y a, c’est évident !) et les petits copains de Gérard l’Inspection du Travail (car travail il y a, c’est évident !) interviennent pour un monde meilleur fait de vraie solidarité, la seule qui vaille, celle sanctionnée par l’État, tamponnée par l’administration, enregistrée par de beaux cerfas bien propres.

Et sous les assauts de nos preux chevaliers de la Solidarité Officielle, les délinquants ont plié. Après dix années au service des pèlerins, après une décennie de charité, de fraternité et après avoir probablement bien trop tissé de liens sociaux pour être totalement innocents, les époux ont décidé de laisser tomber cette si coûteuse charité, et de vendre leur maison. Il faudra bien payer le procès, ainsi que les amendes que ne manqueront pas d’infliger nos grandes et belles administrations dans leur lutte pour un monde plus chaleureux à base de cerfas correctement remplis (le rose, en deux exemplaires, pour votre ration de lien social, et le bleu, pour les autorisations règlementaires d’exercice de solidarité, en trois exemplaires avec les justificatifs décrits au paragraphe 7b correctement agrafés au dos, merci).

Décidément, la petite musique de la charité spontanée est en train de s’arrêter en France, mais, vu comme ça, le socialisme, ça vous a un petit côté magique vraiment délicieux !

socialisme magique
—-
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  • Merci pour l’article, pertinent comme presque toujours.
    Un autre exemple: en Belgique, certains proposent de légiférer pour permettre à des employés de donner leurs congés à des collègues qui en ont besoin (enfant gravement malade, etc.). On peut discuter de l’opportunité de la mesure, mais il est fascinant de voir que les syndicats sont contre une mesure apparemment favorable à ceux qu’ils devraient défendre, et encore plus fascinant de voir pourquoi: parce qu’ils craignent que ce genre de solidarité mette à mal la « solidarité » imposée par l’Etat. Car pour eux, seul l’Etat peut être généreux (avec votre argent). Ou comment pervertir les notions de solidarité, de générosité ou de charité tout en donnant des leçons de morale…
    Au-delà de la question morale, il est pourtant évident que la solidarité interindividuelle sera toujours plus efficace que la redistribution imposée d’en haut, pour la même raison que le libre-échange est plus efficace que l’économie planifiée. Mais bon…

    • Il y a une très bonne raison (de leur point de vue) pour laquelle les syndicats sont contre.
      Les congés sont pour eux un droit et une obligation de les prendre. Avant qu’il y ait les compte épargne temps (CET) il était très difficile de se les faire payer sauf à démissionner. Avec le CET c’est un peu mieux mais ils sont toujours contre le fait qu’on puisse y mettre les RTT.
      Alors, pouvoir les donner ces CP ça va à l’encontre de leur logiciel et ça devient une brèche ouverte dans leur système de pensée qui est : le travail ça fatigue et le repos est obligatoire; Dès lors si on peut donner ses congés ça veut dire que les 35h sont inutiles puisque ça valide qu’on peut travailler plus.

    • @Bruno: vous avez parfaitement raison. Et il faut que l’ingerence de l’etat dans la sphere strictement privee s’arrete et que l’etat retourne a ses vraies casseroles (sans faire de mauvais jeux-demotte): les infrastructures, la police et la justice (qui ont le culot de nous dire qu’ils n’ont pas assez de moyens) et l’armee. Le reste (enseignement, retraites, securite sociale), on s’en charge nous-meme et beaucoup mieux suivant le principe de subsidiarite a l’endroit. Etat-PS, tu es vire et c’est pas pour te remplacer par des MR (pseudo-liberaux) ou des fachos genre NVA, VLD, CD&V, CDHalal, Ecolo-Groen, (Mort) Vivant, etc.). L’etat doit etre severement limite sous peine d’empoisonnement de la « societe civile ». Prenez les regions de la « grrraaaande demokrrrassie de proximite ». Elles ne servent strictement a rien pour le citoyen, surtout en Walbanie. 80% des lois sont faites par l’Europe. Les multiples parlements se contentent juste de les transposer dans le droit national, regional et sous-regional jusque dans votre cave, voire jusqu’a dans votre pantalon. Le reste du temps de nos « elites » regionales est consacre aux restos et aux officiels et beaux voyages d’etudes dans le Nouveau Monde qui est aussi le meilleur, mais qu’on se garde bien de prendre en exemple. Quant aux retraites, il faut mettre fin a la grande pyramide de Ponzi que nos pharaons socialistes ont mis en place après la guerre. Pour la secu, une assurance genre assurance-auto suffira, la medecine etant un business lucratif comme les autres (parlez-en a m’sieur le docteur). Enfn, un controle tres strict des revenus (plutot occultes et souvent abracadabrants) des associations dite « syndicales » (pour ne pas dire « de malfaiteurs »). Pourquoi abracadabrants? Parce que la Belgique est le seul pays ou les syndicats recoivent une prime par chomeur indemnise. Comment ce pays peut-il alors tourner sainement? Il faudrait aussi en arriver petit a petit a la fin du salariat, d’une simplification du Code du Travail et d’une reduction massive des impots avec degraissage de la 60% fonction publique (qui ne fonctionne pas fort mais ponctionne a mort) et le renvoi des migrants chez eux, quitte a tirer a vue. Ce sera tout…pour le moment. J’ai pas l’air, mais je suis en fait tres serieux.

  • le ps , un parti ,gangréné qui vous donne envie de tout envoyer bouillir et quitter le pays ; et ça c’est pas de la magie , c’est une réalité ; même plus envie de bosser ;

  • Il y avait eu aussi le coup de la fête du village avec des bénévoles, malheureux travailleurs non déclarés donc exploités (probablement contre leur gré) en réalité, que vous aviez relaté également, quelle tristesse…
    Ne devrait-on pas encourager les enfants forcés de mettre le couvert, nettoyer leur chambre et garder leurs petits frères à dénoncer leurs parents esclavagistes qui, non contents d’encourager le travail au noir, font travailler des mineurs!

    • Et que dire du bebe esclavagiste qui se fait langer par ses parents! Il doit payer des cotisations patronales. Pour etre gentil, on tient le compte et on lui fait credit jusqu’a ses 18 ans.

  • A l’auteur H16 : j’espère que vous êtes en règle avec l’administration, c’est à dire que vous vous conformez avec le code du travail en n’écrivant pas la nuit (respect du repos quotidien, tout ça tout ça) déclarez votre prose (qui constitue un travail, qui plus est non dissimulé) au fisc et versez bien vos diverses cotisations à qui de droit ? Non mais ! Manquerait plus que vous vous croyiez bénévole !! Et puis quoi encore ?

  • Il y a du Philippe Muray chez H16 .

    • Philippe Muray n’était pas libéral, c’était un homme libre; Il dévoile avec un style que j’apprécie le camp du bien et de la « bienpensance », et appuie là ou ça fait mal sur nos petit (ou gros) travers .

  • la pétition des marchants de chandelle, encore et encore…

  • Il n’y a pas de différence entre communisme et socialisme, si ce n’est dans la façon d’atteindre le même but ultime : le communisme propose l’esclavage par la force, le socialisme par le vote. La différence est la même qu’entre le meurtre et le suicide.

    Ayn Rand

  • La charité pour l’Etat. Et avant de redistribuer, il s’en est mis plein les poches au fur et à mesure des étapes du haut vers le bas avant la redistribution.
    Y en a quand même qui ont pas honte d’aller faire chier des gens pour des broutilles, et d’autres qui n’ont pas de malaise à aller les verbaliser et les poursuivre.

  • bah , le bénévolat est une concurrence déloyale capable de miner un PIB et il empêche un état de s’endetter..cette personne devrait être déchue de sa nationalité pour terrorisme économique !

    • oui ceci a été estimé :

      les activités bénévoles exercées au sein d’une association ou d’un syndicat : visites à domicile, conseils juridiques, accompagnement scolaire, informatique… La valeur du bénévolat associatif pourrait représenter entre 0,9% et 1,9% du PIB

      mais le bénévolat n’est que la partie visible de l’iceberg, cf la suite :

      les activités domestiques : cuisiner, jardiner, s’occuper des enfants… Si ces activités étaient rémunérées, elles seraient comptabilisées dans le calcul du PIB. L’INSEE évalue le travail domestique effectué en France à 60 milliards d’heures de travail par an et à 33 % du PIB.

  • Les socialistes sont des voleurs. Rien de nouveau sous le soleil.

  • Ce n’est pas de l’application des regles dont il faut se gausser… Mais de leur existence.

    Je m’étonne tous les jours que les bibliothèques soient encore autorisées, malgré le manque à gagner pour les ayants droits, les héritiers des ayants droits, et le manque à gagner du fisc sur la TVA non perçu et qui devrait être reclamé à tout emprunteur.

    Je m’étonne qu’il soit encore autorisé d’héberger des amis de passage, concurrence déloyale aux hôtels si glauques, d’aller chercher un voisin à l’aéroport, concurrence déloyale aux taxis si désagréables… D’offrir à des mais de diner à la maison, concurrence déloyale aux restaurants
    La liste est longue…
    Notre monde est devenu fou…

    Mais qui voterait pour un programme politique visant à reduire de manière drastique le role de l’état et de la puissance publique, et les aides/subventions clientelistes qui vont avec ?

    Cela tombe bien , car tous les partis français sont 100% étatistes.

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