Qui osera réformer les retraites ?

Aujourd’hui déficitaire de 10 milliards d’euros par an, notre système de retraite n’est pas prêt de devenir excédentaire.

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Qui osera réformer les retraites ?

Publié le 18 février 2016
- A +

Les années passent, les rapports se succèdent, les réformes aussi, critiquées puis adoptées, mais elles restent incapables de répondre aux défis de notre système de retraites. Aujourd’hui déficitaire de 10 milliards d’euros par an, il n’est pas prêt de devenir excédentaire. À moins que…

Par Ambroise Mejean 
Un article de Trop Libre

old couple credits Marcel Oosterwijk (CC BY-SA 2.0)
old couple credits Marcel Oosterwijk (CC BY-SA 2.0)

État des lieux (chiffres 2013)

Efficacité du système

  • La France compte 15,5 millions de retraités dont 54 % de femmes.
  • Le montant mensuel brut moyen (toutes pensions confondues) perçu par les retraités s’élève à 1600 euros par mois ; 1300 euros pour les femmes, 1900 euros pour les hommes.
  • Le taux de remplacement (pourcentage du salaire des cinq dernières années d’activité reçu comme pension) est toujours progressif selon le niveau de revenu mais il est en baisse. 75 % en moyenne pour la génération 1946 contre 80 % pour la génération 1936.
  • Le niveau de vie moyen des retraités est presque égal à celui des actifs (2050 euros par mois et par unité de consommation) mais il est supérieur à celui de l’ensemble de la population (1950euros). En comparaison, les retraités aux États-Unis ont un niveau de vie égal à 92 % de celui de la population, en Allemagne c’est 87 % et en Belgique 77 %.
  • Le taux de pauvreté des retraités est de 9 % contre 14 % pour l’ensemble de la population.
  • 600 000 personnes perçoivent le minimum vieillesse qui est de 630 euros par mois. Mais seulement 50 % des potentiels bénéficiaires le perçoivent.

 

Modalités d’accès principales (à partir de 2017, suite à la réforme de 2010)

  • Âge de l’ouverture des droits : 62 ans
  • Départ à taux plein à 67 ans ou après 43 années de cotisation.
  • Exceptions des différents régimes spéciaux…

 

Financement

  • Coût estimé : 290 milliards
  • Répartition des ressources : 75 % de cotisations (83 % en 2002), 11 % d’impôts, 6 % venant de la CAF (pensions de solidarité), 6 % de recours à la dette et 2 % de prise en charge par l’État (certains régimes spéciaux).
  • Un déficit qui représente 0,5 % du PIB (10 milliards)

 

Osons la réforme : brisons les privilèges et mettons en place un régime viable et vivable

Six milliards par an, c’est le prix à payer pour conserver le régime spécial de la SNCF ! Un avantage qui date de l’époque du charbon et qui dure depuis plus d’un siècle. Si à l’origine le métier de cheminot pouvait justifier ce traitement de faveur, comment expliquer qu’aujourd’hui les employés de ce secteur à travers leurs cotisations retraites n’assument que 37 % de la pension de leurs aînés ? Comment expliquer que des syndicats qui représentent l’intérêt d’une infime minorité de salariés soient en mesure de peser sur tout le système de retraite français ?

En fait, c’est très simple. Aucun politique n’ose réformer le régime de la SNCF ou alors les compensations (primes…) annihilent les efforts financiers consentis dans un premier temps. Alain Juppé, aujourd’hui présenté comme l’homme providentiel, ne semble pas décidé à retenter ce qu’il avait lamentablement raté en 1995. Personne, pas même le FN, n’évoque ce sujet tabou propice à déclencher une grève générale dans les transports.

La SNCF n’est pas la seule concernée.

On peut ajouter le régime spécial des députés, celui des fournisseurs d’énergie et bien d’autres.

On peut aussi critiquer les différences de mode de calcul entre le public et le privé. Comment se fait-il que la pension d’un fonctionnaire soit déterminée sur son salaire des six derniers mois quand celle d’un salarié du privé est calculée en fonction de ses 25 meilleures années. Par ailleurs, le nombre des caisses de retraite différentes (16) permet de caractériser notre régime assez facilement d’usine à gaz.

Et ce n’est pas fini. Le COR (Conseil d’Orientation des Retraites), organisme chargé de prévoir les évolutions de notre régime, semble aussi crédible que les réformes successives.

En témoignent les scénarios irréalistes proposés dans son dernier rapport sur l’équilibre financier du système à l’horizon 2040. Sans aucune justification économique, le COR pose des hypothèses invraisemblables dans sept des huit scénarios testés : un taux de chômage aux alentours de 4,5 % ou de 7 % et une inflation salariale annuelle proche de 1,5 % ou 2 %. Pour rappel, sur les 25 dernières années le taux de chômage n’est descendu qu’une fois à 7 % et l’inflation salariale a très rarement atteint les 1,5%.

Donc contrairement à ce que peuvent affirmer certains responsables politiques, si on prend en compte la qualité des hypothèses du COR, on se rend compte que le retour à l’équilibre financier du régime des retraites relève de l’utopie.

Pourtant notre régime a beaucoup d’avantages. Il est celui qui compte le moins de retraités sous le seuil de pauvreté et en cela il assure à une immense majorité de Français une retraite d’une qualité acceptable. Il serait donc temps de prendre conscience que la première des réformes, avant de reculer l’âge de départ ou d’augmenter les cotisations, doit concerner la suppression de régimes qui coûtent la bagatelle de 8 milliards par an. Elle doit aussi permettre de réduire les frais de gestion administrative du système en harmonisant les modes de calcul et en supprimant des caisses de retraite.

« Le courage consiste à dominer sa peur » disait François Mitterrand, et les gouvernants feraient bien de s’en inspirer face à des syndicats qui ne semblent pas comprendre que leur combat ne fait qu’affaiblir les acquis sociaux de la majorité. L’arme référendaire sur ce sujet serait une réponse parfaite permettant à la fois de voter la loi, de légitimer la réforme et de montrer l’isolement des syndicats. Mais qui osera… ?

Sources : rapports du COR

Un article de Trop Libre en partenariat avec Hémisphère droit

Lire sur Contrepoints notre dossier spécial Retraites

Sur le web

Voir les commentaires (16)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (16)
  • merci pour ces chiffres , indispensables pour comprendre le problème.
    qui osera ? : personne .

  • Je pense tout à fait possible d’engager une réforme globale et structurante.

    La condition de la réussite, c’est qu’elle concerne tous le monde et propose une ambition d’équité.

    La création d’un statut unique de l’actif, avec les mêmes droits et les mêmes devoirs pour tous, qu’ils soient aujourd’hui apprentis, salariés, fonctionnaires, indépendant est le seul axe d’attaque pour mettre en place un financement universelle d’un premier socle de retraite.

    Bien évidement, pour les actifs, certains devraient perdre gros. C’est gérable progressivement, sur 10 ans par exemple pour lisser l’effort.
    Pour les actuels pensionnés, il suffirait de recalculer les pensions sur les m^êtes bases que le calcul d’aujourd’hui, pour baisser mécaniquement de 15 à 20 % le montant des pensions… Je pense que c’est acceptable en l’échange du financement de la dépendance.

    Bien évidement le socle de retraite par répartition ne pourra survivre que sorti de sa gestion par profession, completement désuète aujourdh’ui.
    Avec le contrat unique des actifs, la fin du paritarisme s’impose… Avec une gestion individuelle de la collecte des cotisations. GAINs majeur pour les entreprises.

    • Idée à creuser. Son gros inconvénient est de dire aux retraités qu’ils vont perdre 20% de leurs revenus. Certes la prise en charge de la dépendance compenserait. Mais comme les gens sont incapables de distinguer revenu et niveau de vie, ce sera dur de vendre ce concept politiquement

    • non, moi je veux que ma retraite du privé, pas mirobolante reste, et la SNCF, EDF, députés ministres et tutti quanti paient (alignement), bien avant qu’on me prenne même 1% !!

  • Ce qu’il faut c’est un Ronald Reagan! Souvenez-vous de ce qu’il a fait avec les grévistes du secteur aérien!

    • En 73 (Plan Clément Marot) l’Etat français a voulu jouer les gros bras en remplaçant les contrôleurs aériens civils par les militaires, pas formés à çà (à l’époque). Résultat immédiat : catastrophe de Nantes, et à long terme : statuts des ICNA c’est à dire passage en catégorie A (avec le bac …) , accès à des indices hors-échelle ainsi que retraite à 55 ans.
      Le résultat a donc été totalement opposé à l’objectif initial.
      Quant à l’action de Reagan, elle n’a pas été brillante non plus puisqu’il a fallu réembaucher en catastrophe, sans oublier la perte de savoir-faire …

    • On a essayé en France, ça s’appelait le plan Clément Marot, ça a donné aux contrôleurs aériens l’impunité pour les siècles et les siècles.

  • fondamentalement le système par répartition est déresponsabilisant, donc insauvable.

    • Malheureusement le passage d’un système de répartition à un système de capitalisation nécessite que la transition soit payé par quelqu’un c’est à dire pour ceux qui ont déjà accumulé des années de travail et n’ont pas capitalisé puisque ponctionné pour payer ceux en retraite. Au prorata de tous les retraités et de tous les travailleurs ayant de 1 à 43 années de travail, cela représente un paquet d’année de cotisation à trouver. Seul une révolution permettrait de le faire …. ou la faillite de l’état

      • Le Chili a bien réussi à faire la transition, non ?

        • Le Chili, et beaucoup d’autres pays de la région comme le Pérou.
          12% de votre salaire est prélevé tous les mois, 10% placé a 8 ou 9% d’intérets.
          le systeme privé et public coexsitent, il faut choisir au début de sa carriere. Pour ceux qui ont voulu changer en cours de vie pro, les cotisations ont été reversée.

  • qui osera ?
    Personne parmi la « gente » politique actuelle. Et les « perdants » dans l’affaire le leur rendent bien. Ils sont tous respectueux et soumis. Non pas comme les « gagnants » , ceux qui foutent le bordel partout depuis 40 ans.
    On les connait et inutile de les énumérer, tous plus « spéciaux » que d’autres.
    Il n’y a qu’a voir les parti libéral –> 1%
    Le référendum sur l’aéroport de Nantes –> personne (chacun détient la vérité) .
    Non, non, je pense de plus en plus que ce sont…. les gens (égoïstes et aveugles).

  • C’est désolant de lire que des libéraux se laisse prendre à ce jeu de la grande unification dans un régime unique …
    non, désolé, la solution n’est pas là, elle est juste dans la DIVERSITÉ et la LIBERTÉ.
    Il n’y a aucune raison légitime que tout le monde adhère à un régime unique imposé à tous. Le gigantisme a taille unique ce n’est pas simple (c’est simpliste), et c’est dangereux (tous les Å“ufs dans le même panier ? non merci …) et inefficace ( même si le régime unique a plusieurs gestionnaires possible, la concurrence possible est très limitée). Et ce n’est pas juste non plus : certains sont voué à mourir plus jeunes que les autres, ils le savent, les faire cotiser de force au profit de gens qui ont eu un meilleur tirage génétique ou professionnel c’est inique.

    Alors que faire ?
    Il faut juste supprimer purement et simplement toutes ces c**neries, et tout basculer dans un outil qui existe déjà : les contrats « Madelin ».
    Ceux qui veulent une garantie de l’état n’auront qu’à souscrire des contrats basé en emprunts d’État et audité et garantis par l’État sous sa responsabilité, ce ne sera pas différent en principe du système actuel … mais il sera possible de faire autrement.
    Pour la « solidarité, c’est simple aussi : il existe déjà un minimum vieillesse qui est financé par l’impôt.
    Resterait à gérer la transition, ce qui n’est pas si compliqué : on reprends les cotisations versées, actualisées, et on convertit en obligations d’État versées dans le contrat Madelin sus-mentionné. C’est un boulot classique d’actuaire, qui peut prendre un peu de temps mais ce n’est pas grave, il faut juste que ce travail soit fini au moment où la personne concerné prend sa retraite, on peut donc tout à fait étaler le travail sur 10 ans, ou plus.

    Après, n’est-ce pas, « comme on fait son lit, on se couche ». Celui qui se serait organisé une retraite de misère (par choix, par imprévoyance, ou par malchance) aurait effectivement une retraite de misère (mais il aurait toujours, en sus, le minimum assuré par la « solidarité » payée par l’impôt).

    On a le but, on a le mode d’emploi pour faire…. mais il y a quand même un problème

    Le problème, que le système actuel parvient à esquiver mais que toute remise à plat sérieuse poserait, c’est le monstrueux monceau de « droits » qui a été distribué, sans mettre en face la moindre provision : entre 4 à 8 mille milliards selon les estimations. 2 à 3 fois le PIB annuel, entre 1 et 2 tiers du patrimoine national. Converti en emprunt d’état, la dette publique bondi à 300 ou 500 % du PIB …
    Et bien sûr personne n’est prêt à faire face à cette réalité. Pour y remedier il faudrait d’abord la reconnaitre, et celui qui s’y risquerait serait immédiatement brulé comme porteur du message affreux, ce qui le rendrait inapte à le traiter.

    • C’est juste que les taux ne sont pas encore assez négatifs. Mais rendez-vous compte, à -2%, il suffit d’emprunter le double du PIB pour faire revenir l’équilibre…

      • lol. il fallait y penser.
        Mais le double du PIB, ce n’est pas assez. Ça couvre tout juste le déficit explicite avoué, pas du tout le déficit « hors bilan » qui est deux à quatre fois plus gros …

  • Le système est voué à la destruction. Les français sont forcés de verser une belle part de leurs revenus à des sociétés (privées) au titre de leur retraite (en réalité pour payer celle des autres, en échange d’une promesse que quelqu’un paiera pour eux, et suffisamment, lorsqu’ils seront vieux). Ces sociétés privées sont à leur tour forcées d’acheter des obligations d’état. Cet argent sert à financer des projets sans lendemain. Il a été gaspillé. Il n’existe plus.

    De plus, par définition, l’euro est de la dette: la dette de la BCE garantie par la dette des états. L’euro n’a aucune valeur positive, mais une valeur négative!

    Mieux vaut préparer sa retraite soi-même en achetant de l’or. Des solutions existent: http://global-silver.fr/retraite-or-argent-comment

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Michel Barnier vient d’arriver, et avec tout le brio d’un teckel neurasthénique, il forme son nouveau gouvernement qui saura, on n’en doute pas, relever les défis qui l’attendent. Parmi ceux-là, l’établissement d’un budget vaguement crédible.

Eh oui, il va falloir trouver « un pognon de fou ».

Bien sûr, la voie choisie consistera à augmenter les impôts (parce que, pourquoi pas, après tout, ces cochons de riches – lire « classes moyennes » – pourront bien payer et l’intendance suivra, hein). L’alternative, bien trop libérale au g... Poursuivre la lecture

3
Sauvegarder cet article

Il y a 28 ans, l'ancien ministre du Travail et des Retraites Jose Piñera revenait sur la révolution libérale qu'il avait lancée au Chili en 1980.

Un spectre hante le monde : celui de la faillite du système de retraite de l’État. Le système de retraite par répartition qui règne en suprématie à travers la plus grande partie de ce siècle a un défaut fondamental enraciné dans une fausse conception sur le comportement de l’être humain : il détruit à un niveau individuel le lien essentiel entre l’effort et la récompense. En d’autres termes, ... Poursuivre la lecture

L’Institut économique Molinari publie une étude chiffrant les déficits des retraites françaises en tenant compte des déséquilibres des retraites du secteur public occultés par le Conseil d’orientation des retraites (COR) depuis 2002 (943 milliards de déficits représentant en moyenne 2 % du PIB par an). Construite à partir de données officielles, cette étude quantifie les déséquilibres des retraites des fonctionnaires, qui sont un facteur explicatif du caractère systématique des déficits publics depuis le contre choc du baby-boom.

Nicol... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles