Donald Trump, candidat coup de poing

Jamais un candidat à l’investiture républicaine n’aura suscité autant de réactions aussi viscérales.

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Donald Trump (Crédits : Gage Skidmore, licence CC-BY-SA 2.0), via Flickr.

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Donald Trump, candidat coup de poing

Publié le 19 février 2016
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Par Daniel Girard, depuis les États-Unis.

Donald Trump crédits Gage Skidmore (CC BY-SA 2.0)
Donald Trump crédits Gage Skidmore (CC BY-SA 2.0)

Donald Trump, le vilain, l’effronté, le pitre, celui à qui l’on ne peut faire confiance avec les codes nucléaires disent ses critiques… Jamais un candidat à l’investiture républicaine n’aura suscité autant de réactions aussi viscérales. Pourtant, si l’on analyse attentivement ses positions, on découvre un ensemble de pensées cohérentes, bien imbriquées qui révèlent un candidat peu interventionniste en politique étrangère et plutôt déçu par les ententes de libre-échange.

Le milliardaire clame que l’Amérique ne gagne plus. Pour lui, la relation commerciale avec la Chine en est le plus bel exemple. La Chine souligne-t-il, déstabilise l’Amérique par sa politique monétaire et soutire aux États-Unis le capital dont les entreprises américaines ont cruellement besoin pour produire, faire des profits et ainsi créer de l’emploi.
Un tel discours ne passe pas inaperçu auprès des laissés-pour-compte de la mondialisation, et ils sont de plus en plus nombreux…

La colère du Blanc

L’homme blanc peu scolarisé, fait sur mesure pour le secteur manufacturier, gonfle les rangs des mécontents contre l’establishment. En fait, le taux de participation de l’homme blanc au marché du travail aux États-Unis est passé de 96% en 1968 à 79% en 2015. Durant cette période, son taux de mariage a chuté brutalement de 86% à 52% (ce déclin frappe aussi les minorités mais pas de façon aussi accentuée). Plusieurs hommes blancs se retrouvent donc sans emploi, vivant, parfois, au crochet de leurs parents ou de leur conjointe. Ils résident souvent dans des villages ou des banlieues qui regorgent de personnes à faible revenu et de familles monoparentales où les problèmes de dépendance aux drogues et à l’alcool sont, hélas, très présents. Ce Blanc en colère qui a perdu confiance dans les institutions américaines se retrouve parmi les nombreux partisans de Donald Trump. Ces citoyens admettent être interpellés par ce qui frustre l’Américain désabusé. Ils soulignent que le milliardaire réussit à jouer sur cette corde sensible.

Cet Américain aliéné et sans le sou se met vite en colère lorsqu’il apprend que les commerces de sa communauté emploient des sans-papiers au noir. Quand Donald Trump promet de construire un mur le long de la frontière des USA avec le Mexique pour bloquer l’immigration illégale, il rejoint bien des mécontents. Donald Trump n’est pas le seul à montrer du doigt la Chine pour l’amincissement de la classe moyenne. Le candidat démocrate Bernie Sanders considère que le libre-échange avec la Chine mène à la réduction des salaires, a fait perdre deux millions d’emplois aux Américains depuis 2001, enrichit Wall Street et abime l’environnement. L’Américain en colère est donc également courtisé à gauche.

Pas de gains pour la classe ouvrière : au cours des 50 dernières années, l’Amérique a connu une croissance économique exceptionnelle, mais la classe ouvrière américaine n’en a pas bénéficié. Depuis la fin des années 1960 le revenu net des familles dans la tranche de 50 % inférieure de la répartition du revenu n’a pas augmenté. Durant cette période, les entreprises américaines ont exporté des millions d’emplois du secteur manufacturier. 70% de ces emplois étaient occupés par des hommes. Parallèlement, des millions d’immigrants, légaux et illégaux, sont venus concurrencer les Américains. Leur présence s’est faite sentir sur les chantiers de construction, où les ouvriers et les artisans sont des hommes à 85%. On comprend la frustration de l’employé d’une fabrique qui a vu son emploi partir pour la Chine, ou celle d’un soudeur laissé de côté sur un chantier de construction parce que le contracteur a embauché un Mexicain sans-papiers à moitié prix.

Franc, direct, mais trop brutal ? Lorsque l’Américain désabusé entend des politiciens Démocrates ou Républicains en interview, il est frappé par la mollesse de leur propos. Un partisan de Donald Trump a confié à CNN en Iowa : « Cela leur prend tellement de temps  de répondre à une question que rendu à la quatrième phrase de la réponse, on a déjà oublié la question. Avec Donald, c’est bref et clair ». Les réponses brèves et claires ne sont pas pour autant annonciatrices d’une résolution rapide. Donald Trump veut mieux concurrencer la Chine. Mais va-t-il ramener des emplois ? Son mur longeant la frontière du Mexique empêchera-t-il vraiment l’immigration illégale et le trafic de drogue ? Le milliardaire n’a pas encore de plan précis… Mais pour ses partisans, cela importe peu, ils lui font confiance. Il a dit qu’il allait s’entourer des meilleurs experts. Ils le croient. Il lui reste à convaincre les Républicains qui aiment son style direct faisant fi de la rectitude politique, mais qui s’inquiètent de son tempérament bagarreur. Ils croient que ce caractère intempestif pourrait rendre sa gouvernance difficile. Lors d’une rencontre avec des centaines d’électeurs, à Town Hall vendredi soir à Columbia, en Caroline du Sud, Donald Trump a dû se justifier auprès d’une républicaine, exprimant sa crainte qu’il se montre trop dur comme président. Il lui a expliqué qu’à l’heure actuelle, se montrer ferme était la bonne attitude pour contrer la brutalité de Daech.

Le Town Hall, télévisé à CNN, a permis à Donald Trump de répondre aux questions des partisans républicains, dans une atmosphère calme qui tranchait avec le débat houleux de samedi dernier, ponctué d’invectives des six candidats républicains. Le magnat immobilier a précisé à la républicaine qui s’inquiétait de son tempérament farouche que la nature de son travail de dirigeant d’entreprise l’obligeait à tisser des rapports harmonieux avec ses partenaires d’affaires et ses employés. Il n’était pas inquiet de pouvoir agir de même dans la sphère politique. Il doit maintenant convaincre les électeurs républicains… et il semble sur la bonne voie…

Lire sur Contrepoints tous les articles de Daniel Girard, journaliste à Boston (États-Unis)

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