Par Michel Kelly-Gagnon, depuis le Canada
Le site Bloomberg.com publiait un article intéressant la semaine dernière sur la façon dont les principaux candidats à l’investiture des deux partis américains gagnent des points politiques en frappant sur les entreprises. Que ce soit Donald Trump, qui s’en est pris à Ford, Kraft (il a juré qu’il ne mangerait plus jamais de biscuit Oreo !) ou Apple, qu’il accuse de produire ailleurs qu’aux États-Unis. Ou encore Ted Cruz, qui se présente comme l’ennemi du capitalisme de copinage. Et le socialiste Bernie Sanders, pour qui les banques de Wall Street ne sont rien d’autre que cupides, malhonnêtes, frauduleuses et arrogantes !
Et que font ces entreprises ? Est-ce qu’elles répliquent avec vigueur pour défendre leur intégrité et leur contribution à la société ? Non. Elles tendent plutôt l’autre joue, comme le suggère l’article. En se disant, peut-être avec raison, qu’après la campagne électorale, tout va redevenir « business as usual ».
Ces observations viennent des États-Unis, mais je peux vous dire qu’elles sont compatibles avec mon expérience personnelle au Québec. Ici aussi, les dirigeants d’entreprises sont plutôt timides, à tort ou à raison. Et je crois qu’il existe des causes profondes à ceci. Sans vouloir paraître condescendant, j’ai l’intime conviction qu’un certain « cours d’autodéfense contre les attaques idéologiques » serait bénéfique à nos gens d’affaires, et à la société dans l’ensemble.
Les dirigeants et les cadres supérieurs doivent comprendre que leurs entreprises sont toujours à risque de subir des attaques. Surtout provenant de militants et d’ONG, dont les attaques sont idéologiques et récurrentes. Mais aussi, comme on le voit durant la campagne politique américaine, de politiciens toujours prêts à jouer la carte populiste pour gagner des votes.
Les entreprises doivent se défendre
Au cours de ces « crises », les entreprises ne peuvent pas espérer gagner la bataille en s’excusant, ou en tendant l’autre joue. Et comme les attaques idéologiques diffèrent de la gestion de crise liée au produit, les gens d’affaires ont besoin de « munitions intellectuelles » et d’arguments pour se défendre et contre-attaquer. Par exemple en démontrant le rôle positif et la contribution de leurs activités et/ou du libre marché en général pour la société, et ainsi offrir au public et aux médias une vision plus équilibrée.
Les entreprises sont souvent très bonnes pour convaincre les clients des mérites de leurs produits. Mais elles pourraient faire un bien meilleur travail à communiquer leur contribution à la société. Cela comprend la capacité de comprendre et d’articuler des arguments convaincants sur la valeur des droits de propriété, la liberté contractuelle et l’importance de l’économie de marché pour la société dans son ensemble.
Cela semble aller de soi. Et pourtant, où enseigne-t-on ces principes, et la défense de ceux-ci, aux gens d’affaires ? Dans nos écoles de gestion ? Permettez-moi d’en douter. Cela ferait pourtant un cours fort intéressant et pertinent dans un programme de MBA.
L’« entrepreneuriat » est un thème dont beaucoup aiment se gargariser par les temps qui courent. Mais comme je l’évoquais dans une chronique précédente, l’entrepreneuriat a comme condition préalable la liberté économique. Et ceci inclut la défense de cette liberté lorsqu’elle est attaquée. Pas en s’excusant. En contre-attaquant, et en convainquant.
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« Les entreprises prospères de demain seront celles qui, face à une complexité croissante, adapteront une gouvernance souple qui favorise l’innovation, tout en analysant la contribution au bien-être au travail et au bien commun. » Pour découvrir plus encore des arguments pour la défense de l’utilité sociale de l’entreprise, la Fondation pour l’innovation politique vous invite à lire la note de Daniel Hurstel « Projet d’entreprise : renouveler le capitalisme » (https://lc.cx/4dJs)
En France, les attaques contre les entreprises, c’est pour la forme, c’est pour jeter en pâture un os à ronger aux électeurs communisants ou ignorants et frustrés, mais le capitalisme de copinage en prend bien soin des entreprises, c’est le filet de sécurité des politiciens qui ratent leur réélection. Un exemple : qui a dit « mon ennemi c’est la finance » et qui est maintenant copain comme cochon avec tous les banquiers de France ?