Par Jean-Philippe Delsol
Un article de l’IREF-Europe
L’État-providence nous dicte désormais ce qu’il faut manger, comment se soigner, quelle orthographe nous devons utiliser… Plus généralement, il veut modeler nos comportements en utilisant l’arme fatale de l’impôt qui prend aux uns pour donner aux autres et dont sont exonérés ceux qui obéissent aux injonctions de dépenses et d’attitudes tandis que sont pénalisés les récalcitrants. Une sorte de soviétisme doux en quelque sorte, d’autant plus facilement populaire que plus de la moitié des foyers échappe à l’impôt sur le revenu qu’elle impose aux autres de payer plus ou moins selon leur docilité aux diktats de la nouvelle nomenklatura.
Cette intrusion de l’État dans la vie des individus par le biais fiscal est due en particulier à la prétention de l’État moderne à vouloir faire le bien plutôt que de se limiter à veiller au bien commun. Celui-ci consiste à permettre aux hommes, tous différents, de vivre ensemble dans le respect de règles partagées et essentielles. Le bien est, lui, du ressort des particuliers. Il est la quête ultime de l’homme. Avec l’Un, le Vrai, le Beau… il fait partie des transcendantaux que l’homme recherche sans cesse sans jamais être sûr de les connaître ni de les avoir trouvés.
Quand l’État se trompe
Et lorsque l’État se substitue aux individus pour faire le bien, il peut se tromper à leur détriment, imposer un bien qui n’en est pas un.
Ce ne peut donc être qu’avec d’infinies précautions, la main tremblante, que l’État peut s’engager dans cette voie hasardeuse du bien des autres. Lorsque la loi ne veut pas seulement sécuriser la propriété, mais la répartir, non seulement protéger la vie, mais faire le bonheur de tous, lorsqu’elle veut régir les rapports entre parents et enfants, supprimer la charité au profit de la seule justice… elle prend le risque qu’à défaut de propriété garantie, tous soient plus pauvres, qu’un bonheur obligé soit le malheur de beaucoup, que les enfants ne soient plus éduqués… Car le législateur ne saurait choisir la vie et le bonheur des individus, il ne peut être parent à la place des parents, il ne saurait faire prospérer la propriété aux lieu et place des propriétaires.
« Un gouvernement qui serait fondé sur le principe de la bienveillance envers le peuple, comme celui d’un père envers ses enfants, [serait] le plus grand despotisme qu’on puisse concevoir » prévenait déjà Emmanuel Kant en 1793.
L’impôt neutre, un impératif
C’est pourquoi l’impôt doit être neutre. Il n’a pas à être l’instrument de la bienveillance de l’État, parce que l’État n’a pas vocation à être bienveillant, mais juste. À défaut, le risque est celui d’une violence illégitime, fondée sur aucune raison. Quand l’impôt est progressif, les limites de chaque tranche deviennent vite arbitraires. Et lorsque les impositions sont trop élevées, les niches se multiplient pour les rendre supportables comme autant de privilèges accordés injustement à certains au détriment de tous les autres.
Un impôt neutre est celui qui cherche à modifier le moins possible les situations de chacun tout en demandant aux citoyens de contribuer à la charge commune « à raison de leurs facultés », c’est-à -dire en proportion de leurs revenus, ainsi que le proclame la Déclaration des droits de l’Homme de 1789. Des impôts neutres sont donc simples, proportionnellement égaux pour tous. Et parce qu’ils sont justes, ils sont efficaces. Une flat tax à 2 % jusqu’à 8000 euros par part, et 15 % au-delà , accompagnée de la suppression de toutes les niches fiscales (hors le quotient familial et conjugal et les dons aux œuvres) rapporterait beaucoup plus que l’impôt sur le revenu actuel qui frappe certains revenus jusqu’à 64,5 % !
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Il est évident qu’un Etat doit être juste ET bienveillant….
Bienveillant comme un despote éclairé ….
La déductibilité des « dons aux oeuvres » est une entorse à la « neutralité » avec des oeuvres agréées et d’autres pas… Et pourquoi cette solidarité dirigée?
Je discute aussi l’assimilation du « quotient familial » à une niche fiscale et son côté redondant avec les 8000 euros par part.
Et les allocations diverses sont-elles intégrées aux revenus ou remplacées par un impôt négatif?
Bonjour
Un impot neutre n’a pas de quotient familial ni deux taux.
Votre impot n’est pas neutre.
Le quotient familial est sans doute la chose la plus urgente à réformer, parce qu’elle bloque toutes les autres. Quant aux dons aux oeuvres — vite étendus aux syndicats et partis politiques –, c’est le contraire de la neutralité.
C’est quoi la différence entre payer des impôts pour financer l’assistance publique et faire un dons a la croix rouge ? Seule l’état a le droit de décider ou vont vos impôt ?
L’Etat (la communauté) n’a pas à me faire de remise d’impôt sur ce que je décide de donner ni en fonction de qui en est le bénéficiaire. Il n’a pas à déclarer certains « d’utilité publique » et d’autres « restreints à des dons d’usage ».
Et pourtant la justification de l’impôt c’est ‘l’utilité publique’. En quoi la communauté est mieux placé que moi-même pour décider de cela?
Ah non ! La justification de l’impôt est la participation aux charges communes. Le concept d’utilité publique est un dévoiement, une confusion entre nécessité indispensable et agrément plus ou moins utile.
Mais ça ne change rien, le principe que chacun pourrait décider de la destination d’une partie de son impôt est une aberration, l’état sera toujours moins efficace et moins légitime pour son emploi. Il n’y a pas d’obligation d’assistance à autrui, je veux être libre de répondre « Crève, charogne ! » ou « Prends donc ma main ! ». Ce faisant, je ne me substitue pas à la puissance publique dont ce serait le rôle, et la puissance publique n’a même pas à savoir ce que je décide, encore moins à m’encourager dans un sens ou dans l’autre par des dispositions fiscales.
Il me semble que vous pêchez par innocence sinon par naïveté: l’état n’a nulle prétention réelle à dire le bien.
Il n’est en cela que le faux-nez de ceux qui en ont conquis les rouages, un prétexte pour raser gratis tantôt les uns ou les autres, avancer ses influences et ses avantages.
Quand la machinerie se grippe, on affaire de nouvelles têtes d’affiche politiques dont on favorise l’essor et la visibilité, dont on qualifie la respectabilité et sanctifie le discours pour continuer de plus belle.
On donne un nouveau sens au « Bien Commun » pour le plus grand avantage de cette coterie.
Nous sommes malheureusement dans notre majorité de grands enfants sensibles aux belles histoires, et nous laissons berner. Le temps de le comprendre, et si le cynisme ne nous a pas atteint, l’âge le fait et ceux qui nous suivent croient réinventer la roue.
Bref entre orgueil et benoiterie, nous sommes le jouet collectif de cette organisation implacable.
Les gens devrait relire l’histoire du monde, quand on analyse bien on voit toujours la même chose, le pouvoir (l’état) tue et oppresse.
La solution serait de changer la personne au pouvoir ? Ou de changer le régime politique? A chaque fois on se faire avoir par ces hommes politiques, cette caste de cafard.
« La fiscalité doit être soutenable pour être juste. La soutenabilité implique un niveau de prélèvements compatible avec la prise de risque et sa rémunération ». Sur ce sujet, retrouvez la note « La fiscalité passe aussi par la compétitivité » (https://lc.cx/4PLe), issue d’une conversation entre Aldo Cardoso, Michel Didier, Bertrand Jacquillat, Dominique Reynié et Grégoire Sentilhes.
Le seul impôt neutre est l’impôt à l’assiette vide et au taux nul.
C’est fou cet acharnement à appeler un impôt progressif à 2 tranches « flat tax »…