Par Philippe Silberzahn.
La perfection évangélique ne conduit pas à l’empire. Cette phrase de Charles de Gaulle s’applique à Elon Musk comme elle s’appliquait à Steve Jobs. Le général ajoutait que les hommes de talent entreprenant une grande œuvre avaient rarement une vie personnelle facile. Là encore cela s’applique à Musk, comme le montre sa biographie parue en français, et que je viens d’achever.
Voici ce que cette lecture m’a inspiré.
De toute évidence, Musk est un homme extraordinaire. Après une enfance difficile en Afrique du Sud avec un père violent, il atterrit au Canada puis arrive aux États-Unis. Il crée une première startup, revendue pour une belle somme, puis il investit dans PayPal, qu’il revend une fortune.
Il réinvestit l’intégralité de cette somme dans trois projets : Tesla, SpaceX et SolarCity.
Tesla, le plus connu, est un projet de voiture électrique qui révolutionne l’industrie. Au contraire de tous les essais précédents de voitures électriques qui essayaient d’être les moins chères possible, il positionne sa voiture dans le segment du luxe, avec la Roadster puis la Tesla modèle S, un superbe coupé sportif.
L’exploit SpaceX
SpaceX, moins connu, est pourtant un exploit : en un temps record, Musk crée un nouvel acteur entièrement privé du lanceur spatial. Personne n’aurait parié un centime sur lui. Résultat ? Il réussit, offre des lancements 4 à 5 fois moins chers que ses concurrents qui employaient en gros les mêmes techniques depuis les années 1960 en vivant des commandes de l’État. Musk, lui, revoit tous les procédés, tous les processus, reprend tout à zéro.
Prévoyant initialement de sous-traiter le maximum de choses pour se concentrer sur les parties à valeur ajoutée, il change rapidement d’avis : les fournisseurs, habitués à travailler avec les dinosaures de l’industrie, sont trop lents et trop chers. Il est trop petit pour eux, ils ne le prennent pas au sérieux. Il décide donc de tout faire lui-même, divisant ses coûts par 10, voire par 100 pour certains composants. Résultat ? Un lanceur innovant, fiable et très bon marché. Il engrange un contrat de 1,6 milliard de dollars de la NASA, à la stupéfaction de ses concurrents. Ses fusées Falcon ravitaillent la station spatiale internationale depuis 2012.
Avec SolarCity, il révolutionne le domaine de l’énergie solaire. L’entreprise pilotée par son frère, mais dont il est cofondateur, fabrique, finance et installe des panneaux solaires photovoltaïques en développant un réseau d’énergie. Ajoutons que Tesla développe également ses propres batteries, et vient d’annoncer le produit PowerWall, qui devrait révolutionner le secteur de l’énergie en permettant de développer la production et le stockage personnels.
Bien sûr, l’ouvrage donne force détails sur ces différents projets. Il montre bien comme Musk est souvent passé près de la catastrophe : fin 2008, ses trois projets étaient pratiquement à sec. Il montre également que dans la poursuite de ses objectifs, Musk se montre impitoyable, traitant mal ses employés, montrant un comportement à la limite de l’autisme. Comme pour Steve Jobs, d’aucuns en déduiront, faussement bien sûr, qu’il faut nécessairement être un salaud pour réussir quelque chose de grand, alors que ce que Musk montre, c’est qu’on peut réussir quelque chose de grand aussi en étant très dur.
On voit surtout qu’il existe une ligne tenue entre l’exigence nécessaire à l’accomplissement de grandes choses, qui ne peut souffrir de compromis, et la dérive autoritaire. Mais comme Steve Jobs, et peut-être plus que lui, Musk connaît à fond son sujet : il est une encyclopédie vivante sur les technologies spatiales et impressionne les meilleurs experts par sa maîtrise du sujet. Une leçon que devraient méditer beaucoup de chefs d’entreprise français qui n’ont aucune idée de ce qui se passe dans leurs ateliers et leurs usines.
Un message d’espoir
Mais surtout l’aventure de Musk est un formidable message d’espoir. Un sentiment se développe en effet actuellement selon lequel les grands jours de la croissance seraient derrière nous. Qu’il n’y aurait plus grand-chose à inventer.
Peter Thiel, autre entrepreneur mythique de la Silicon Valley, n’a-t-il pas récemment déclaré d’un ton désabusé : « On rêvait de voitures volantes, on a eu les 140 caractères de Twitter » ?
Heureusement, tout le monde ne partage pas ce pessimisme. Un certain nombre de chercheurs et d’industriels estiment au contraire que nous sommes au début d’une nouvelle révolution industrielle. Qu’on peut encore rêver de grands projets. Musk est de ceux-là . Il rêve d’un monde qui n’utiliserait plus de pétrole, et il voudrait aller vivre sur Mars. Il a créé SolarCity et Tesla avec pour ambition première de réduire le réchauffement climatique. Il ne bluffe pas : il a mis en accès libre une grande partie des brevets de Tesla pour faciliter le développement des voitures électriques.
On voit dès lors le lien entre ses différents projets : de l’énergie propre, et des fusées pour aller sur Mars. Il veut aussi révolutionner les transports en commun avec son projet Hyperloop. On peut sourire et lui prêter une naïveté de self-made man. Mais ce serait oublier que ce type de projet fou a nourri toute l’histoire de l’innovation.
Les frères Wright étaient fous de vouloir voler alors que les plus grands scientifiques avaient montré que le plus lourd que l’air était impossible.
Henry Ford était fou de vouloir offrir une voiture pour le tiers du prix des voitures de l’époque. On oublie à quel point beaucoup d’innovateurs ont été cloués au pilori à leur époque quand ils ont partagé leur rêve, leur ambition, et leur projet. On oublie à quel point le pessimisme peut être destructeur, et à quel point il se trompe. Il n’est qu’à regarder les prédictions de Malthus à la fin du XVIIIe siècle, ou celles de Paul Ehrlich en 1970 sur la famine inéluctable qui attendait le monde.
Pour tous ses défauts, Musk perpétue cette tradition d’optimisme et de volontarisme, cette foi en la technologie qui permet, depuis des milliers d’années, d’améliorer la condition de l’homme, en rendant possibles des choses qui nous paraissent ridicules aujourd’hui, et qui seront indispensables à nos enfants demain.
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Mouais, mais il donne donne pas l’impression de nager contre le courant ..de subventions. Je situe mal l’article..mais difficile de juger cet homme connu hors ses projets… Le simple fait que cet homme semble fasciner me fait penser que certaine personne seront tentés de le suivre sans réflechir.
L’enthousiasme pour Elon Musk me rappelle celui que je voyais il y a 25-30 ans chez tous les gens que je connaissais qui avaient eu affaire à Bernard Tapie. Un enthousiasme qui fait négliger de vérifier l’arithmétique des comptes et qui reflète pour moi plus le triomphe de la connivence que celui de l’optimisme.
Musk n’est pas en train de promouvoir la cause libérale, mais ses rêves d’enfant. Et si l’Etat les finance via des subventions, il ne va pas s’en priver.
De même, Jobs ne s’est pas privé d’utiliser les brevets et droits d’auteurs pour bâtir l’empire Apple, qu’il contournait pourtant sans état d’âme à ses débuts.
Sinon je ne vois pas le rapport avec Tapie, Musk est un entrepreneur qui a révolutionné plusieurs domaines technologiques, Tapie a surtout brassé du vent.
Entre brasser du vent et faire miroiter du solaire… 🙂 Mais Musk n’a rien révolutionné de technologique, il fait marcher un business model qui fait vendre des technologies non-rentables en elles-mêmes.
Ok pour solar city et tesla, mais pour spaceX il semble relativement sur la coche.
Elon Musk est pour le moins une personnalité très médiatique. Son engagement écologique lui attire des sympathies, mais celles-ci pourraient bien mener à un aveuglement catastrophique. Il fait le grand écart entre « Paypal » et la conquête de Mars. Seul compte le résultat : s’il y a des « idiots utiles », pourquoi n’y aurait-il pas des « salauds utiles ». Mais parier su la réussite de Musk SANS être actionnaire ou prêter des vertus à des personnes aussi médiatisées est en fait assez vain.
Il est logique pour un investisseur de prendre des gros risques pour une promesse de gros bénéfices – à condition de ne pas oublier de surveiller les comptes … Mais quand le contribuable subventionne des « routes solaires » sans qu’on lui laisse le choix, on peut cependant avoir des doutes : Musk est-il plus proche d’un Steve Jobs ou d’un Bernard Tapie ?
n sens inverse on pourrait dire qu’Elon est un pessimiste pragmatique qui essaye de sauver le monde de l’optimisme des idiots qui ne font que se cacher derrière l’erreur de Malthus pour justifier leur amour déraisonnable pour la re-production biologique comme les enfants se cachent les yeux derrière leurs mains.
Elon n’est pas fou ce sont le gens ordinaires qui le sont.
quant à Malthus , le XXe siècle a eté traversée par des guerres innombrables, des famines, des crises économiques, qui ont régulés le taux de natalité dans tout les pays du monde. si seulement on l’avait écouté et si on l’écoutait aujourd’hui et que nous mettions notre énergie dans quelque chose de vraiment nouveau. être plus nombreux ce n’est pas un progrès. seuls quelque uns plus intelligents ont ensuite imposé des quotas. sachant qu’en france un enfant coûte 350.00 euros nous aurions largement de quoi faire du progrès. le vrai.
mais le but de Malthus n’était pas d’avoir raison mais d’inviter le monde à s’interroger et à trouver des solutions. si la révolution des énergies fossiles n’avait pas été réalisé par des gens pragmatiques qui permet de fournir et d’acheminer plus de nourritures il aurait eu mille fois plus raison. mais celles-ci se tarissant (-60% en Europe depuis 2000, -40% en Afrique depuis 94) ses idées reviennent sur le devant de la scène. musk conscient du problème tente de tordre le cou des fous qui pensent qu’il suffit de se multiplier et les solutions tomberont toutes seules.
être plus nombreux n’est pas un progrès ..certes mais mourir moins absolument!
certes mais j’ai jamais dit qu’il fallait voir diminuer la population et encore moins jusqu’au suicide. le vieillissement est une externalité négative du progrès mais l’accumuler avec 8 millions de chômeurs n’est pas très malin. ces derniers rentrent en compétition avec toute la population. donc oui la France pour un revenu donné d’aujourd’hui est en surpopulation.
suffit de regardé le pib /capita et la dynamique décennal nous allons tout droit en récession décennale. pas plus que les révolutions d’hier celle de demain vont permettre de retrouver du plein emploi avec un revenu décent sur le moyen terme à 20ans. tout au plus ça amortira le choc car le pire reste devant nous.
Avant de refaire le monde, il faudrait peut-être achever celui qui se construit actuellement. En effet, les pays dit « avancés » – les plus prospères et ceux qui contiennent cependant le plus d’indignés – sont ceux où la natalité est la plus faible et où donc la décroissance de la population pose problème (à cause de son vieillissement).
Mais peut-être que je me trompe et que le but est en fait de refaire le monde des autres …
tout les pays doivent évidemment revoir leur politique natalistes pour un moment et particulièrement ceux qui voient leur ressources diminuer, le temps d’investir non pas sur le biologique qui est en demande continue pour jouir mais sur le technologique pour améliorer l’intensité énergétique et productive..
tu soulèves un paradoxe intéressant mais c’est parce que vous le limiter qu’à la France. primo les pays émergents veulent aussi du pétrole donc ça en laissent moins pour les autres habitué à en consommer beaucoup pour un travail donné et alors que la production conventionnelle n’augmente plus. et que deuxio étant rentrer en premier dans la révolution industrielle nous sommes aussi les premiers à avoir épuiser nos ressources énergétiques. autant sur le charbon on n’a su le remplacer autant sur le pétrole nous n’y parvenons pas suffisamment.
@ misterLol
La Terre n’a jamais été autant peuplée, et pourtant, on a réussi à éradiquer la famine. La famine n’existe plus que comme arme de guerre dans les conflits.
Donc non, Malthus s’est fourvoyé complètement. Parce que justement, il ne raisonnait pas comme un capitaliste pragmatique, mais comme un socialiste idéologique.
D’un point de vue libéral, le marché régule la population: si les matières premières deviennent plus rares, les prix vont augmenter, les enfants vont coûter plus chers qu’ils ne vont rapporter, et les gens limiteront d’eux-même les naissances, car ils préfèrent un bon niveau de vie avec 1-2 enfants, que la pauvreté avec 10 enfants…
Cela s’observe déjà dans les pays développés: un enfant va plus coûter que rapporter financièrement et pour cette raison, les gens ont préféré limiter d’eux-mêmes le nombre des naissances.
cqfd
Musk il a oublie d’ou il vient. Son pays ne lui pardonnerait jamais. Il a laisse son continent et est alle se divertir au Etas Unis en satisfaisant seulement les riches. Tout ce qui va haut et lorsqu il tombe ce serait terrible. (sorry for my french)
« sorry for my french »
Bel effort, mais des progrès à faire … Et peut-être devriez vous faire l’acquisition d’un clavier français avec des accents …
Je suppose qu’il faut lire :
« Musk a oublié d’où il vient. Son pays ne lui pardonnera (peut-être, probablement ?) jamais. Il a délaisse son continent et est allé se divertir au Etas Unis pour la satisfaction exclusive des riches. Plus on va haut et plus la chute est dure. »
Estes vous sud-africain ? Musk a évidemment plus d’ambition pour lui même que pour son pays. Dommage pour l’Afrique du Sud, mais chacun est libre. En guise de consolation pour vous, cela montre que l’Afrique du Sud peut produire des gens de haut niveau. (A condition qu’un échec retentissant n’ait pas l’effet contraire).
Petite faute, la modèle S n’est pas un coupé sportif mais une berline.
Sauf que Tapie était réellement un escroc qui a fait de la prison et qui n’est pas vraiment connu en dehors de la France, et qui n’a strictement rien révolutionné…Â
A l’inverse, Musk est un entrepreneur qui a des rêves fous et qui se donne les moyens de les réaliser.
Et réussir à faire du spatial pour 4 à 5 fois moins cher que le marché, c’est une révolution technologique!
De même, réussir à rendre une voiture électrique performante, autonome, et abordable par la classe moyenne, c’est aussi une révolution technologique, que même les acteurs centenaires de ce marché très concurrentiel n’ont pas réussi à réaliser jusqu’à présent…Â
le piège cest de penser que » parce qu’elon musk » ces proests sont viables, comme on a l’argument parfois apprrrouvé par bill gates…