Emmanuel Macron, révélateur de nos frustrations politiques

Emmanuel Macron est-il le réformateur qui bousculera l’immobilisme politique français ?

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Emmanuel Macron (Crédits : LeWeb, licence CC-BY 2.0), via Flickr.

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Emmanuel Macron, révélateur de nos frustrations politiques

Publié le 9 avril 2016
- A +

Par Michel Faure.

Emmanuel Macron (Crédits : LeWeb, licence CC-BY 2.0), via Flickr.
Emmanuel Macron (Crédits : LeWeb, licence CC-BY 2.0), via Flickr.

Si un jour la gauche française oubliait ses réflexes anticapitalistes, son étatisme hégémonique, sa fiscalité délirante, ses dérives autoritaires et son obstination à défendre ses mauvaises idées économiques et sociales, ce serait grâce à des gens comme Emmanuel Macron. Et si la droite conservatrice, napoléonienne et autoritaire, promettant un chef à poigne, la sécurité et un État fort, redevenait un jour ce qu’elle fut, une droite moderne, réformatrice et tolérante, comme au temps, notamment, de Valéry Giscard d’Estaing et de l’UDF, ce serait là aussi grâce à l’influence de personnages comme Emmanuel Macron. Enfin, si le centre, au lieu d’être cet éternel ectoplasme à géométrie variable qui finit toujours par servir de force supplétive à la droite ou à la gauche, rassemblait un jour une majorité d’électeurs qui refusent la sclérose marxiste et l’ankylose conservatrice, ce serait sans doute, une fois encore, grâce à des Emmanuel Macron.

Macron, l’homme providentiel ?

Emmanuel Macron est donc l’homme providentiel ; mais ce n’est pas en raison de ses qualités personnelles, mais plutôt de sa normalité sociologique. Au fond, le ministre de l’Économie n’a rien d’extraordinaire, sinon sa position stratégique de ministre du sérail en rupture de ban. Il ressemble à un large échantillon de Français, il est comme vous et moi, quelqu’un intéressé par le sort de son pays, frustré dans ses envies de réformes et accablé par l’immobilisme de notre système politique. Par contre, et contrairement à vous et moi, il se trouve, lui, en situation d’agir. Il a cette particularité d’être à la fois dans le système, et d’être perçu comme marginal et rebelle en son sein, mais une rébellion courtoise, celle d’un garçon bien élevé, donc rassurant. D’où les espoirs qu’ils suscite chez de nombreux Français, et la trouille que son éventuel succès provoque dans le personnel politique actuel.

Néanmoins, quelques questions se posent. Emmanuel Macron reste une énigme. S’il est vraiment libéral, ou même simplement un réformateur conduit par le bon sens (lequel est toujours libéral), que fait-il dans cette galère hollandaise ? Est-il vraiment à gauche ? Il le dit. Pourquoi pas ? Le libéralisme, dans l’histoire française, s’est longtemps situé à gauche de l’éventail, face aux conservateurs et aux monarchistes. Aujourd’hui encore il existe un courant héritier de cette tradition d’un libéralisme politique et économique, mais aussi social et sociétal. En fait-il partie ? Probablement. D’ailleurs, c’est bien ce que pense aussi la gauche de la gauche, réactionnaire et populiste, et c’est pour elle une abomination. D’où cette subtile analyse, finement ciselée, de Martine Aubry : « Macron, franchement, ras le bol ! »

Les libéraux sceptiques face à Emmanuel Macron

Bizarrement, seuls les libéraux ont encore quelques doutes à son égard, même si le ministre de l’Économie définit son mouvement, « En Marche ! », comme étant ni de gauche, ni de droite, comme les libéraux eux-mêmes, qui se situent eux aussi ailleurs.

Macron a dû batailler avec les deux ailes de notre vieux système politique, s’engager dans des querelles picrocholines avec une gauche qui, quand elle n’exprime pas une vision archaïque du peuple français, s’avère sans courage et sans audace, et avec une droite sectaire et conservatrice qui n’est pas venue l’aider quand il fallait décoincer notre société et dénouer les entraves de notre économie. En ce sens, le succès populaire de Macron est le révélateur de nos propres frustrations.

Après la désillusion Sarkozy, puis la déglingue Hollande, Macron offre un espoir, ouvre à nouveau le chemin vers l’isoloir aux abstentionnistes politisés parmi lesquels l’auteur de ces lignes se reconnaît. Lui, au moins, a essayé de changer les choses, de moderniser un peu l’ordre médiéval tenu d’une main de fer par une caste de petits marquis de la République qui entendent régenter notre vie et ferment à double tour la porte de leur club privé pour éviter l’émergence de forces alternatives.

Le ministre de l’Économie a eu l’habileté d’entrer dans la place. Sera-t-il en situation d’en déverrouiller les portes et d’ouvrir les fenêtres ? Osera-t-il se porter candidat à la présidentielle, et attirer ainsi vers lui un très large centre réformateur ? C’est improbable, mais pas impossible. Candidat ou non, il est déjà bien parti pour devenir le Premier ministre du prochain président, quelle que soit sa couleur. C’est un scénario raisonnable, un peu décevant pour les réformateurs impatients, mais prometteur pour l’avenir. En 2017, Macron aura 40 ans, un bel âge pour bien gouverner.

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  • Bonjour,
    Tres bonne analyse dont je partage les espoirs comme les craintes… et en optimiste, je prefere en partager les espoirs.

  • Sa trajectoire pose questionS !
    S’acoquiner avec le Président le plus nul, le plus menteur (?), le plus etc… à de quoi interpeller, ne dit-on pas : « qui se ressemble, s’assemble » ?
    Bien qu’encore très jeune, il me semble manquer de convictions, alors MÉFIANCE !

  • Et quand Macron déclare que Hollande est le meilleur candidat pour 2017, on en pense quoi?

  • Difficile à cerner ce Macron, c’est sûr qu’il incarne quelque chose de différent des pourris et incompétents qui grenouillent en politique aujourd’hui. Mais est-il ce qu’il incarne ? Ou avance-t-il masqué intelligemment vers des objectifs qu’on ne soupçonne pas ? N’oublions pas que la posture adoptée par un politicien pour se faire élire n’a rien à voir avec ses convictions ou avec ce qu’il fera une fois élu, Hollande en étant le parfait exemple.

  • La macronmania tourne à plein régime…
    Haut fonctionnaire, énarque, il fût semble-t-il un très bon banquier d’affaires à la Banque Rothschild de 2008 à 2012 et il y a gagné plus de deux millions d’euros tout en étant engagé auprès de François Hollande « l’ennemi de la finance qui n’aime pas les riches ». Qui se moque de qui ? 🙂
    Beaucoup de paroles, de déclarations, de rétractations mais quelles actions réelles à part la libéralisation des lignes de bus…
    Dans le Figaro Madame, un article quasi injurieux pour l’intelligence politique de l’électorat féminin le présente comme un romantique aimé des femmes qui a épousé son ancienne professeure de français de vingt plus âgée, gage d’un amour profond et réel (?)
    On peut y voir aussi une réelle immaturité.
    Macron soutenu par Hollande, Hollande soutenu par Macron, super…!

  • D’accord avec la plupart des idées développées dans cet excellent article. Le dilemme est celui-ci : Macron se prépare-t-il pour 2017 ou 2022? Si c’est pour 2017, il doit s’opposer d’ici quelques mois à François Hollande, qui en quelque sorte l’a mis en place ; cela ne sera pas très difficile car le programme d’Hollande n’existe pas. Il n’a montré que sa capacité de naviguer à vue en fonction des mécontents qu’il fait de ci delà. Macron pourra présenter un programme qui a des chances d’être accepté par la grande masse d’électeurs du centre et des bordures centristes des PS et IR. Mais il faut qu’il réussisse à présenter des candidats à l’Assemblée nationale pour pouvoir gouverner. Si c’est pour 2022, il faut qu’il se sépare de Hollande dès la déclaration de candidature de ce dernier, afin de préparer son assise électorale. Il se confrontera alors soit à la droite, si celle-ci gagne les élections, soit à la gauche, ce qui ne sera d’ailleurs qu’un retour à sa vérité de libéral-social. C’est un vrai dilemme et je pense qu’il ne choisira pas car les deux voies supposent l’éclatement de tout le système politique dans les mois qui viennent.
    Serait-il possible d’utiliser le mot de « hollandistes » plutôt que « hollandais » pour désigner les partisans de François Hollande, par respect pour nos amis hollandais (on a dit les bollandistes » pour les partisans de Bolland, vers 1660 ; les pétainistes aussi, mais cela fait moins plaisir).

  • @l’auteur « il est comme vous et moi, quelqu’un intéressé par le sort de son pays » : affirmation purement gratuite , vous le connaissez ? Vous sondez le coeur de vos lecteurs ? Et vous , entant que journaliste ,militez vous pour l’équité devant l’impot et donc pour la réforme de la fiscalité du journalisme ? Non ? Eh bien vous défendez votre pré carré et le bien du pays quand il touche à votre portefeuille il y a comme qui dirait divergence de vues. bon et bien Macron il veut comme les autres être président , c’est un parfait fils du sérail moulé à la louche . Vous prenez une vessie de plus pour une lanterne . Marrant ce besoin chez les gens de voir des messie partout.

  • Le libéralisme est quasiment d’extrême-droite économiquement (l’extrême-droite étant l’anarcho-capitalisme) mais d’extrême-gauche sociétalement.

    Je pense que c’est, en partie, pour cela que les gens ne comprennent pas ce qu’est la droite et la gauche. En fait la politique est de dimension 2. C’est à dire qu’il y a deux vecteurs (socio-économique et societal) qui décrivent tous les politiques (n’importe quelle politique peut se définir comme la somme de ses deux vecteurs).

    Définitions:
    socio-économique: Politique social et économique (c’est conjugué) que veut un dogme politique. socialement c’est ce qui se rapporte aux relations du travail (ex. : le droit social).

    Sociétal: ce sont les opinions dudit dogme sur les sujets de sociétés, par exemple l’immigration, le mariage homosexuel, la surveillance de masse ect…

    Ainsi une personne peut être d’extrême gauche socialement (pour l’immigration, le mariage) mais d’extrême droite économiquement (libéralisme économique). Au contraire, le F.N est d’extrême droite societalement et de gauche économiquement.

    Le libéralisme est bien à la fois d’extrême gauche et d’extrême droite (sur deux vecteurs différents).

    Bien sur il ne faut pas le prendre comme une insulte car mon classement est scientifique et ne se rapporte pas à ce qu’on appelle gauche ou droite communément (avec l’aide d’une seul dimension). On peut considérer pour cela qu’on à projeter les deux caractéristiques sur cette axe et qu’on en a fait une moyenne (le barycentre du libéralisme est donc bien le centre).

  • Non.
    Macron n’est qu’un socialiste un peut moins rouge que les autres. Lorsqu’un tyran vous condamne à 100 coups de fouets on a vite fait de trouver celui qui vous en inflige 90 comme un bienfaiteur…

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Pourquoi pas les deux ? Il fut répondu [ par l’auteur de ces lignes] par la négative dans deux articles parus en 2018 à la suite de la lecture de The Rise of the Fourth Political Theory de l’idéologue et politologue russe Alexandre Douguine, lequel, émule de Heidegger et de Carl Schmitt, rejette explicitement ce qu’il appelle la démocratie libérale et le libéral-capitalisme au nom d’une forme de conservatisme basée sur les notions d’identité nationale, de sécurité, d’ordre, d’autorité, d’héritage religieux, de famille, de traditions.

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