Présidentielles 2017 : la gauche peut faire perdre la gauche

La gauche archaïque ne veut plus gouverner. Il faut donc perdre l’élection présidentielle de 2017, et faire perdre le PS.

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Jean-Luc Mélenchon et Pierre Laurent By: Rémi Noyon - CC BY 2.0

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Présidentielles 2017 : la gauche peut faire perdre la gauche

Publié le 8 juin 2016
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Par Patrick Aulnas.

Mélenchon Laurent
Jean-Luc Mélenchon et Pierre Laurent By: Rémi NoyonCC BY 2.0

L’interminable mouvement social mené par la CGT et SUD a une signification politique forte : la gauche archaïque ne veut plus gouverner. Il faut donc perdre l’élection présidentielle de 2017. Cette gauche a-t-elle d’ailleurs jamais voulu gouverner ? Le doute est permis. Pour elle, il s’agit de construire sur le papier une société théorique et de faire fantasmer citoyens et travailleurs sur l’avenir édénique qui serait le leur. Les leaders de cette gauche sont à l’image de la plupart des leaders : plus intelligents que la moyenne et très opportunistes. Ils ne peuvent ignorer que leur discours satisfait des passions obscures, qu’il coïncide avec des frustrations exploitables politiquement.

Comment la gauche va-t-elle perdre en 2017 ?

Très simple, évidemment. Il suffit de multiplier les candidatures au premier tour de l’élection présidentielle. La situation est loin d’être stabilisée. Mais un premier candidat s’est déclaré : Jean-Luc Mélenchon. Il est actuellement crédité de 11 à 12% des intentions de vote et certains sondages le placent même avant François Hollande. Les écologistes tentent de convaincre Nicolas Hulot d’être leur porte-drapeau. Si ils y parviennent, le charismatique animateur pourrait obtenir des suffrages dépassant largement les frontières de l’écologie politique, en particulier ceux de beaucoup de déçus de François Hollande. Bien sûr, les candidatures trotskystes habituelles ne sont pas totalement à exclure, même si l’obstacle des 500 parrainages est désormais plus difficile à franchir. Les noms de tous les élus présentant un candidat seront en effet immédiatement rendus publics.

Le Parti communiste n’a pas arrêté sa position. Il dispose encore d’un socle important d’élus locaux qui ne peuvent être reconduits que par une alliance avec le Parti socialiste. Alors que Jean-Luc Mélenchon se voit déjà comme le porte-parole de la France insoumise, Pierre Laurent ne rêve que d’une union de la gauche qui lui permettrait de ne pas sombrer totalement. D’où la volonté des communistes de désigner un candidat par des primaires de gauche.

L’atomisation de la gauche semble donc sur la bonne voie. Les chances de François Hollande de figurer au second tour sont inversement proportionnelles au degré d’atomisation.

« Hollande, le traître »

La rupture entre la gauche sociale-démocrate ou sociale-libérale et la gauche traditionnelle est désormais complète. Il ne peut y avoir de réconciliation. Les sociaux-démocrates veulent gouverner en composant avec le capitalisme. Ils acceptent le marché, aux côtés d’un État-providence surpuissant. La politique est pour eux l’art du compromis. La gauche archaïque reste, au contraire, sur une thématique de lutte des classes. Elle est anticapitaliste, hostile à l’économie de marché. Elle veut représenter les laissés-pour-compte de la mondialisation, ouvriers, employés et même indépendants maltraités par l’ouverture des frontières et la concurrence planétaire. Autant dire qu’elle représente ceux qui vont disparaître. Mais pour un politicien, le malheur des hommes n’est pas à dédaigner. Il peut aussi conduire à un poste d’élu.

La frontière entre gauche réformiste et gauche de rupture passe à l’intérieur du Parti socialiste. C’est le drame de François Hollande. Les fameux frondeurs n’ont pas pardonné au Président de la République d’avoir été élu sur une ambiguïté. Son programme écrit n’était pas révolutionnaire, loin s’en faut, mais ses discours de second tour en 2012 visaient à récupérer l’électorat mélenchonien. D’où les incantations du type « mon ennemi, c’est la finance ! ». On sait que le jeune François Hollande a fait partie du cabinet de François Mitterrand en 1981. Il a certainement beaucoup appris de ce politicien madré qui aimait reprendre la phrase du cardinal de Retz selon laquelle en politique « on ne sort de l’ambiguïté qu’à son détriment ». Mais le flou artistique dans lequel se complaisait Mitterrand pour mieux circonvenir opposants et alliés est devenu une pénible équivoque chez Hollande. Les mensonges de Mitterrand pouvaient encore passer entre 1981 et 1988 car il pouvait endetter lourdement le pays pour faire illusion. Les mensonges de François Hollande ne sont plus acceptés entre 2012 et 2017 car il n’a ni le charisme ni la capacité d’endettement de Mitterrand. Nombre de ses électeurs le considèrent donc comme un traître à la cause de la gauche.

Une vieille histoire

La lutte entre les deux gauches se manifeste aujourd’hui socialement par des grèves à répétition et des manifestations qui ne concernent qu’une petite minorité de salariés. La capacité de nuisance des organisations syndicales ou politiques qui accompagnent ces mouvements est mise, objectivement, au service de la droite. Affaiblir par tous les moyens les sociaux-démocrates de gouvernement permet d’espérer une clarification en 2017 avec l’élection d’un candidat Les Républicains. L’ennemi sera au pouvoir et toutes les batailles seront alors légitimes. Par hypothèse.

Les communistes ont toujours été de fervents partisans des grèves politiques. L’extrême-gauche actuelle n’innove donc pas. En considérant Hollande comme un traître à la cause sacrée de la lutte de classes, elle reste également dans le conformisme. Les communistes de jadis qualifiaient volontiers les socialistes de sociaux-traîtres. Ce vocabulaire guerrier et plein de candeur devient inéluctable lorsque l’idéologie s’empare des esprits. Il faut être avec ou contre les camarades. Pas de subtilités.

 

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  • La gauche par sa division va surtout réussir à faire perdre les citoyens, de même que la multiplication des candidats hors système clamant vouloir remettre le citoyen au centre de la politique. Pourtant la solution existe et elle est simple. Il faut juste changer le mode de scrutin et c’est ce que je propose sur laprimaire.org

  • Et à droite c’est mieux ????
    Elle ressemble à la gauche coté panier de crabes ….

    • Côté idées et actes, elle est aussi voire plus socialiste que le PS.

      • Tout à fait ce sont des socialistes déguisés en mecs de droite. Aucun politicien de droite n’est jamais revenu sur le moindre « progrès » apporté par les socialistes, même ceux dont tout le monde s’accorde à gauche comme à droite pour dire qu’ils sont catastrophiques, comme le collège unique par exemple.

  • ils veulent faire perdre la gauche..mais , elle ne peut pas perdre , il n’y a que des candidats de gauche en alternance en France…disons quelle va permettre à la gauche officielle de consommer ce qu’elle a arraché aux français. ce qui compte n’est pas le pouvoir mais ce que permet de distribuer le pouvoir : des places en or….ils ont même trouvé un job à Jospin , pitoyable.

  • Une analyse intéressante mais qui ne développe pas suffisamment les étapes de l’évolution de l’extrême qui a débouché sur un discours de plus en plus radical s’éloignant de tout accord possible pour reconstruire un projet de gouvernement avec le PS. Cette évolution a commencé à l’époque du programme commun quand les dirigeants communistes n’ont pas accepté la montée de l’influence du PS qui avait réussi à grignoter l’électorat communiste. Ensuite, plusieurs étapes se sont succédées notamment quand la gauche prenait le pouvoir, caractérisées par la sortie des communistes du gouvernement dans l’espoir de reconquérir les déçus du socialisme. Une stratégie caméléon qui a conduit le PC au désastre électoral que l’on sait s’ajoutant à la faillite du socialisme soviétique qui servait de modèle. De nos jours, l’influence du PC est devenue si faible qu’elle se mesure à celle des trotskistes. L’accord avec Mélanchon a permis pour un temps de phagocyter l’électorat des trotskistes surtout celui du « facteur » et de son parti anticapitaliste qui connu durant quelques temps un certains succès. Mais en s’alliant avec l’ex trotskiste Mélanchon, les communistes ont fait entrer le coucou dans le nid permettant au Parti de gauche de gagner en notoriété dans l’électorat communiste. Cette situation est devenue inacceptable pour les communistes d’autant qu’en épousant la stratégie anti PS de Mélanchon, ils ont perdu beaucoup d’élus locaux. Le Front de gauche n’est plus qu’un radeau en perdition. Cette bagarre d’influence entre les différents courants de l’extrême gauche se retrouve entre syndicats révolutionnaires : CGT, SUD…. C’est à celui qui sera le plus radical pour attirer ce qui reste de la masse des anticapitalistes de toute horizon y compris ceux provenant de la mouvance de l’écologie politique quitte à épouser leur discours pseudoscientifique. Faute d’avoir des alliés susceptibles d’accepter une nouvelle expérience type programme commun, le PS est condamné à l’échec s’il ne cherche pas une autre forme d’alliance avec le centre. Pour cela, le PS a trouvé le sous-marin Macron. Le pari est difficile, car le centre n’a peut-être pas l’intention de s’allier à un PS dont le chef spirituel qui loge à l’Elysée est au plus bas des sondages. Pour les centriste, une autre alliance plus rentable s’offre avec la candidature de Juppé sauf s’il est devancé au dernier moment par un coup de force de Sarko. Et c’est peut-être ce qu’espère Macron et ses partisans. Le jeu d’échecs continue….

  • N’oubliez pas de rajouter le fn du côté de la gauche archaïque. L’interview de Florent philippot sur rtl ce matin suffit à convaincre que ce parti n’est pas du tout à sa place sur l’échiquier politique officiel. 🙂

  • C’est bien ce que je pensais.

  • En France, la gauche radicale est en phase de déclin, accompagnant la chute de la gauche socialiste. Depuis 2012, elle a multiplié les interventions dans les domaines politiques, sociaux et culturels. Dans la note « La gauche radicale : liens, lieux et luttes (2012-2017) », Sylvain Boulouque analyse les forces politiques, sociales et électorales d’une gauche radicale morcelée en différents courants et en différentes orientations, montrant ses domaines et ses champs d’intervention réguliers, ainsi que son influence et de son audience. Retrouvez la vidéo de son analyse sur le site de la Fondation pour l’innovation politique : http://goo.gl/rSSXl3

  • Petite précision, utile peut-être, quant à la phrase suivante, figurant dans l’article :

    « La gauche archaïque reste, au contraire, sur une thématique de lutte des classes.  »

    Sans vouloir en aucun cas faire dire à l’auteur ce qu’il n’a pas dit, que ce soit tout de même ici l’occasion de faire un rappel corrigeant l’assertion trop souvent étalée selon laquelle « La lutte des classes, c’est un truc marxiste » (pour faire simple). On trouve en effet cette notion clairement développée sous la plume d’économistes dit classiques (Adam Smith…), antérieurs à Karl Marx, lequel n’en revendiquait du reste pas la paternité ; il l’a très explicitement reconnu.

    L’apport (sic!) marxiste a plutôt consisté a faire, en gros, de cette lutte des classe le moteur général d’une histoire devant finalement déboucher sur une société sans classes… avec des ruisseaux de miel et de lait et tout et tout, avec en prime la disparition de l’Etat par dessus-le marché !

    Sans chercher à geler le débat par l’emploi de termes « clivants », comme on dit, il devrait ainsi être permis de reconnaître à la fois que « la lutte des classe est une triste réalité » (Georges Marchais, dans le texte !!!), que ceci est un des aspects, important, des rapports sociaux, mais non le seul. Que tout ne s’y résume pas.

    Mais ça existe quand même…

    Mais ce n’est pas tout…

    Bis repetita…

  • Le titre de l’article ne devrait-il pas plutôt être : Hollande peut faire perdre la gauche (en l’ayant complètement décrédibilisée) ?

    Attention je note une petite erreur chronologique, dans « Son programme écrit n’était pas révolutionnaire, loin s’en faut, mais ses discours de second tour en 2012 visaient à récupérer l’électorat mélenchonien. » Le discours du Bourget n’était pas au second tour, mais le 22 janvier 2012, donc avant le premier tour, lorsque Mélechon a grimpé dans les sondages, est devenu gênant et que Hollande a compris qu’il fallait qu’il gauchise son discours.

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