Par Théophile Gacogne.
Depuis son lancement en Australie et en Nouvelle Zélande le 5 Juillet dernier, Pokémon Go a bousculé la planète entière. Du fin fond du Missouri aux mégalopoles asiatiques, en passant par les villes de provinces de notre douce France, par les clubs endiablés d’Ibiza, ou par la place Rouge de Moscou, le phénomène s’est propagé plus vite que le plus contagieux des virus, et a infecté tous les âges, toutes les cultures, tous les genres, et toutes les catégories d’individus.
Petite anecdote du jour à ce propos : le magazine Forbes a publié les résultats d’une étude effectuée par SurveyMonkey, entreprise spécialiste des sondages et du traitement d’informations liées aux application mobiles, à propos des utilisateurs de Pokémon Go. L’entreprise a décrété que le joueur type de Pokémon Go était une femme blanche de 25 ans, diplômée de l’enseignement supérieur, gagnant 90 000 dollars par an. John Hanke, CEO de la firme Niantic qui a lancé le jeu le plus populaire de l’Histoire, a répondu qu’il n’était ni en mesure d’appuyer cette information, ni de la réfuter, en indiquant que son entreprise ne disposait pas de ce genre d’informations à propos des joueurs, et donc que SurveyMonkey avait dû se baser sur des données provenant d’un ou plusieurs organismes tiers pour arriver à ces résultats. John Hanke avoue volontiers qu’il aimerait beaucoup découvrir si ce profil de joueur type est bien réel.
Les allumés de la Pokéball
Parmi ces millions de joueurs (et joueuses), on trouve des dresseurs débutants et un peu timides, qui se connectent au jeu une ou deux fois par semaine, quand ils y pensent, et qui se contentent de chasser les Pokémons les plus banals comme les Roucool ou les Rattata qui pullulent un peu partout. Mais il existe également, comme c’était à prévoir, des hardcore-gamers, des chasseurs pros, des allumés de la Pokéball, des fanatiques du Pokédex, qui passent des heures quotidiennement à la recherche du Pokémon le plus rare, tout en sur-entraînant leur équipe de bestioles afin de prendre le contrôle de toutes les arènes de leur région avec elle. Ces derniers sont prêts à tout pour tous les attraper. Et prêt à tout, cela passe entre autres par un équipement adapté.
Si on laisse de côté les artifices comme la casquette de dresseur ou les chaussures qui courent vite, on se retrouve avec le seul et unique outil indispensable à la chasse aux créatures de Satoshi Tajiri (oui, c’est le nom du créateur de la franchise Pokémon. Souvenez vous-en, vous pourrez le ressortir en dîner de famille) : c’est bien évidemment le Smartphone.
Et si possible, un autonome ! Car en effet, on le rappelle pour ceux et celles d’entre vous qui vivent dans une cabane en haut d’un arbre et qui ne l’ont donc pas encore testé : Pokémon Go, en plus d’être l’application la plus téléchargée au monde en un mois après sa sortie d’après le Guinness des records, est également une des applications les plus gourmandes en énergie. Ça, ce n’est pas le Guinness qui le dit, mais les utilisateurs eux mêmes.
Mais pourquoi cette application est-elle si énergivore ? me demanderez-vous. Eh bien la réponse est simple, Pokémon Go utilise :
- L’écran du smartphone qui doit être allumé pendant la totalité de la période de jeu.
- Le GPS, sollicité afin de reproduire la carte de votre quartier, pouvoir y évoluer et y trouver des Pikachu, Salamèche, et autres Bulbizarre.
- Le gyroscope, qui va permettre d’afficher votre orientation géographique en temps réel.
- La connexion internet, indispensable pour se connecter au réseau qui vous laissera découvrir où sont cachées les bestioles que vous voulez apprivoiser.
- L’APN ( comprenez Appareil Photographique Numérique), sûrement le plus gourmand en énergie de tous les points cités, qui vous permettra de visualiser les créatures dans votre environnement en utilisant le concept de la réalité augmentée.
Des téléphones de dresseurs à plat, des joueurs fous de rage d’avoir raté le Ronflex sauvage de leur vie, et des pokémons qui s’enfuient gambadant dans la nature. Pour éviter cela, plusieurs solutions (combinables) :
- acheter un smartphone à l’autonomie plus raisonnable que la moyenne : un Samsung Galaxy S7 Edge par exemple, ou un Huawei Mate 8, qui font partie des appareils aux batteries les plus résistantes. Notez que le Sony Xperia Z3 Compact ne se défend pas mal non plus. Reste le iPhone SE pour les inconditionnels, dont l’autonomie, qui a beau être la meilleure de la famille Apple, est un cran au dessous, il faut bien le dire.
- Activer le mode économie de batterie sur le téléphone, mais également dans les réglages du jeu lui même, ce qui aura pour effet de ne plus utiliser l’appareil photo, de limiter l’utilisation du GPS, et autres. Vous pouvez en profiter pour enlever les effets sonores, les vibrations, et la musique. Notez cependant que l’expérience Pokémon Go sera évidement affectée par ces réglages supposés vous laisser jouer plus longtemps.
- Investissez dans une batterie externe. Solution qui parait relativement évidente lorsque vous avez BESOIN de rallonger la durée d’utilisation de votre smartphone, quel qu’il soit. Certaines batteries externes et autres accumulateurs sont relativement bon marché, et les fabricants proposent des modèles de plus en plus petits.
Vous aussi vous avez craqué pour une batterie externe pour continuer votre chasse ?
Si c’est le cas, n’ayez pas honte, vous êtes (très) loin d’être le seul, comme en atteste par exemple ce reportage de la chaine RTBF, qui nous montre le réassort du rayon accessoires pour smartphones dans une célèbre chaîne de magasins d’électronique en Belgique, et se faisant depuis peu quotidiennement dévaliser par des chasseurs de Pokémons qui vident l’espace destiné aux fameuses batteries.
Le journal Le Monde nous explique également que plusieurs noms de la grande distribution ont recensé des augmentations de ventes de PowerBanks jamais égalées auparavant. Julien Boyer, chef de produit chez Boulanger, a confié aux journalistes du Monde que l’enseigne avait enregistré, juste après le lancement de Pokémon Go, des augmentations de 130% la première semaine, et de 150% la deuxième semaine, comparé à la même période l’année dernière. La marque a évidemment mis en avant ses batteries externes sur les têtes de gondoles et aux entrées de ses magasins pour profiter au maximum de l’effet Pokémon. LDLC, autre grand acteur du secteur de l’électronique, a également évoqué une « accélération des ventes de batteries externes probablement liée au phénomène Pokemon Go »
D’autres grandes surfaces ont elles aussi sauté sur l’occasion pour faire le buzz. La chaîne Monoprix par exemple, a organisé des distributions de Kits de dresseurs dans ses magasins, contenant une barre énergétique, de la crème solaire, des pansements pour les ampoules, un brumisateur et une batterie externe. L’opération fut un tel succès qu’elle fut réitérée peu de temps après son lancement.
Une autre entreprise spécialiste des études de marché, NPD Group, a publié un article indiquant que son service de Tracking hebdomadaire de distribution avait recensé une augmentation de 101% des ventes de batteries externes pour téléphones portables et tablettes sur les deux semaines ayant suivi la sortie du jeu de Niantic par rapport à la même période l’année précédente, alors que les chiffres sur les six semaines avant le lancement du jeu n’était supérieur que de 4% à ceux de l’année dernière. NPD Group établit donc une relation certaine entre l’arrivée du Pikachu, et les ventes de PowerBanks.
Les ventes de ces batteries externes ont donc explosé au niveau international grâce à la folie déclenchée par les bestioles de Niantic et Nintendo. Les entreprises qui ont su anticiper ou réagir assez rapidement s’en lèchent aujourd’hui déjà les doigts, et vont continuer à le faire pendant encore un bon moment avant de sentir la vague redescendre.
En plus des fabricants et distributeurs d’accessoires comme les Power Banks, des entreprises liées de manière moins évidente à la franchise de Nintendo font aussi leur beurre sur cette histoire. Par exemple, les actions marketing en relations avec Pokémon Go prennent une ampleur considérable grâce aux différents réseaux sociaux qui les véhiculent, ce qui permet à des boîtes un peu malignes et inventives de surfer sur la vague pour développer leur image de marque, appuyer leur présence sur tel ou tel marché, augmenter l’effet de leur communication sur différents canaux, ou encore s’affirmer en tant qu’acteur dans des secteurs d’habitude difficiles à pénétrer.
Il va bientôt falloir inventer un terme pour parler du marketing utilisant Pokémon comme cheval de Troie. Markémon ? Pokéting ? Si cela entre dans les mÅ“urs, vous l’aurez lu ici en premier.
C’est une sorte de chasse au trésor qui passionne les jeunes et moins jeunes par sa nouveauté et son concept. Il a des avantages car il fait sortir de chez soi et visiter les villes, il se partage entre amis, grand-parents et petits-enfants….
Mais le soufflé va retomber aussi vite quand la majorité des joueurs auront repris l’école, le travail, et auront capturé une majorité de pokémons.
En attendant, on s’amuse … et sans faire de dépenses.
La croissance n’est pas infinie dans un monde fini. LOL.