Par Éric Verhaeghe.
En apparence, les annonces du gouvernement en faveur des entrepreneurs, qui inaugurent la saison fiscale ce vendredi, sont une bonne nouvelle. Il faut toutefois les replacer dans leur contexte global et mesurer ce que les entreprises vont perdre dans les prochains mois.
Une saison fiscale décevante pour l’IS, moins pour le CICE
Ce vendredi, Michel Sapin a annoncé une baisse de l’impôt sur les sociétés et une augmentation du crédit d’impôt compétitivité entreprise (CICE).
Dans la pratique, l’IS devrait baisser à 28% pour les PME jusqu’à 75 000€ de bénéfices. Cette mesure semblera très modeste pour 2017. Le gouvernement prévoit une extension progressive de la mesure à l’ensemble des entreprises et des bénéfices… en 2020. Le délai laisse songeur car, en l’état, rien ne prouve que la majorité actuelle sera confirmée en 2017. Bien au contraire.
Le CICE passera à 7% en 2017, soit un surcoût de 3,3 milliards €.
Les mesures qui disparaissent dans la saison fiscale
Parallèlement à ces encouragements fiscaux, les entrepreneurs n’oublieront pas les mesures qui sont conséquemment passées à la trappe. En particulier, l’augmentation du CICE se substitue aux autres mesures annoncées dans le cadre du pacte de responsabilité, comme la suppression de la C3S.
En soi, rappelons-le, la suppression de la C3S n’était pas une bonne nouvelle. Cette contribution est supposée équilibrer le RSI. Sa suppression entraînerait automatiquement la fusion du RSI avec le régime général, là où la fin du monopole du RSI sur la protection sociale des chefs d’entreprise est préférable. Il n’en reste pas moins que ces annonces apportent un bien-être à relativiser par rapport aux annonces initiales.
Le débat sur le prélèvement à la source fait rage
Les entreprises gagneraient aussi à se préoccuper de façon encore plus tenace du prélèvement à la source. Dans la pratique, elles vont, sans compensation, se substituer à l’État pour collecter un impôt difficile à comprendre. Le prélèvement à la source ne dispensera pas le salarié d’une déclaration annuelle de revenus, et l’élasticité à la baisse des montants est loin d’être acquise.
Dans la pratique, l’État prépare donc l’externalisation partielle de l’une de ses missions auprès des entreprises, avec quelques objectifs simples. En particulier, c’est le chef d’entreprise qui sera désormais le premier à expliquer les baisses de rémunération dues à des variations fiscales, comme ils avaient dû expliquer les baisses de rémunération lors de la refiscalisation des heures supplémentaires.
On notera que la CGPME s’investit dans ce dossier.
Les patrons en ont ras-le-bol de la fiscalité…
Toutes ces annonces interviennent dans un cadre où l’impôt est fortement remis en cause par les entrepreneurs. Un baromètre Fiducial a permis de la vérifier. 81% des petits patrons français jugent la fiscalité inéquitable, et 68% la jugent confiscatoire. 83% d’entre eux sont convaincus qu’aucune baisse véritable d’impôt n’interviendra en 2017. Ces quelques chiffres prouvent bien toute la désillusion qui frappe les entrepreneurs et toute la rupture qui sépare de plus en plus les entreprises et la société française.
… que plus personne ne comprend
Au passage, les questions fiscales sont loin d’avoir livré tous leurs secrets. Un rapport de la commission européenne révèle cette semaine que les Etats membres n’ont pas collecté 14% de la TVA qui leur revenait (160 milliards d’euros en tout). Cette différence ne tient pas seulement à la fraude. Elle est aussi due aux faillites, à l’évasion fiscale et aux erreurs de calcul. La France se situe dans la moyenne européenne.
Bref, la perte de TVA illustre le vieillissement de notre fiscalité et son inadaptation à la réalité de l’appareil économique.
Le « deux poids-deux mesures » fiscal
Accessoirement, la polémique a continué sur la fiscalité des entreprises transnationales dont Apple constitue désormais la caricature. L’Irlande a interjeté un appel contre le redressement de 13 milliards d’euros décidé par la Commission Européenne. Cet étrange conflit nourrit l’idée que la fiscalité applicable aux petites entreprises ne peut être aussi clémente que la fiscalité applicable aux mastodontes américains. Ces circonstances ne favorisent pas le consentement à l’impôt.
La production industrielle en baisse
Dans ce grand désordre fiscal, l’activité économique continue à être chaotique. Au mois de juillet, la production manufacturière a diminué de 0,3%, après un mauvais mois de juin où elle avait baissé de 1,1%. Ces indicateurs confirment la mauvaise santé du pays et laissent planer un doute sur la capacité de l’économie française à retrouver le chemin de la croissance.
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Et le plus drole avec les impots recoltés par les entreprises, c’est qu’il n’y aura aucune économie faite sur les ressources de l’Etat qui, elles n’auront plus à collecter cet impots !
C’est comme la décentralisation : on devrait avoir des vases communicant…. eh bien non, au final, le contribuable continue à payer autant à l’état et plus aux collectivités !
Masi les français sont content de leur système qui est envié partout dans le monde sans que jamais on le copie ! Mais ça, ce sont les autres qui sont cons ! pas eux !
@ jeff
Vous avez raison, dans votre raisonnement!
Attendons cependant le passage à la pratique! Il y a beaucoup de chances pour que ce changement de système comporte son lot d’erreurs, de modifications, de nouvelles réglementations, d’ajustements, d’imprévus etc … et de pertes financières!
Cela fonctionne bien dans quasi tous les autres pays européens où ça existe depuis longtemps.
Il est clair que quand j’ai vu ma fiche de paye lors des 3 années travaillées comme salarié, en France (je ne suis pas « Français »), je n’ai pas compris grand chose! Le nombre de lignes faisait plus d’une page A4!
Mais comme souvent, dans votre pays, il y a un « complot politico-administratif » qui fait que plus la « loi » est compliquée, plus il faut de fonctionnaires !!! (Et chaque fonctionnaire, c’est une voix!)
Je rêve d’un ministère de « l’abrogation des lois et règlements désuets, de la simplification administrative et de l’informatisation des services »: le but serait de simplifier la vie à tout le monde tout en réduisant le « train de vie de l’état ».
Je suis persuadé que si Fr. Hollande avait commencé par là, il aurait alors légitimement demandé un effort aux Français qui l’auraient mieux accepté: c’est le contraire qui s’est passé! Vous n’avez pas de chance!
Les prélèvements étatiques abusifs sur nos entreprises constituent la principale cause du déclin économique de la France.
En voulant jouer petit bras et clientéliste, la CGPME a plombé toute véritable réforme et permis au gouvernement de s’engouffrer dans la brèche