Fraude dans les transports : et si on cherchait les causes ?

Plutôt que de punir les fraudeurs, ce qui doit évidemment être fait, il est important de se poser la question de l’origine de cette fraude. Moderniser le secteur à l’aide de la concurrence serait une solution.

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Ticket de métro By: eurok - CC BY 2.0

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Fraude dans les transports : et si on cherchait les causes ?

Publié le 26 septembre 2016
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Par Aurélien Véron.

Qui a déjà vu un autobus se vider comme une baignoire à un feu rouge à quelques dizaines de mètres du terminus ? Je l’ai vécu, emporté un jour par le flot des passagers abandonnant leur bus — ligne 602 — en revenant de Montfermeil à l’approche de la gare du Raincy Villemombre Montfermeil.

La personne qui m’accompagnait m’a expliqué en toute simplicité que c’était normal, juste pour éviter de tomber sur des contrôleurs à l’arrêt suivant, le dernier de la ligne. J’étais manifestement le seul à être en règle pour le trajet.

C’était il y a quelques années. La situation n’a pas dû s’améliorer depuis lors. Cette fraude représenterait un manque à gagner quotidien d’un million d’euros – estimation basse — selon la Cour des comptes.

 

Pour empêcher la fraude : punir, encore et toujours

Avec un taux de fraude de 8,9 % en 2008, les Franciliens resquillaient déjà largement plus que la moyenne (3,1 %) des grandes capitales occidentales (1 % à Londres, 1,9 % à Bruxelles, 2,18 % à New York). Pour nos dirigeants politiques, il suffit de dégainer l’arme de la répression. Dans un pays tétanisé par le changement et englué dans des monopoles archaïques, cette réponse simpliste est nettement plus tentante que de se pencher sur les causes de ce taux anormalement élevé.

D’autant que la collectivisation des transports constitue le Nirvana pour ces politiques qui ne cessent de brocarder le transport individuel motorisé : asocial, égoïste, donc pollueur et par conséquent capitaliste. Insulte suprême, même si le rachat des péchés est possible : voiture partagée, faute à moitié pardonnée.

Certains d’entre eux font des efforts pour se rapprocher de la plèbe, n’hésitant pas à quitter chauffeurs et taxis pour se plonger en immersion dans les transports en commun, voire même à prendre tous les matins le train le temps d’une campagne électorale. D’autres nous racontent carrément leur moment de grâce dans les transports collectifs. Je suis ému… et presque reconnaissant de les voir partager même un court instant le quotidien de millions de Franciliens.

Mais tous n’ont pas ce tact. Le primesautier Jacques Chirac n’avait pas hésité en son temps à montrer un autre exemple en sautant par-dessus le portique. Immortalisé par la photo célèbre qui lui avait valu un joli titre du Nouvel Obs : « La France qui triche ». Le citoyen qui subit le RER tous les matins enjambe les SDF dans des couloirs insalubres en espérant ne pas souffrir un retard fréquent inexpliqué… lorsqu’il n’y a pas de grève.

 

Un prix low cost, un service low cost

Par ailleurs, le prix trop faible du passe Navigo ne procure pas au STIF les moyens nécessaires pour assurer un service convenable. Ses 70 euros mensuels représentent un peu plus du quart de son coût réel de fonctionnement (contre 60 % à la charge des entreprises).

Tandis qu’à Londres, les passagers en payent plus de la moitié, ce qui explique pourquoi l’abonnement couvrant la distance maximale coûte plus de 400 euros par mois. À Berlin, l’abonnement mensuel de 97 euros en représente presque la moitié, et les 91 euros à Madrid, 41 %. En France, les camarades-citoyens contraints de recourir aux transports collectifs sont presque pris en otage de cette idéologie du tout-low cost.

Hors de Paris, l’absence de marché concurrentiel des transports collectifs permet à nos planificateurs de s’abstraire des besoins réels des gens. Normal, ce ne sont pas des consommateurs mais des usagers. Les premiers sont l’objet de toutes les attentions pour être fidélisés, les seconds sont captifs. Ce traitement n’incite pas à payer ce qui ressemble davantage à une taxe de plus qu’à un billet correspondant à des services de qualité (il est d’ailleurs tentant de parler non pas de services mais de sévices publics).

L’insécurité, la foule d’incivilités rarement sanctionnées, l’absence criante d’hygiène et l’inconfort général ne renforcent pas non plus le consentement participatif des usagers. Heureusement que l’immense majorité d’entre eux continue à payer son passe Navigo (surtout si l’employeur prend la moitié à sa charge). Que faire des autres ? L’approche répressive substitue la peur du bâton à l’éthique et à la satisfaction du passager.

 

Quelles solutions pour faire baisser la fraude ?

  • Rétablir la vérité sur le prix du trajet

Les solutions durables vont à l’opposé du chemin emprunté jusqu’ici. La qualité attendue a un prix. D’une part, nous devons rétablir la vérité sur le prix du trajet en ajustant le passe Navigo en fonction de son usage réel, distance parcourue et densité de l’offre disponible localement. Sa revalorisation significative seule peut offrir au STIF les ressources nécessaires à l’amélioration de tous les aspects de son service. C’est la condition nécessaire pour faire remonter la satisfaction et donc le sentiment d’en avoir pour son argent des utilisateurs de ces transports. L’argent va être d’autant plus utile que les nouvelles lignes du Grand Paris promettent d’accroître considérablement le coût de fonctionnement et d’entretien du réseau dans son ensemble.

  • Ubériser le marché des transports

D’autre part, ubérisons le marché des transports en commun en l’ouvrant à une concurrence libre. Un cadre libre verrait les jeunes entrepreneurs du secteur des transports se lancer pour proposer une multitude de transports collectifs agiles, adaptés aux besoins des habitants de banlieue : taxis collectifs, navettes de ville à ville, express… Nous deviendrions tous des clients, enfin heureux de payer pour un service digne de ce nom.

La question n’est pas de savoir s’il faut sanctionner les fraudeurs : punir les passagers clandestins relève de l’évidence. Mais la réponse la plus efficace pour réduire la fraude ne viendra pas de la répression aveugle d’usagers déjà suffisamment méprisés et maltraités. La triche reculera avec la modernisation et l’ouverture du secteur des transports collectifs de proximité à une concurrence vivifiante.

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  • Entièrement d’accord….

    Une récente campagne vante les nouvelles armes de dissuasion…. On peut faire jusqu’à 6 mois de prison si on resquille… Du grand n’importe quoi…

  • « D’une part, nous devons rétablir la vérité sur le prix du trajet en ajustant le Pass Navigo en fonction de son usage réel, distance parcourue et densité de l’offre disponible localement. ».

    Quel rapport avec la fraude et surtout par quel rapport causal l’auteur envisage-t-il que de mettre le prix du billet à un prix plus élevé (car plus proche du coût réel) va réduire la fraude qui sévit déjà avec un coût de billet bien plus bas?

    http://4.bp.blogspot.com/-Rv7SO0CIQpc/USCqaoeRASI/AAAAAAAABpI/JiqfiIc8Ok8/s1600/then_a_miracle_occurs.jpg

    • 1/ Celui qui a les moyens de payer n’a aucune envie d’utiliser ces transports à bestiaux. Mathématiquement, cela augmente le taux de fraude.

      2/ Vu le racket des impôts qui servent à financer ces transports à bestiaux, celui qui les utilise se dit peut-être qu’il paie déjà bien assez son ticket.

      3/ Il serait intéressant de voir où part le pognon. Parce que je doute que les transports londoniens bénéficient d’une enveloppe de fonctionnement vraiment très supérieure aux parisiens et pourtant qui a pris l’un et l’autre … comprendras rapidement mon propos …

  • un autre axe d’amélioration est de dissuader la fraude. Améliorer les mécanismes de paiement. Ne pas entrer et sortir des transports en commun comme dans un moulin… Frauder doit être difficile et risqué. et c’est tout le contraire que l’on observe.

  • C’est fort possible. Mais à l’inverse, un prix plus élevé génèrera un risque de fraude accru. D’où deux questions ? Qui s’occupera de la police des transports ? Les sociétés privées, courant le risque d’un déséquilibre financier, n’augmenteront-elles pas la dissuasion répressive ?

  • Je vais comparer les métros de Paris et Londres que je connais bien.

    Oui le métro de Londres est très cher comparé à celui de Paris mais c’est propre, les métros sont à l’heure (en grande majorité), les personnes qui y travaillent sont super aimables et t’aident de manière spontanée sans tirer la gueule, les entrées / sorties sont à portes battantes et non les merdes de tripodes dont Paris raffole, quand il y a des escaliers il y a aussi presque systématiquement des escalators ou des ascenseurs…

    Ah j’allais oublier : dans le métro de Londres je me sens en sécurité ce qui n’est pas du tout le cas à Paris.

    C’est peut être pour tout ça que les Londoniens resquillent beaucoup moins malgré le fait que le métro soit beaucoup plus cher.

    A méditer!!!

  • Selon moi, la fraude relève d’un non respect des infrastructures publique, et devrait être sanctionnées par des travaux d’intérêts généraux pour les fraudeurs récidiviste.
    (Nettoyer le métro, effacer les tags…)

    Les agents des transports devrait être des policiers, et les agents actuel les surveillants des T.I.Giste.

    Ainsi remonterait la satisfaction et le sentiment d’en avoir pour son argent.

    Voir des braves gens frotter le sol du métro dissuaderai bon nombre d’entre nous d’imiter Jacques Chirac.

    Et les navettes en Ile-de-France me paraîsse être une très bonne idée même si étant chauffeur de taxi il y a encore peut de temps, je sais mieux que beaucoup que l’uberisation d’un service rend le travail de plus en plus pénible et coûteux. Non pas pour le concurrencé qui peut réagir en améliorant la qualité de son service. Mais pour le concurrent lui même qui devrat constamment baisser c’est prix et subir la loi de son grand chef qui depuis un siege lointain lui ordonnera de travailler pour toujours moins chères …. Mais il me semble que Keolis aurait racheté la société LeCab donc il n’est pas impossible de voir très rapidement ce type de transport se développer dans les prochains mois.

  • C’est un peu fort de demander aux contribuables de proposer des solutions à la fraude : aux gestionnaires de proposer un plan anti-fraude, et s’ils n’atteignent pas les objectifs, ils sont virés avec interdiction de gérer un établissement public pendant 20 ans.
    Et aussi, bien sûr, obligation aux élus et gestionnaires de moyens de transport collectifs d’utiliser ceux-ci pour tous leurs déplacements professionnels.

  • En tant qu’entrepreneur je veux bien me lancer dans ce type de projets si il y a d’autres gens ici mais j’ai l’impression que
    1/ ça va etre très très compliqué avec le monopole de la RATP.
    2/ Je ne suis pas sur qu’on arrive à trouver un business model rentable.

    Uber permet de simuler une bonne base, il est à moins d’un euro le kilomètre. Je trouve cela peut cher pour faire du bénéfice et trop cher pour une utilisation quotidienne… Si certains veulent m’éclairer.

    P.S encore aujourd’hui, je me suis fais contrôler dans le RER A, la majorité était en règle, mais comment souvent, un individu va monopoliser les services de la RATP pendant plusieurs stations en faisant son rebelle. La dernière fois, il s’est plaint que la RATP lui avait fait louper sa correspondance et ça c’est terminé avec l’intervention de la police. Ils sont beaux les enfants gatés de la république.

  • Comment trucider un CGTiste? Lui faire lire cet article! 🙂

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