Comment expliquer l’échec de l’industrie française ?

Notre secteur industriel est à la peine, et il est urgent de le reconstituer. Allons-nous le faire en choisissant le libéralisme, ou bien allons-nous opter pour le colbertisme ?

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Comment expliquer l’échec de l’industrie française ?

Publié le 12 octobre 2016
- A +

Par Claude Sicard.
Un article d’Emploi 2017

Les vraies causes du déclin industriel françaisDans un précédent article, nous avons décrit la débâcle française en matière industrielle. Comment expliquer tous ces échecs ?

La réponse à cette interrogation nous est donnée par les travaux du chercheur américain Weston Agor1, professeur à l’université du Texas, un chercheur que les consultants français ont jusqu’ici complètement ignoré, en restant aux applications trop mécaniques des outils de l’analyse stratégique d’entreprise mis au point ces dernières années par les chercheurs de Harvard. Cet universitaire américain, qui comme beaucoup d’universitaires de son pays fait du consulting en entreprise, a démontré que la stratégie nécessite deux vertus fondamentales : intuition et créativité.

 

Les vertus nécessaires à la stratégie

Ce sont là les spécificités du cerveau droit. En faisant passer des batteries de tests aux dirigeants des entreprises américaines qui se sont prêtés à cet exercice, Weston Agor a établi une très forte corrélation entre réussite et intuition des dirigeants. Il a ainsi démontré que pour être un bon stratège il faut nécessairement être cerveau droit. Or les chefs d’entreprise français, tout particulièrement dans le domaine industriel, sont très majoritairement des cerveaux gauches ! Voilà donc la conclusion à laquelle on arrive.

Il nous faut rappeler ici les découvertes sur le fonctionnement du cerveau faites ces 30 dernières années par des chercheurs en neurophysiologie, notamment Roger W. Sperry, prix Nobel de médecine en 1981. Notre cerveau a deux hémisphères qui sont en relation, mais qui ne fonctionnent pas de la même façon. L’hémisphère gauche est le siège du langage et du raisonnement logique. Avec le cerveau gauche on fait des analyses détaillées, minutieuses et séquentielles, sans jamais parvenir à une vision globale : pour le cerveau gauche qui fonctionne en binaire, il n’y a qu’une seule façon de faire les choses.

 

La créativité du cerveau droit

Le cerveau droit, quant à lui, voit les choses globalement : il traite l’information d’une façon holistique. Il est créatif : c’est le siège de l’intuition et de l’imagination. Il explore plusieurs pistes à la fois. Avec le cerveau gauche on organise, on planifie et on va dans le détail, alors que le cerveau droit a horreur du détail, son appréhension de la totalité se faisant d’une manière instantanée. Les deux cerveaux coopèrent, mais très souvent l’un domine l’autre : c’est ainsi que le cerveau gauche étouffe la créativité.

Les artistes, les musiciens, sont tous des cerveaux droit : Mozart entendait dans l’hémisphère droit la musique qu’il allait composer avec son hémisphère gauche. Le cerveau droit permet la gestion de la complexité. Daniel Pink dans son ouvrage L’homme aux deux cerveaux paru en 2007 nous dit : « L’avenir appartient aux cerveaux droits ».

 

Résoudre les problèmes de stratégie

Dans ses missions de conseil aux entreprises, Weston Agor constituait toujours deux groupes distincts avec les interlocuteurs qu’on lui donnait pour travailler sur les problèmes de stratégie, en utilisant les tests qu’il avait mis au point : d’un côté les cerveaux gauches, et de l’autre les cerveaux droits.

Il demandait au groupe des cerveaux droits d’élaborer des propositions diverses en matière de stratégie, en donnant libre cours à leur créativité. Puis il invitait le groupe des cerveaux gauches à faire un screening dans toutes ces élucubrations avancées par le groupe précédent, afin de ne retenir que les suggestions les plus cohérentes avec les moyens de l’entreprise. Si dans un groupe de brainstorming on mélange les cerveaux droits avec les cerveaux gauches, ces derniers paralysent complètement la réflexion et stérilisent le débat.

 

Techniques plutôt que logiques

Voilà donc les constations auxquelles on parvient : avec leur sens de la logique les managers français veulent généralement gagner par la technique. C’est une grande constante chez les Français, et cette manière de procéder n’est généralement pas la bonne. Le Concorde qui était une merveille technique en est parmi bien d’autres un parfait exemple. Comme on le sait, ce fut un échec commercial et il fallut cesser de le faire voler.

Il convient donc se demander comment remédier à cette difficulté viscérale des managers français, majoritairement des cerveaux gauches, à concevoir de bonnes stratégies. Est-ce affaire de formation de notre jeunesse, est-ce dû à l’apprentissage de la langue française chez les tout jeunes enfants, une langue trop logique, ou encore est-ce affaire de génétique ? Nul ne le sait actuellement.

 

Mettre en œuvre des stratégies gagnantes pour contrer le déclin industriel français

Ce qui paraît certain, c’est que les managers italiens se révèlent être bien plus doués que leurs homologues français pour concevoir et mettre en œuvre des stratégies gagnantes, et l’on sait que depuis toujours le peuple italien est bien plus artiste que le peuple de France : à quoi cela est-il dû ? Autre constatation : les Asiatiques sont plus doués pour la stratégie que les Européens : est-ce génétique ? Ou bien est-ce leur écriture qui, avec ses idéogrammes et ses pictogrammes, suscite en permanence le recours à l’intuition pour imaginer instantanément ce que ces caractères signifient ?

On sait que le sens des sinogrammes varie selon le contexte, et certains caractères chinois peuvent représenter plus d’un morphème. Cette écriture nécessiterait une plus grande sollicitation du cerveau droit que ne le fait notre écriture. Tout cela reste à étudier.

 

Que faire ?

Dans l’immédiat, que peut-on donc faire ? Aider les chefs d’entreprise à se familiariser avec les techniques de l’analyse stratégique, des techniques très au point actuellement ? Mais les outils de l’analyse stratégique sont très délicats à mettre en œuvre, car pour être correctement utilisés ils nécessitent que l’opérateur ait recours à l’intuition, ce que les manuels ne disent jamais.

Découper les activités d’une entreprise en différents domaines d’activités stratégiques, les SBA des auteurs américains (Strategic Business Area), nécessite de l’intuition. Donner aux SBA une dimension géographique pertinente nécessite, aussi, de l’intuition. Et choisir les avantages distinctifs à adopter pour réussir dans une stratégie de différenciation nécessite, là encore, de l’intuition. S’il s’agissait, en effet, d’acheter un manuel d’analyse stratégique à 40 ou 50 euros pour faire fortune, cela se saurait.

 

Le problème de l’enseignement de l’analyse stratégique

Tous les essais qui ont été faits, y compris dans le passé par le CNPF2, pour inciter les chefs d’entreprise français à se former aux techniques de l’analyse stratégique n’ont donné aucun résultat : on ne peut pas former un chef d’entreprise aux techniques de l’analyse stratégique en un séminaire de deux jours, le recours à des consultants est très cher, et encore faudrait-il que ceux-ci soient valables.

Une action ne pouvant avoir de résultats que dans le très long terme consisterait à demander aux spécialistes des problèmes de pédagogie de mettre en place des activités permettant de développer chez nos jeunes, dans le système scolaire, le recours au cerveau droit. Mais il s’agit là d’un vœu pieux.

Nous nous trouvons donc totalement démunis pour corriger chez nos managers cette infirmité qui consiste à fonctionner essentiellement sur le cerveau gauche.

Cela pose la question de fond de savoir quel est le système économique qui finalement convient le mieux à notre pays : est-ce le libéralisme économique intégral, ou bien est-ce le système dirigiste ? S’il s’agit, avec un système libéral, de créer des milliers et des milliers d’entreprises qui seront menées à l’échec par des chefs d’entreprise incapables de développer de bonnes stratégies, sans doute vaudrait-il mieux en revenir alors au colbertisme, la puissance publique prenant les initiatives nécessaires pour orienter les entreprises et les aider à se développer.

Pour l’instant, notre secteur industriel est à la peine, et il est urgent de le reconstituer. Allons-nous le faire en choisissant le libéralisme, ou bien allons-nous opter pour le colbertisme, ce que l’ancien président de Saint-Gobain, Jean-Louis Beffa, polytechnicien et manager de l’année en 1989, recommande dans son dernier livre La France doit choisir, parlant, pour être moderne, de « néo-colbertisme » ?

  • Claude Sicard est l’auteur de Le Manager Stratège et L’audit de Stratégie (Éd Dunod)
  1. Cf. Intuition in Organisations et The Logic of intuitive decision making. (Éd. Quorum Books).
  2.  Avec notamment l’APM (Association Progrès Management).
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  • Donc le dirigisme, la fiscalité, la législation et le syndicalisme français sclérosent complètement l’industrie, l’empêchant de s’adapter et d’être compétitive, mais c’est « le cerveau gauche » des chefs d’entreprise qui est le problème ?

    Du coup, il faudrait encore plus de dirigisme ?


    Au classement de la compétitivité sur 148 pays la France est:
    -117ème pour la flexibilité.
    -134ème pour les prélèvements obligatoires.
    -130ème place pour le poids global des réglementations
    -144ème pour les règles trop strictes encadrant les licenciements.
    -137ème pour la fiscalité défavorable à l’investissement privé,
    -135ème pour la dette publique,
    -134ème pour le taux d’imposition en pourcentage des profits,
    -127ème pour les incitations fiscales à travailler
    -137ème pour les règlementations liées au fait d’entreprendre.
    -135ème pour les relations conflictuelles entre entrepreneurs et salariés

    Concorde fut l’archétype du projet d’état. Ce projet a été imaginé, piloté, financé entièrement par les apparatchiks et construit par une entreprise publique: Sud Aviation.

    Montebourg a réussi à hacker contrepoints ?

    • Et cela continue avec Airbus avec en dernière date l’échec commercial cuisant de la baleine volante dont, parait-il, la France devrait être fière : j’ai nommé l’A380.

      D’ailleurs, à propos d’Airbus… Pauvre France, si tu savais, tu réfléchirais à 380 fois avant de donner des leçons aux autres nations sur les droits de l’homme …

  • Faut arrêter de blablater sur l’échec de l’industrie Française. Les entreprises sont écrasées par les charges, impôts, taxes et SURTOUT les contraintes administratives toutes plus débiles les unes que les autres. Bientôt l’ouvrier va diriger le chef et le syndicaliste le patron. D’autres avancées sociales encore plus graves dont il est de plus en plus interdit de débattre vont encore aggraver la situation. La formation d’une partie de la jeunesse est folklorique. Par dessus cet immense merdier on rajoute l’impôt sur la fortune. Nombres de petits entrepreneurs ne peuvent plus dégager de bénéfices pour investir dans un bureau d’études, préparer le futur etc… L’avenir de l’industrie lourde en France à long terme ce sont des associations dont l’activité consistera à réparer des mobylettes d’occasion destinées à des chômeurs devant se rendre chez Paul qui n’a pas d’Emploi. Derrière CHAQUE problème que vous avez dans l’industrie se cache l’état qui l’a créé… Mais comme ce sont les Français qui le veulent ce cycle d’autodestruction ira à son terme.

  • Je viens de lire vos deux articles, dans l’ordre. Je ne partage pas votre analyse des causes du déclin : cela se ramènerait à une question de technique managériale. La théorie des deux cerveaux est complètement démentie aujourd’hui, mais elle a la vie dure et on s’en est tellement servi partout que beaucoup tiennent à ignorer sa réfutation (lire « neuroscepticisme de Denis Forest). Gardons l’idée qu’il existe des émotions et des raisonnements et que de bien vivre ou de bien agir suppose de jouer sur les deux tableaux, et même sur un troisième en ajoutant le courage.

    Le problème de management que l’on a en France est politique. La technostructure fonctionne exactement comme l’administration, avec sa hiérarchie infrangible, ses décisions prises par une élite autoproclamée derrière des portes closes. Cette manie de ne vouloir voir qu’une seule tête vient de là. D’ailleurs Renault a longtemps été nationalisée et l’Etat en possède encore 20%, ce qui ne l’empêche pas de vouloir peser bien au delà. Si demain il s’avère que la stratégie du tout électrique aura été une erreur, Renault fermera : il n’y aura aucune voie de recours.

    L’autre maladie française, dont vous ne parlez pas, c’est la mise à la retraite anticipée des personnes compétentes de plus en plus tôt. La machine-outil a disparu du fait que le savoir-faire n’a pas été transmis. Le problème que vous citez n’en est qu’une conséquence : exporter des prototypes, c’est une erreur de gamin ou de gens pressés, au choix, et pas une question de cerveau mal employé. Or ce sont les gamins et les gens pressés qui ont le pouvoir dans ce pays.

    On est resté dans le colbertisme en France, à tous les étages et le libéralisme occupe très peu d’espace même dans la sphère privée.

    Les marges des entreprises sont insuffisantes et donc leur capacité à autofinancer leur développement. Il est normal qu’elles soient rachetées. Peu importe que les entreprises françaises passent sous pavillon étranger, ce n’est pas le nationalisme qui fait vivre, mais l’activité. Le problème, c’est que le repreneur ne reste pas en France. Il n’y a rien de technique là dedans, ni d’idéologique : s’il ferme les usines, c’est que le jeu y est outrancièrement faussé en faveur des salaires et au détriment des marges, contrairement aux déclarations mensongères du personnel socialiste. Lire à ce sujet les analyses de Jean Peyrelevade, ex PDG du Lyonnais.

    Le remède, c’est un peu plus de libéralisme, ce qui passe par la disparition des discours mensongers à son propos qui sont colportés partout. Dire : « il faut reconstituer l’industrie française » n’est pas un propos libéral. C’est un propos de politique économique, ce que Hayek appelait le planisme. Pour ma part, je pense qu’il faut arrêter d’écouter de que des intellectuels dans leur bureau disent sur ce qu’il faut faire au sujet de l’économie, du chômage, de la régulation, du droit du travail et tutti quanti. Ce qu’il est urgent de faire, c’est de démanteler les organisations qui s’en occupent et de mettre leur personnel au travail.

    Même en vendant des légumes sur les marchés, ils en apprendraient plus.

    • @ Brutus

      Pour les 2 cerveaux, vous avez raison: il s’agit d’une simplification ou symbolisation exagérée: la réalité est autrement plus complexe et les « 2 cerveaux » travaillent entre eux par des millions de connexions ultra-rapides dans de multiples directions de façon telle qu’elle dépasse encore l’imagination. (la réalité même d’une « intuition » « rend » bien tout ce qui reste à découvrir: c’est aussi imprécis que le « talent »). Les neuro-sciences en restent encore, la plupart du temps, aux constatations.

      Mais dans votre dernière phrase se trouve, à mon avis, un « trésor »: « Même en vendant des légumes sur les marchés, ils en apprendraient plus ».

      J’aurais remplacé « même » par « mais »: c’est en effet, dans une entreprise, chaque salarié qui possède ses idées et, à « l’extérieur », chaque client qui a un avis: si on commence à faire des enquêtes de satisfaction auprès de la clientèle, malheureusement toujours quantitatives, les contacts avec les salariés restent anecdotiques: aucune des idées d’un « cerveau droit » d’un salarié ne pourra remonter jusqu’aux sphères de réflexions-décisions: c’est impossible.

      De même qu’un maraicher apprendra de sa clientèle comment améliorer efficacement ses ventes: grâce au contact, irremplaçable.

      On se prive ainsi, « en haut lieu », de centaines de bonnes idées potentielles aussi peu fréquentes que des pépites d’or mais aussi précieuses qu’elles. Et comme le salarié ne sera pas encouragé mais souvent moqué par ses collègues, son idée sera jetée aux oubliettes! C’est dommage!

      Mais aussi la conséquence de l’organisation pyramidale (Colbert) « à la française », comme les jardins, par opposition aux jardins britanniques où la dissymétrie désordonnée apparente cache des motivations subtiles, d’où vient leur charme particulier.

      Méfions-nous de celles et ceux qui ne pensent comme nous: ils peuvent avoir raison!

    • Brutus,

      J’ai écrit un commentaire dans l’autre article et je vois que vous m’avez devancé de deux heures avec un commentaire qui rejoint ce que j’y exprime : http://www.contrepoints.org/2016/10/11/268517-nos-entrepreneurs-mauvais-strateges#comment-1244970

      J’y explique que l’économie française n’est rien d’autre qu’un système soviétique avec de nombreuses compagnies d’état comparables aux sovkhozes.

      Il faudrait que l’État ait purement et simplement interdiction d’intervenir dans l’économie sous quelque forme que cela soit ; on éviterait ainsi des scandales tels que les sauvetages de banque et des hontes nationales comme Airbus.

  • Pourquoi on a perdu notre industrie?.
    Parce que l’Éducation nationale a fait son boulot de sape des cerveaux de nos chères tètes blondes. L’enseignement technique , professionnel y a été systématiquement « dénigré » au profit des fillières de prestiges. Bac C, bac E, qui « ouvraient » à tous les choix d’enseignements universitaires et/ou élitistes.
    Avec des campagnes de dénigrement pour ceux qui ayant un bac pro, ne saurait suivre des études « supérieures » normales.
    Et c’est comme le tout TGV, l’EN a abandonnée les fillières techniques « classiques normales ». Après cela comment voulez vous avoir des capitaines d’industries digne de ce nom alors que la très grosse majorité de nos dirigeants d’entreprises n’ont sans doute jamais mis un bleu de « chauffe » et sans doute pas plus « de blouses blanches ou bleus aussi ».
    Et si nous ajoutons à tout cela, la trajectoire professionnelle en ligne directe digne d’une flèche de Guillaume Tell pour accéder aux postes de décisions des entreprises industrielles, on a le parfait tableau démonstratif de nos têtes d’Å“ufs dirigeants les grandes entreprises nationales. Ajoutons y les « contraintes administratives toutes plus débiles les unes que les autres » et nous avons là encore l’autre cause du déclin de l’industrie française.
    Il faut tout libéraliser. Il vaut mieux plus de libéralisme que de « colbertisme », que de « socialisme à la française », que de « dirigisme d’état ». Et ce n’est pas le chemin qu’on pris nos « gouverneux » depuis 30 ans.

  • Indépendamment de toute querelle sur la réalité ou non des deux cerveaux gauche et droit, cet article a l’immense intérêt de rappeler que l’industrie française subit un profond déclin, et que les causes ne sont pas uniquement dues à son environnement fiscal ou réglementaire. Il me semble que l’une des origines de ce mal français vient de son système de formation.
    Non pas seulement du caractère pachydermique de l’Education Nationale, mais surtout de ce que l’on pourrait appeler le « rêve national ». Pour caricaturer, la France a eu deux grands malheurs : Colbert et Napoléon. Colbert pour les grands groupes et Napoléon pour l’Ecole Polytechnique. Tout parent rêve pour son enfant de faire polytechnique et d’entrer dans un grand groupe. L’idéal est d’être ingénieur. D’où des réalisations géniales, comme le Concorde, le TGV, les centrales nucléaires, des merveilles d’ingénierie, jamais vendues à personne.
    Et ce rêve d’ingénieur a formaté notre système éducatif en un vaste système de sélection de l’élite et de formatage dans un moule unique. Système dont les fondements n’ont pas évolué depuis des siècles, malgré une multitude de réformes plus inutiles et inefficaces les unes que les autres. Un révélateur en est la place royale des mathématiques (d’ailleurs la France brille par ses mathématiciens). L’énorme avantage des mathématiques est qu’elles fournissent un outil de sélection simple et rapide. Il est infiniment plus facile de noter un exercice de math qu’une dissertation, ou une création artistique. D’où, pour reprendre l’image des cerveaux gauche/droit une hypertrophie du cerveau gauche et une dégénérescence du droit. Ou si l’on adhère pas à ce dualisme cérébral, une prépondérance de la logique déductive par rapport à la créativité inductive.
    Et il ne faudrait pas croire que la faute en revient exclusivement aux grands penseurs de la rue de Grenelle. C’est la France entière qui hurle dès qu’on ose touché à son Education Nationale, aux programmes rigides et obsolètes, aux système de notation et donc de sélection. Ce sont les parents qui idéalisent la filière S et boudent les filières pro. Et effectivement notre système d’orientation et de valorisation des études est si stupide qu’un jeune qui est doué et qui a une vocation pour un métier manuel se verra orienté en S car c’est la filière royale. L’orientation ne se fait pas selon les aptitudes et les « vocations », mais en fonction des notes mises en regard d’une hiérarchisation de la valeur des « filières » : très bon tu vas en S, un peu moins bon en ES, etc. et si tu n’as pas la bosse des maths tu iras en filière pro.
    Ceci dit, des pays comme la Corée ont un système éducatif hyper sélectif et sont des exemples de miracle industriel (si on excepte le galaxy note S7). Mais dans un pays où les mentalités sont diamétralement opposées aux nôtres et difficilement acceptables par nos sociétés…

    • Et ce rêve d’ingénieur a formaté notre système éducatif en un vaste système de sélection de l’élite

      Dans tous les pays l’école formate, mais aucun « formatage » n’a jamais pu empêcher l’émergence de libre penseurs dynamique et novateurs. Sur 12 millions d’élèves il n’en faut que 2-3000 pour créer une centaines d’entreprises géantes si on les laisse faire.

      Et c’est là, le problème français, les politiques ne laissent rien faire et toute l’économie est pourrie par le Capitalisme_de_connivence

      -Les novateurs n’arrivent pas au sommet dans le public parce que la mafia ceux en place font barrière et ne cooptent que de pur produits bien formatés.
      -Les grand groupes privés et indépendant (Apple, Facebook etc) n’émergent pas en raison de la concurrence des groupes public, de la fiscalité et législation qui empêchent les entreprises de grossir librement.
      -Et quand, rarement des groupes émergent, la prédation des politiques est terrible, ils violentent et secouent le marché à coup de législation et de fausse concurrence jusqu’à placer des gens à eux au sommet.

      Uber AirBnb, Free, Amazon, on subit ou subissent les foudres des élus.
      L’état est souvent entré dans le capital des jeunes pousses ou a carrément créé des concurrents à l’instar de Dailymotion (51%).
      Engie, Areva, Thales, EDF, PSA, Orange, SNCF, La poste, RFF, Air France, Renault, Dassault, Radio France, France télévision, Imprimerie nationale, DCNS, Safran, Nexter, Dexia, Grands ports maritimes, Aéroport de Paris, Bale Mulhouse, BPI, CDF etc. etc.

      Le contrôle du politique sur l’économie est quasi total.
      Ce n’est pas l’école qui ne produit pas assez de novateurs mais les apparatchiks en place qui ne leur laissent aucune chance.

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