La jungle de Calais et le porte-monnaie des Français

Le problème qui va se poser avec la fermeture de la jungle de Calais, ce n’est pas les migrants : c’est la manière dont l’État s’occupe de la solidarité.

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Welcome to Ellis Island By: Eden, Janine and Jim - CC BY 2.0

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La jungle de Calais et le porte-monnaie des Français

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 24 octobre 2016
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Par Phoebe Ann Moses.

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Welcome to Ellis Island By: Eden, Janine and JimCC BY 2.0

La France n’est pas le premier pays à faire preuve de protectionnisme en temps de crise. Mais impossible de croire qu’au fond, les Français ne sont pas accueillants, et qu’ils ne veulent pas accueillir de migrants chez eux, dans leurs villes.

Le problème n’est pas les migrants. Le problème, c’est l’État.

Solidaires avec la jungle de Calais ?

migrants-rene-le-honzecSi les migrants ne sont pas bien acceptés en France, c’est parce qu’on sait parfaitement qu’avec notre système social (que le monde nous envie), il faudra mettre la main au porte-monnaie. Et c’est justement impossible par les temps qui courent. La solidarité made in France consiste à distribuer de l’argent « pour aider ». Le problème, c’est que l’argent, on le donne et que la misère ne se réduit pas pour autant, bien au contraire.

La misère, c’est que les migrants de la jungle de Calais soient déplacés, après avoir été parqués avec l’interdiction d’aller où ils le souhaitent. Ces « migrants économiques », nettement moins bien accueillis que s’ils étaient « réfugiés politiques » doivent bien se demander pourquoi le monde est trop petit pour leur permettre de faire fortune ailleurs que dans leur pays natal. Les Français expatriés à  Londres ou ailleurs, migrants économiques eux aussi, ne subissent curieusement pas cette distinction.

Accueillir les migrants pour rajeunir la population

C’est le moment de réfléchir à notre système social, et de le remettre en question. Car si l’Allemagne, à laquelle on se compare volontiers quand ça nous arrange, souhaite accueillir des migrants, c’est parce que sa natalité ne compense plus les retraites qu’il faudra payer. Rajeunir la population de manière aussi inespérée est une aubaine pour ce pays. Ce n’est pas le cas de la France qui a le taux de fécondité le plus élevé d’Europe et ne parvient pourtant plus à verser les retraites qu’elle doit.

Et la France ce n’est pas non plus les États-Unis auxquels nous nous comparons aussi volontiers. D’abord les États-Unis n’ont pas – pas encore – le même système social que nous. Ensuite, chacun n’y a pas été « accueilli » comme on l’entend souvent, mais y a été « accepté », au sens où chacun pouvait tenter sa chance et se débrouiller. Et s’il y arrivait, tant mieux. La mentalité américaine répugne encore à assister celui qui ne fait pas un effort pour « y arriver ».

Alors, oui, la France peut faire une place aux migrants. Mais il faut qu’elle réforme son système et sa mentalité : laissons s’installer les individus, et que les meilleurs gagnent. Quant à celui qui n’y parvient pas, il ne peut plus être question que l’État y supplée en permanence sans jamais rendre de compte sur la manière dont est employé l’argent des contribuables.

La solidarité ne doit plus être gérée par l’État

Que chacun s’occupe de soi-même d’abord, cela nous aidera à accepter les autres. Au lieu de compter sur la solidarité gérée par l’État, nous pourrions payer pour nous-mêmes des assurances en tout genre. Cela évacuerait l’aigreur de certains qui observent que les largesses de l’État ne sont pas pour eux, mais « pour les autres ». Tout le monde serait logé à la même enseigne : à chacun de subvenir à ses besoins, et de s’assurer (ou pas). La solidarité deviendrait active et consentie au lieu d’être forcée comme elle l’est depuis soixante ans, ce qui n’aboutit, on le voit dans les sondages récents, qu’au rejet de l’autre.

Quand c’est l’État qui s’occupe de solidarité, est-ce satisfaisant de voir des êtres humains parqués dans des tentes entourées de barbelés ? Est-ce cela la définition de la dignité humaine proposée par l’État français ? Et maintenant, déplacer cette population, juste avant l’hiver (au mépris des règles imposées aux propriétaires qui eux, ne doivent pas expulser de locataires à cette période !), en se déchargeant sur les villes de cette « gestion » encombrante, est-ce bien satisfaisant ? Attend-on de façon bien hypocrite, qu’ils se volatilisent « dans la nature »… ce qu’on aurait pu leur accorder depuis le début ?

Un Code du travail qui empêchera les migrants de travailler

dessin-contrepoints788Évidemment, il n’y aurait pas que le système social à revoir, il faudrait aussi remettre à plat le Code du travail. Oui, parmi les migrants, il y a peut-être des enseignants, des médecins, ou d’autres « nobles » professions. Mais va-t-on leur ouvrir les portes de l’Éducation nationale ? Leur donner une équivalence de diplôme en médecine ? Alors qu’on peine déjà à reconnaître la formation d’un médecin venant de Roumanie ? Soyons réalistes. Le plombier polonais avait déjà du mal à se faire une place en France1.

Non, toutes ces personnes instruites et courageuses ne trouveront pas un emploi à leur mesure. Mais déjà, si elles pouvaient trouver un emploi, elles n’auraient pas perdu leur dignité, en plus de leur famille.

Pour cela, il faut plus qu’une réforme du Code du travail : il faut libérer totalement la population de l’emprise de l’État, dans quelque domaine que ce soit. Oui, cela donne plus d’incertitude sur la vie. Mais cela donne aussi plus de chances de s’en sortir. N’est-ce pas cette possibilité que chacun souhaiterait pour lui-même ?

  1. « Cette affaire est très grave, car la directive Bolkestein permet à un plombier polonais ou à un architecte estonien de proposer ses services en France, au salaire et avec les règles de protection sociale de leur pays d’origine. Sur les 11 millions de personnes actives dans les services, un million d’emplois sont menacés par cette directive. Il s’agit d’un démantèlement de notre modèle économique et social. » Philippe de Villiers, Le Figaro, 15 mars 2005.
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