Par Michel Faure.
Où est passé le centre ? Vous savez, cette zone ambigüe qui flotte entre la droite et la gauche de l’éventail politique français depuis des décennies. Il a rassemblé, selon les âges, d’aimables démocrates chrétiens (Jean Lecanuet), des libéraux orléanistes (Valéry Giscard d’Estaing), des modérés opportunistes (François Bayrou), des inclassables plus ou moins sympathiques (Jean-Louis Borloo pour les « plus », Bernard Tapie chez les « moins »). Et une ribambelle d’indécis ambiteux qui ont souvent rejoint, quand ils penchaient à gauche, le Parti Radical de Gauche (PRG), avec Jean Michel Baylet en Grand Manitou, Sylvia Pinel l’étoile montante et Christiane Taubira qui a prouvé, aux élections de 2002, qu’elle pouvait jouer les trouble-fêtes.
Le centre, absent des primaires et de l’élection présidentielle
Aujourd’hui, le centre n’existe plus. Il a été balayé par les bonapartistes de droite et les archaïques de gauche. Il ne présente aucun candidat aux élections présidentielles de 2017. Les primaires dites « de la droite et du centre » sont en réalité celles de la droite. Elles n’intégreront aucun membre de l’UDI ; la nébuleuse centriste n’a pas réussi à désigner en son sein un candidat.
Elles ont aussi fermé leur porte à un respectable défenseur de la société civile (l’avocat Michel Guénaire), et même le plus emblématique des libéraux-conservateurs, pourtant encarté chez Les Républicains (Hervé Mariton) a été écarté. À droite, la bataille se jouera donc sans le centre. À gauche aussi, le PRG n’étant plus qu’un agent supplétif du PS, et l’enjeu sera l’éternel conflit entre anciens et modernes.
Il faut donc faire son deuil du centre, et c’est douloureux parce qu’il avait porté, depuis l’après guerre, deux belles idées : l’Europe et le libéralisme. Belles. Mais des idées taboues aujourd’hui, tant monte le populisme europhobe et tant le libéralisme – malgré la pédagogie de l’échec de son contraire par François Hollande – reste à la fois incompris et détesté, et détesté parce qu’incompris.
Le centre n’est plus que ruines
Le centre droit était en agonie depuis la fin de l’UDF, auto-dissout dans le Mouvement Démocrate – le MoDem – en 2007. Mais en réalité il avait déjà un pied dans la tombe face au bulldozer Chirac qui fonda le RPR en décembre 1976 en opposition frontale aux idées libérales de l’UDF, prônant un « travaillisme à la française » et dénonçant « le capitalisme sauvage ». L’état délétère du centre droit a été décrit de façon lapidaire par l’un de ses plus éminents représentants, Jean-Louis Bourlanges, quand il déclara, en évoquant l’UMP, le MoDem et le Nouveau Centre, que « les enfants de l’UDF n’avaient le choix qu’entre une reddition, une secte, et un camp de réfugiés ».
À gauche, le centre s’est noyé dès 1972 dans la soupe marxiste du « Programme commun de gouvernement » scellé la même année par le PS, le PCF et les Radicaux de gauche. Sa mort clinique est certifiée par l’élection de 2012, quand Bayrou se révèle incapable de faire du centre une alternative attractive face à un Nicolas Sarkozy dévalué pour ne pas avoir tenu ses promesses, et un François Hollande inquiétant quand il promet de tenir les siennes.
Ce qu’il reste aujourd’hui de cette longue histoire du centre sont les ruines des idées et l’abandon des projets. Le fantôme du centre n’est plus en phase avec son électorat. Défendre l’Europe et le libéralisme est pour lui moins essentiel que sauver ses prébendes. Il n’est qu’un dealer qui échange les voix de ses quelques élus contre une ou deux sinécures et des secrétariats d’État.
Le centre n’existe plus, mais les centristes sont toujours là
Le centre n’est plus, mais les centristes, eux, existent toujours et continuent à espérer en l’Europe et le libéralisme. Une Europe démocratique et prometteuse d’avenir, et un libéralisme sage, réformiste, qui réduirait les dimensions de l’État, ses dépenses et ses impôts, sans trop affecter la solidarité sociale. Or les libéraux, les plus aptes à répondre à ces espérances, n’ont pas réussi à occuper le vide laissé par la mort du centre.
Cet échec est d’autant plus désolant que le Parti Libéral Démocrate (dont l’auteur de ces lignes est membre, mais qui s’exprime ici, comme toujours, librement) a tenté de le faire en rejoignant, pour un temps, l’UDI, avec le désir d’occuper cet espace en friches pour le remplir des idées positives du libéralisme. C’était sans compter sur la résistance des appareils centristes pour défendre bec et ongles leurs petits prés carrés.
Les libéraux, avenir du centre ?
Lesquels, aujourd’hui, ne sont plus qu’un terrain vague. Il faut le reconquérir. Le seul espoir de le cultiver et de le faire refleurir est l’autonomie des libéraux. Ceux-ci se rangent sous de nombreuses étiquettes, mais comme les vrais centristes, ils ne sont ni à droite ni à gauche. Ils sont ailleurs, pragmatiques et modestes, sans certitude absolue mais guidés par l’expérience et le sens moral. Ils doivent se rassembler – partis, think tanks, militants, sympathisants – et remplir ce vide du centre de leurs idées et de leurs projets, avec patience et pédagogie.
Aux libéraux d’expliquer, durant l’incertain quinquennat qui s’annonce, leur confiance dans les libertés sous l’ombrelle du droit, dans l’autonomie des hommes et les vertus de leurs initiatives. À eux de défendre leur désir d’un État plus modeste, d’une économie libérée par une fiscalité simple, justifiée et prévisible et une flexibilité réglementaire propice à la croissance et à l’emploi. À eux, enfin, d’affirmer leur espoir d’une Europe en forme de promesse d’un avenir d’échanges pacifiés et d’horizons élargis.
Le centre, en conclusion, sera libéral ou ne sera plus. Sans cet effort pédagogique des libéraux, il ne pourra renaître et renouer avec ses honorables traditions : la réforme, la liberté, et l’Europe comme une maison commune.
Le centre est toujours là, mais, hélas, trop dispersé par des personnalités comme Bayrou ou Borloo. Et puis, il n’appartient aux centristes de faire le ménage dans la famille fratricide des Républicains. Ces derniers ont ajouté « et du centre » au libellé de leur primaire, sans un réel consentement de l’UDI, non sollicité dalleurs par le Président des Républicains.
Dommage que la famille centriste ne puisse pas, matériellement parlant, présenter un candidat comme J.C.Lagarde, non pas à la primaire, mais à l’élection présidentielle !…
Et puis voilà le centre gauche qui tente d’émerger avec Macron …
On pourrait rêver à un rapprochement des centres ….
Mais si, les centristes existent ils sont même au pouvoir, et s’apprêtent à prendre l’UMP. Hollande, Juppé, c’est pas des centristes ?
Bien d’accord avec ça !
Les centristes gouvernent la France depuis la mort de Pompidou, avec des coups de barre à gauche de temps en temps.
Si LePen + Mélanchon font autant de voix, c’est bien parce que la politique centriste est maintenant rejettée.
Un libéral est libéral….Le centre c’est quoi? Bayrou? Une ambition personnelle qui a détruit tout ce qu’il a touché…
Bayrou numéro 1 du CDS: Faillite.
Bayrou n°1 de l’UDF: Faillite
Bayrou n°1 de l’UDI/ faillite;
Avec des choix super judicieux. Vote pour Royal Hollande. Juppé….
Bayrou à la présidentielle? 4 échec.
Bayrou est encore là pour 20 ans. Encore 20 ans a détruire tout ce qu’il touche….Le centre il est pas près de remonter.
Le nouveau centre n’est-il pas En marche! ?
Le libéralisme c’est un corpus d’idées qui repose sur le respect de la personne, de la liberté et de la propriété. Ce qui compte c’est que l’idée progresse dans l’opinion. Les partis politiques ne s’en empareront que lorsque l’idée sera répandue. Peu importe qu’ils soient au centre ou à droite. Faisons progresser l’idée, le reste suivra en temps voulu.
Nicolas Sarkozy a tenu ses promesses contrairement à ce que vous dites. Nicolas Sarkozy à fait plus de 800 réformes. C’est plus que Giscard D’Estaing et Chirac réunis. Enfin, si l’on veut avoir un bilan objectif du quinquennat de Nicolas Sarkozy Il faut lire le livre d’Eric Roussel intitulé « Nicolas Sarkozy de près, de loin ». Vous pouvez aussi vous référez au dernier bilan de la cours des comptes pour 2011 bien meilleur que ceux qui ont suivi concernant la période Hollande. Un peu d’objectivité, je vous prie.
J’avoue ne rien comprendre à la classification politique française. Je vois mal comment il peut y avoir plus au centre que Juppé.
Il est clairement plus au centre que Sarko, mais Juppé est-il vraiment libéral ?
Je le vois plus comme un (vrai) homme d’Etat, avec un Etat toujours plus fort et plus présent :/
Juppé, il est étiqueté à droite mais il ne faut pas toujours se fier à l’étiquette.
Le plus terrible c’est qu’aujourd’hui, un centre unifié (centre gauche + centre droite) a une autoroute pour les 10 ans à venir.
Il manque juste une personne pour les rassembler tous…