Par Solène Tadié, depuis Rome, Italie.
Le 4 décembre prochain, les Italiens seront appelés aux urnes pour répondre au référendum sur la réforme constitutionnelle, approuvée par le Parlement le 12 avril dernier, sans toutefois atteindre la majorité aux deux tiers requise dans chacune des Chambres.
Promue par le gouvernement de Matteo Renzi, la proposition est avant tout destinée à mettre fin au bicaméralisme parfait (qui octroie à la Chambre des députés et au Sénat des pouvoirs identiques), régime que l’actuel Président du Conseil juge responsable du « blocage institutionnel » et de l’instabilité gouvernementale caractéristiques du pays depuis l’instauration de la Constitution en 1947.
La douloureuse expérience fasciste qui se refermait alors avait conduit les rédacteurs de l’époque à imaginer des remparts efficaces contre les abus de pouvoir.
Aussi s’agirait-il aujourd’hui d’affaiblir de manière drastique les prérogatives de la Chambre haute, réduite à 100 sénateurs au lieu de 315. Élus par les Conseils régionaux et non plus par le peuple, les sénateurs n’exerceraient plus qu’une fonction représentative au sein des institutions territoriales et ne pourraient plus voter la confiance au gouvernement. La Chambre des députés exercerait seule le contrôle de l’exécutif ainsi que la fonction législative, à l’exception de quelques cas spécifiques (notamment sur les questions européennes).
Cette réforme présenterait surtout l’intérêt de réduire le mécanisme de « navette parlementaire », qui rend particulièrement lente toute procédure d’adoption des lois dans la Péninsule, où le renvoi d’un texte entre les deux Chambres peut se poursuivre indéfiniment.
Néanmoins, bien qu’une large partie de la population et des observateurs semble s’entendre sur la nécessité d’une refonte du système politique italien, le référendum à venir divise fortement le pays. Beaucoup, notamment chez les libéraux, ont exprimé de sérieuses réserves quant aux modalités d’application d’une telle réforme, qui touche à la pierre d’angle du système démocratique.
Un projet de loi confus et centralisateur
Si l’intitulé de la proposition de loi – qui prône aussi la réduction du nombre de parlementaires et la limitation des coûts de fonctionnement des institutions – a tout pour séduire dans une Italie réduite à l’immobilisme, étouffée par sa bureaucratie pléthorique, plusieurs éléments suscitent l’inquiétude d’une partie de la société civile, notamment parmi les juristes, qui y voient une potentielle menace pour la démocratie.
Il faut reconnaître en premier lieu que l’argument de simplification législative brandi par les défenseurs de la réforme laisse plutôt songeur lorsque l’on constate la prolixité du nouveau texte, auquel neuf Italiens sur dix ne comprennent goutte. L’article 70 portant sur l’élaboration des lois est emblématique du flou artistique dans lequel est plongé le citoyen désireux d’en savoir plus : les neuf mots qui composent actuellement l’article seraient ainsi portés à 500, le tout dans un langage sibyllin.
Les pourfendeurs de la réforme – dont l’une des figures de proue est le président émérite de la Cour constitutionnelle, Valerio Onida – estiment que le « dépassement » du bicaméralisme paritaire a été mal conçu. Selon eux, si la réforme était approuvée en l’état, le Sénat n’aurait plus de raison d’être car il serait dès lors trop affaibli pour être vraiment efficace dans sa représentation des autonomies territoriales. À cela s’ajoute le fait qu’un grand nombre de compétences jusqu’à présent confiées aux régions seraient transférées vers l’État, compromettant au passage le principe de subsidiarité, cher aux libéraux et très ancré dans la culture italienne.
Dérive autoritaire
Enfin, le risque d’une dérive autoritaire est assez fréquemment brandi par les opposants à la réforme, dans la mesure où celle-ci favorise le pouvoir en place sans prévoir de contrepoids réel. Le risque de concentration des pouvoirs au sommet de l’État est jugé d’autant plus sérieux que la réforme viendrait s’ajouter à la loi électorale « Italicum », entrée en vigueur en juillet dernier, laquelle confère déjà, par le biais de la prime majoritaire, une grande marge de manœuvre à la coalition ayant remporté le plus de voix.
Les opposants redoutent donc l’assujettissement du peuple à un parti unique, renforcé par l’élection du Président de la République (élu par le Parlement), des juges de la Cour constitutionnelle (en grande partie nommés par le Parlement et le chef de l’État) et des membres du Conseil supérieur de la magistrature (présidé par le chef de l’État).
À quelques jours du vote, le projet peine à rassembler les citoyens et l’issue du scrutin apparaît très incertaine. Cet événement cristallise en outre toutes les controverses autour de la politique de Matteo Renzi, qui n’a pas été élu par le peuple, au point de donner au rendez-vous du 4 décembre la teinte d’un vote plébiscitaire, alors que le Président du Conseil a promis de démissionner si le « Non » l’emportait. Les eurosceptiques y voient dans le même temps l’occasion rêvée de réaffirmer leur hostilité envers Bruxelles, qui a appelé de ses vœux la validation de la réforme.
Parmi les points qui sont les plus litigieux, j’en retiens deux:
1. on parle de referendum, donc de majorité simple des électeurs pour justifier d’un changement radical de la structure représentative avec une concentration forte des pouvoirs. Le tout pour renverser ce qui réclame aujourd’hui les 2/3 de chaque chambre.
Troquer le vote des 2/3 de chaque chambre pour 50.1% des votants sur un texte abscons et d’une telle portée, voilà qui laisse rêveur. Ce d’autant que les referendums ne sont pas connus pour être si populaires auprès de l’exécutif…
2. au même moment sont évoqués par la presse, ou devrait-on plutôt dire que personne ne parle hormis quelques rares journaux et internet pour ne justement pas mettre à mal les chances de ce référendum, la décision par le ministre de l’intérieur de ce même gouvernement (Alfano) de criminaliser lourdement les refus d’obtempérer lors des éventuelles réquisitions et expropriations de résidences secondaires afin de loger les migrants. Rappelons que lesdites réquisitions et occupation de biens ne sont pas rémunérées alors que les biens concernés continueront de supporter les droits et impôts dus. On peut légitimement se demander s’il n’y a pas là une recherche en opportunité permettant de faire taire ensuite toute contestation…
Ces deux points me paraissent d’une porté majeure pour comprendre ce qui se joue actuellement en Italie qui a connu, qu’on veuille en prendre conscience ou non, plusieurs coups d’états « doux » ces dernières années. Depuis la manière dont Draghi a forcé la démission de Berlusconi jusqu’à la nomination du présent.
Enfin, comment ne pas faire le parallèle entre cette volonté de se défaire d’une représentation locale, très proche dans la réalité de ce qui existe dans un état fédéral, en tant que contrepouvoir à la tyrannie de la majorité (populations des grandes agglomérations contre celle des territoires excentrés); et la réalité rappelée par les élections américaines de ce que ce contrepouvoir représente justement.
Montée au créneau de tous les puristes de la démocratie. Pourtant lItalie est malade depuis longtemps surtout si l’on regarde Rome cette vieille dame agoni que qui au milieu de ses trésors survit péniblement
Renzo fera peut être des erreurs, mais il faut de la chirurgie lourde, por lutter contre la combinazione
Bon, me voilà pas plus avancé, si j’étais italien c’est pas cet article qui m’aurais permis de prendre une décision…
Tout ce que j’ai compris c’est que en Italie c’est le mouvement 5 * qui porte la mauvaise humeur des peuples qui s’exprime sous forme de NON à tout ce qui vient d’en haut, Brexit, élection de Trump, etc. Que ce mouvement est contre Renzi et son referendum. Et que donc ce sera NON.