Primaire à gauche : les ambitieux se crêpent le chignon

La foire d’empoigne au sein du PS a de quoi faire sourire. Mais que cache cet affligeant spectacle ?

Partager sur:
Sauvegarder cet article
Aimer cet article 0

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Primaire à gauche : les ambitieux se crêpent le chignon

Publié le 20 décembre 2016
- A +

Par Serge Federbusch.

Primaire à gauche : les ambitieux se crêpent le chignon
By: La NetscouadeCC BY 2.0

L’exercice des primaires n’est pas le genre de concours de beauté qui sied au parti socialiste. Depuis sa création à Épinay, en juin 1971, la logique des courants régulait les rivalités entre chefs. Mitterandistes et Rocardiens, Jospinistes et Fabiusiens s’affrontaient au rythme des congrès, mais les logorrhées post-marxisantes des uns et des autres finissaient souvent par accoucher d’improbables synthèses. Certains courants avaient plusieurs leaders et, localement, les alliances se nouaient et se dénouaient de manière relativement fluide. À la différence de ce qui se passait à droite, on répartissait les investitures et les fonctions de direction au prorata des scores des différentes motions.

L’effet mécanique des primaires

Le quinquennat, qui rend quasi permanente la lutte entre les présidentiables, puis la mécanique des primaires ont eu raison de ce fragile équilibre. La vie du parti est désormais entièrement réduite à des affrontements entre grands ambitieux. En réalité, le parti ne compte plus, seules sont déterminantes les écuries présidentielles.

À droite, on est habitué à cette personnalisation du pouvoir. Fillon a gagné et aussitôt les autres prétendants ont comme disparu. À gauche, le processus d’acclimatation à la seule logique présidentielle reste à achever.

Cette fragilité structurelle se double de la perspective délétère d’une défaite cuisante. Nul ne concourt sérieusement pour gagner en 2017. Chacun espère tirer parti de la campagne pour prendre des options sur la suite. Mais les haines vont s’attiser sans que rien ne garantisse que le terrain gagné soit conservé après l’été 2017. C’est un combat de gueux, les plus déloyaux, les plus féroces, les moins policés.

Neuf candidats se sont placés sur la ligne de départ. Certains sont purement et simplement téléguidés, comme Vincent Peillon par Martine Aubry ou Florence Pinel par Jean-Michel Baylet. L’un sert à torpiller Manuel Valls, l’autre à négocier quelques investitures pour le PRG au moment des législatives. Le courant central et majoritaire avait un chef naturel : François Hollande. Celui-ci ayant abdiqué brutalement, ledit courant agit comme un poulet décapité, courant de ci de là. Untel est récupéré par Valls, un autre par Peillon, un autre s’égaye vers Macron.

L’influence de Mélenchon et de Macron

Car, pareils à des planètes gravitant autour d’astres plus massifs, tous ces concurrents voient leur orbite influencée par celles de Mélenchon et Macron, qui ont décidé, eux, de se dispenser de primaires. Plus le désordre frappera le PS, plus ces candidatures extérieures seront dangereuses ; ce sont des primaires sous influence en quelque sorte. Chacun va tenter de s’élever en abaissant les autres et, ce faisant, ils s’affaisseront collectivement face aux deux énergumènes qui s’agitent en dehors. Montebourg et Hamon sont menacés par Mélenchon tandis que Valls et Peillon risquent d’être avalés par Macron.

Quant aux soi-disant affrontements idéologiques, inutile d’y prêter importance : ils ne sont que références incantatoires à l’humain, à l’écologie, à la lutte contre les excès du capitalisme et au combat contre l’ultra-libéralisme. Tous ces éléments de langage sont brassés sans cohérence par les différents candidats.
Montebourg se veut radical mais fait des clins d’oeil au réalisme quand Valls se dit pragmatique mais sacrifie à des rhétoriques solidaristes. Cherchant à se singulariser artificiellement, ils deviennent indistincts et ridicules. On l’a vu hier avec la soudaine conversion de Valls à la dénonciation du 49-3.

Jusqu’à présent, seul le conservatisme des Français, attachés aux logos partisans et conditionnés par le vote prétendument utile, a permis aux vieux appareils de survivre à de tels périls. Mais les socialistes devraient faire attention : le dégoût est tel, parmi leurs électeurs, que 2017 risque d’être fatal au parti d’Épinay.

Sur le web

Voir le commentaire (1)

Laisser un commentaire

Créer un compte Tous les commentaires (1)
  • « Fatal au parti d’Epinay »? C’est bien ce qui devrait arriver. Mélanchon et Macron risquent d’appeler à eux les marxistes chez l’un, et les socio-libéraux chez l’autre, laissant les autres têtes se retrouver le bec dans l’eau. Valls pose un cas particulier: son bouquin exprimait des idées allant vers un néo-socialisme plus libérai qui l’aurait rapproché de Macron, mais il semble s’être laissé endormir par Hollande, la poursuite d’une carrière demandant de mettre de l’eau dans son vin.

La liberté d’expression n’est pas gratuite!

Mais déductible à 66% des impôts

N’oubliez pas de faire un don !

Faire un don

Pour Frédéric Sawicki, professeur de science politique à l’Université Paris 1, la nomination de Michel Barnier au poste de Premier ministre signale la concrétisation d’une alliance entre Emmanuel Macron et Les Républicains, mais aussi la position de force du Rassemblement National. Entretien.

 

Michel Barnier vient d’être nommé Premier ministre. Que signifie ce choix d’Emmanuel Macron ?

Frédéric Sawicki : La première chose à souligner, c’est que Michel Barnier vient de la droite et qu’il a forcément reçu le soutien d... Poursuivre la lecture

Voilà, c’est fait : après deux mois d’atermoiements et de « consultations » aussi théâtrales qu’inutiles, Macron a fini par désigner Michel Barnier comme nouveau Premier ministre en remplacement du stagiaire Gabriel Attal qui venait pourtant tout juste de maîtriser la photocopieuse du rez-de-chaussée.

 

Comme on pouvait le prévoir depuis la dissolution et les résultats en demi-teinte des élections législatives de juin, la nomination de ce vieux cacique de la droite centriste a provoqué une cataracte de larmes de gauchistes ... Poursuivre la lecture

4
Sauvegarder cet article

La poussière de la bataille électorale est à présent retombée et, avec elle, certains yeux joyeusement fermés se sont rouverts aux réalités de terrain.

 

Ainsi donc, finalement, on se retrouve bien avec les trois blocs politiques qu’on pouvait prévoir une fois le premier tour passé (à savoir Rassemblement national, Nouveau front populaire et macronistes en nombre décroissant de bulletins). Cependant, ce second tour a fourni quelques surprises, puisque l’ordre initialement prévu a subi des tensions de surface (et on se retro... Poursuivre la lecture

Voir plus d'articles