Gouvernement Borne 1 : du woke et de l’écolo

Le gouvernement Borne donne l’image d’un infléchissement à gauche de la politique gouvernementale, une image qui vise uniquement à lancer la campagne des législatives et qui masque bien mal la continuité profondément technocratique de la présidence Macron.

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Capture d'écran YouTube Europe 1 ""L’objectif, c’est aucun jeune sans solution à la rentrée", assure Elisabeth Borne"

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Gouvernement Borne 1 : du woke et de l’écolo

Publié le 23 mai 2022
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Quel suspense insoutenable cela fut. Alors que depuis deux mois, le nom d’Élisabeth Borne était susurré dans la presse, elle a évidement été nommée à Matignon. Bien qu’elle constitue un formidable symbole pour l’égalité des sexes, elle incarne en réalité la gauche technocrate dont est issu le chef de l’État.

Sa nomination illustre très bien la tonalité générale du gouvernement annoncé vendredi après-midi : technocrate et vaguement saupoudré d’écologie et de wokisme pour marquer le ton de la campagne législative.

Car ce gouvernement n’est rien d’autre qu’une photo de famille sur laquelle s’appuieront les candidats de la majorité aux prochaines élections, sans l’effet « wouahouh » qu’aurait pu provoquer la nomination de telle ou telle personnalité.

 

La part belle à l’écologie et au social dans le gouvernement Borne

Vendredi midi, le premier nom sorti dans la presse annonçait la couleur : celle qui était jusqu’alors secrétaire d’État à l’Économie sociale et solidaire, Olivia Grégoire, devient porte-parole du gouvernement en remplacement d’un Gabriel Attal propulsé aux Comptes publics et qui se positionne comme un potentiel poids lourd politique dans les prochaines années.

Députée de Paris dont elle représente des arrondissements moyens et aisés de la capitale, Olivia Grégoire s’est plusieurs fois dite favorable à une responsabilisation du capitalisme. Ambiance…

Après quelques heures à attendre la fumée blanche, la distribution de la première équipe gouvernementale de l’ère Macron 2 est officiellement annoncée par Alexis Kohler, confirmé donc à son poste actuel, lui dont une entrée au gouvernement aurait été un temps évoquée.

Parmi ces 27 noms, on ne retrouve aucun ministre d’État. Ce titre honorifique semble remplacé ici par les attributions spécifiquement écologistes de certains nommés. C’est notamment le cas d’Amélie de Montchalin, à qui revient la question.

 

Un régalien inchangé

Sur les 27 membres de ce gouvernement qui se voulait – comme à chaque remaniement depuis 20 ans – « resserré », trois ministères régaliens ont conservé leurs chefs.

D’une part Gérald Darmanin, que Jupiter semble récompenser de son bilan à la tête de la place Bauveau marqué par une hausse des violences domestiques et sexuelles et par l’explosion du malaise des policiers, et d’autre part Bruno Le Maire, qui reste ministre de l’Économie après 5 années marquées par un bilan peu enviable.

Autre ministre régalien, et pas des moindres, le garde de Sceaux, qui conserve son titulaire pourtant longtemps dit sur le départ et actuellement mis en examen devant la Cour de justice de la République pour prise illégale d’intérêts. La théorie la plus probable est sans doute un mélange d’acte d’autorité jupitérienne face à la magistrature et l’absence de candidat acceptant de se confronter à la chose.

Toujours sur le plan régalien, le fidèle Sébastien Lecornu reprend le ministère des Armées après avoir été durant deux ans à l’Outre-Mer.

Mais c’est la nomination de la chiraquienne Catherine Colonna aux Affaires étrangères qui fait le plus parler. L’ancienne ministre des Affaires européennes est une des deux prises de guerre à droite avec l’ancien chef des députés LR Damien Abad nommé ministre des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes handicapées en plein chantier sur l’autonomie lancé il y a maintenant un an et depuis enterré, prouvant bien que les symboles sont généralement là pour masquer le vide.

Cette dernière nomination marque un symbole dans l’histoire de la République puisqu’après avoir été la première personne en situation de handicap à être élue à l’Assemblée nationale, Damien Abad devient le premier ministre dans cette situation nommé dans un gouvernement français.

 

Un épouvantail nommé Ndiaye

L’autre nomination marquante de ce gouvernement est sans doute celle de Pap Ndiaye. Cet historien reconnu de la question migratoire et raciale conforte l’idée d’un gouvernement de campagne.

Nommé en remplacement de Jean-Michel Blanquer, Pap Ndiaye incarne parfaitement la méritocratie républicaine et pourrait bien devenir un modèle d’intégration pour une certaine jeunesse. Le message est intéressant, mais son profil très « woke compatible » en fait également un glaive électoral contre la NUPES, avec laquelle la majorité est au coude à coude dans les sondages au niveau national malgré une avance certaine des macronistes en termes de sièges.

Outre cette fonction vis-à-vis de la gauche, la nomination de Pap Ndiaye semble en avoir une autre : cette d’épouvantail pour une droite réduite à faire de la figuration et à dénoncer le wokisme et la perte des valeurs. Une droite tombée évidement dans le panneau et les deux pieds dedans…

Deux fonctions qui semblent pour l’instant accomplies à merveille en attendant les premiers actes du nouveau ministre.

Autre profil intéressant à noter mais nettement moins polémique : l’ancienne conseillère culture du prince, Rima Abdul-Malak, qui prend en charge la rue de Valois en remplacement de Roselyne Bachelot.

Proche de Bertrand Delanoë, Abdul-Malak a également un profil de « gauche techno », ayant fait l’essentiel de sa carrière dans l’administration culturelle. Un profil étonnant lorsqu’on se souvient que le principal chantier de la ministre sera la fin de la funeste redevance audiovisuelle.

 

La réforme de la fonction publique en second plan

Une autre nomination est à noter : celle de Stanislas Guérini. Celui qui était jusqu’alors chef du parti présidentiel remplacera Amélie de Montchalin au ministère de la Fonction publique. Cette nomination s’apparente largement à un simple maroquin en contrepartie de ses services au sein du parti, et nous prouve bien que la refonte de la fonction publique ne sera malheureusement pas une priorité du quinquennat.

 

Un gouvernement Borne techno

Ce gouvernement sera donc intitulé « Borne 1 ». Un nom bien étrange lorsqu’on note l’effacement total du Premier ministre du fait de l’hyper-présidentialisme français. Ce gouvernement devrait donc s’appeler « Macron IV », puisqu’il intervient après les deux gouvernements Philippe et le gouvernement Castex.

Toujours est-il que ce gouvernement donne l’image d’un infléchissement à gauche de la politique gouvernementale, une image qui vise uniquement à lancer la campagne des législatives et qui masque bien mal la continuité profondément technocratique de la présidence Macron.

Et toujours rien pour Aurore Bergé…

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  • Préambule à mon premier Gouvernement borné : « On ne fait pas d’ombre à un empereur, je ne veux pas de Premier Ministre, mais un secrétariat d’exécution, je ne veux pas de Ministre d’État, vous serez tous des fonctionnaires dociles, je ne veux pas d’opposition, les députés devront s’engager à voter « mes » lois. Je n’ai pas de ligne politique, vous pouvez être de gauche ou de droite, cela m’est indifférent, votre seule ligne serat ma volonté. Je n’ai pas non plus de vision pour l’avenir du pays, je suis, comme vous tous, un technocrate qui gère mon pouvoir à vue, coute que coûte, et ce sont les enfants qui paieront quand je serai parti dans 5 ans ».

    18
  • Darmanin, s’il n’est pas le chouchou des statistiques, semble au moins apprécié des policiers. C’est déjà ça.

    -1
  • Avec Abad, Macron s’est comporté comme un gland.
    Les bras m’en tombent (si si) ; moi qui croyait que la prédation sexuelle était l’apanage de l’écologisme, du sémitisme et du journalisme.

    -3
  • Je dirais plutôt un infléchissement à gauche de l’image pour – comme d’habitude – tromper l’électeur tandis que la politique réelle sera inchangée

  • « Damien Abad devient le premier ministre dans cette situation (handicap) nommé dans un gouvernement français »
    Vous oubliez Michel Gilibert, secrétaire d’Etat aux personnes handicapées de 1988 à 1993.

    • Avatar
      JonathanFrickert
      23 mai 2022 at 18 h 20 min

      Très juste !
      À la différence près que le handicap de Gilibert n’était pas de naissance mais qu’il faisait suite à un accident.

      • En effet. Mais son expérience personnelle de tétraplégique a à coup sûr été décisive dans son action, notamment la loi accessibilité de 91.
        (Juste un constat sur son histoire particulière, en aucun cas l’affirmation qu’il vaut mieux avoir un problème particulier pour s’en occuper convenablement ! Je ne suis pas de ceux qui pensent que seules les femmes peuvent parler et agir sur les questions de féminisme par exemple !…)

  • Voilà un gouvernement sévèrement borné qui porte à gauche.

  • Une Bonne nouvelle Ndiaye ministre de l’éducation, on ne rigole plus

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