Augmenter les impôts : une erreur économique, budgétaire et morale

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Augmenter les impôts : une erreur économique, budgétaire et morale

Les points de vue exprimés dans les articles d’opinion sont strictement ceux de l'auteur et ne reflètent pas forcément ceux de la rédaction.
Publié le 24 septembre 2024
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Les Français prennent peu à peu conscience de l’ampleur du désastre des finances publiques, du déficit et de la dette, même s’ils ne réalisent pas toujours ce que signifient les chiffres abstraits qui leur sont présentés. Dire que le déficit sera cette année entre 5,5% et 6% du PIB est moins parlant que dire que le budget de l’Etat a un déficit de l’ordre de 32%,  c‘est-à-dire que sur 100 euros de dépenses, 32 sont financés pat l’emprunt. Dire que la dette publique est d’environ 3 200 milliards d’euros ou 110% du PIB est moins parlant que réaliser que cela représente  plus de 46 000 euros par Français, bébés compris ! Et dire que le seul paiement des intérêts représente plus de 50  milliards d’euros est moins expressif que réaliser que c’est désormais le second et bientôt le premier poste budgétaire, qui dépassera donc l’éducation nationale.

Les Français savent que ça ne peut pas durer, alors que le dernier budget à l’équilibre remonte à 1974 : 50 années de déficit ininterrompu. Pour diminuer le déficit, il n’y a que deux solutions, réduire les dépenses ou augmenter les prélèvements obligatoires, impôts et cotisations sociales, ou faire les deux choses à la fois. La réalité est plus complexe, car la seconde solution n’en n’est pas une et conduirait à des catastrophes encore plus grandes. Il faut d’abord réaliser que nous ne sommes pas seuls au monde, mais dans une économie ouverte et, en Europe, dans un marché unique. Or, si les prélèvements obligatoires servent bien à financer les dépenses, ils n’en représentent pas moins une charge qui pèse sur notre compétitivité, ce qui pénalise croissance et emploi. Il se trouve que la France a le taux de prélèvements obligatoires le plus élevé de l’union européenne : il était en 2022 selon l’Insee de 48% du PIB, contre 41% en moyenne dans l’UE à 27 pays. Pour le dire de manière plus explicite, les Français passent à peu près six mois de l’année à financer les budgets de l’Etat, des collectivités et de la sécurité sociale. Certes, on dira que cela finance les dépenses publiques d’éducation de santé ou de retraite. Mais sommes-nous certains qu’ayant les prélèvements les plus élevés, nous avons la meilleure éducation, le meilleur système de santé ou les meilleures retraites ? Et comment rester compétitif dans une économie ouverte si les charges des familles et des entreprises sont plus élevées qu’ailleurs ? Quant aux dépenses publiques, elle représentant 57% du PIB, la différence avec les prélèvements étant, pour l’essentiel, les déficits publics.

Une augmentation des prélèvements, des impôts ou des cotisations sociales, quels qu’ils soient, plomberait encore plus notre économie et menacerait croissance et emplois. Et puisque la question du pouvoir d’achat revient au premier plan, toute hausse des prélèvements réduirait le pouvoir d’achat en diminuant le revenu disponible. Il faut donc, dit-on, n’augmenter les taxes  que les très hauts revenus ou les « suer-profits ». Mais qui sont les plus riches ? S’il s’agit des ménages et de l’impôt sur le revenu, faut-il rappeler que seuls moins de 45% des ménages le paient. Il est beaucoup question de justice fiscale, mais l’impôt sur le revenu, en raison de sa progressivité forte, est très concentré : les 10% les plus riches assurent à eux seuls 75% des recettes de l’impôt sur le revenu. Que ceux qui ont le plus de revenus paient plus que ceux qui gagnent moins est légitime, mais, en France, ‘l’impôt sur le revenu est déjà hyper-concentré sur les 10% ayant les revenus les plus élevés. Les taux actuels sont déjà très élevés et veut-on, comme cela était le cas en Angleterre pour les revenus de l’épargne, avant l’arrivée de Margaret Thatcher, avoir un taux de 98% ? Les impôts des plus riches  sont déjà à des niveaux confiscatoires ; cela n’est ni moral, ni équitable, ni judicieux sur le plan économique. D’ailleurs, on pourrait s’interroger sur la légitimité d’un impôt progressif ; la « flat tax » (l’impôt proportionnel) semble plus équitable : chacun est imposé au même taux et donc, bien entendu, les plus riches paient plus que les autres.

Mais les Français veulent bien accroitre la fiscalité sur les « super profits ». Cette expression n’a économiquement aucun sens. Les profits sont plus ou moins élevés suivant l’état de la concurrence, l’efficacité des entrepreneurs et l’importance de la demande. C’est le jeu normal de l’économie et si on trouve naturel de rémunérer le travail ou l’épargne, il est tout aussi normal de rémunérer les entrepreneurs et les actionnaires.  Surtaxer les profits réduit la motivation à entreprendre et à créer des richesses. C’est aussi oublier que les profits servent avant tout à investir, donc à créer de nouvelles productions et de nouveaux emplois. Rappelons que c’est un chancelier allemand social-démocrate-et non « ultra-libéral », Helmut Schmildt, qui a expliqué que « les profits d’aujourd’hui font les investissements de demain et que les investissements de demain font les emplois d’après-demain ».

Il n’est donc ni possible économiquement, ni équitable d’augmenter encore les impôts des plus riches ou des entreprises et, de toute façon, de nouvelles taxes sur les entreprises finissent toujours par se retrouver dans les prix et donc pénalisent à terme le consommateur. Mais une hausse des impôts est aussi une erreur sur le plan budgétaire. Nous sommes à un tel niveau de prélèvements que toute hausse réduirait l’incitation à travailler, entreprendre ou épargner : c’est la fameuse courbe de Laffer, que l’on semble oublier en France. Tout le monde comprend qu’un taux d’imposition de 100% rapporte zéro car personne ne travaille pour rien. Mais un taux de 90, 80, 70, etc. va décourager une parie des personnes concernées et réduit la base imposable et donc au-delà d’un certain seuil, depuis longtemps dépassé en France, la hausse du taux d’imposition réduit l’activité économique, donc la matière imposable et rapporte moins qu’un taux plus faible. Dans les très rares cas récents où il y a eu une baisse de l’impôt sur les sociétés ou sur les revenus de l’épargne, les recettes fiscales ont augmenté, car la matière imposable a augmenté.

Mais Laffer n’a rien inventé. On savait cela depuis longtemps. Au XIX° siècle les professeurs de finance publiques disaient déjà à leurs étudiants en droit « les hauts taux tuent les totaux » selon l’aphorisme emprunté à Barthélémy de Laffemas, ministre de Sully. Aujourd’hui on dit « l’impôt tue l’impôt » ! Mais on le savait déjà au XVIII° siècle et Voltaire, pourtant peu féru d’économie, remarquait déjà, dans sa « Diatribe à l’auteur des éphémérides » de 1775, que lorsque Turgot diminua de moitié les impôts sur la « marée fraiche », il y eut l’année suivante trois fois lus de charriots et donc bien plus de rentrées fiscales. «  Donc le vrai moyen d’enrichir le roi et l’état est de diminuer tous les impôts sur la consommation ; et le vrai moyen de tout perdre est de les augmenter. ». Si Voltaire l’avait compris, il y a deux siècles et demi, peut-être les hommes politiques d’aujourd’hui peuvent-ils le comprendre ?

Augmenter les impôts est donc une erreur économique, budgétaire et morale. Mais le problème de la dette reste intact. Il n’y a donc qu’une solution, que Turgot avait déjà recommandée à Louis XVI : diminuer les dépenses. On objectera que ‘éducation, la santé ou les retraites ont besoin d’argent ce qui est vrai. La seule façon de résoudre ce dilemme est donc de réduire le périmètre de l’Etat, car beaucoup de  « services publics » pourraient être assurés à moindre coût par le secteur privé, grâce à la concurrence. C’est la seule façon de réduire la dette, tout en permettant à chacun de bénéficier de services de qualité. Beaucoup de pays l’ont fait. Pourquoi pas nous ? Cela nécessite de dépasser les préjugés idéologiques.

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