L’affaire Petraeus, du nom du directeur de la CIA contraint à la démission, marque la chute du mur de l’intimité.
Par Frédéric Prost.
Le 9 novembre se devait de rester dans les mémoires comme la date de la fête de la liberté. C’est le jour où, en 1989, le mur de Berlin fut abattu. Seulement voilà : nous sommes en 2012 et c’est aussi le jour où le directeur de la CIA a été contraint à la démission suite à une affaire comme seul les américains, et quelques politiciens français, peuvent nous en fournir : la mise au jour d’une relation extra-conjugale avec jalousies, amants dans le placard etc. On pourrait en rester à ce niveau de lecture, ou bien se contenter de remarquer, comme l’a fait Guy Sorman, que Petraeus est le premier général tué par internet. L’affaire est beaucoup plus inquiétante que cela pour les libertés individuelles.
Comme nous l’avons déjà abordé dans ces colonnes, internet ne fait pas bon ménage avec la vie privée. L’affaire Petraeus est particulièrement effrayante du fait même de la qualité de la personne concernée. Pour dire les choses brutalement : si même le directeur de la CIA, une des plus grandes agences d’espionnage du monde, n’arrive pas a protéger sa propre vie privée dans quel état d’esprit devrait se sentir le citoyen lambda ? D’ailleurs l’actualité est riche en ce moment en ce qui concerne la confidentialité des données car il semblerait que l’Elysée n’ait pas réussi à l’assurer le moins du monde non plus.
Reprenons à grands traits la chronologie de l’affaire : Paula Broadwell, une universitaire (diplômé de West-Point) spécialisée dans la stratégie et l’antiterrorisme, écrit une biographie du général David Petraeus alors qu’il était commandant en chef des armées US en Afghanistan. Ils deviennent amants courant 2011. Durant le mois de mai 2012, Jill Kelley, une amie de Petraeus et incidemment de John Allen (l’actuel commandant en chef des forces de l’OTAN en Afghanistan qui était en vue pour le poste de commandant suprême des forces alliées en Europe avant ce scandale), porte plainte contre un harcèlement numérique formé de mails menaçants et l’accusant d’avoir une relation avec Petraeus. Une enquête du FBI est ouverte, remonte à l’origine de ces mails. Paula Broadwell est interrogée et révèle à cette occasion l’affaire qu’elle avait avec le général Petraeus.
Il y a tellement de choses à dire sur cette affaire qu’on ne sait presque plus par où la prendre. Nous nous contenterons ici de l’aborder sous l’aspect de la confidentialité à l’heure d’internet. La première remarque, que nous avons déjà évoqué en introduction, est que tout cela est au mieux inquiétant : les plus hautes sphères, y compris les dirigeants chez les espions professionnels, n’arrivent pas à assurer le minimum de confidentialité. Cette affaire est encore plus frappante que l’affaire des fuites des cables diplomatiques de wikileaks. Paula Broadwell a essayé de protéger son identité en utilisant des comptes mails anonymes. Cela n’a visiblement pas suffit. En effet le FBI a utilisé le fait que Google, Yahoo et consorts enregistrent les adresses IP a partir desquelles les mails sont envoyés pendant plus d’un an. En croisant les informations sur les différents comptes utilisés depuis une même adresse ils ont pu facilement remonter à elle. Les enquêteurs ont ensuite vérifié que les lieux liés à ces adresses correspondaient bien à l’emploi du temps de Mme Broadwell, quitte a utilisé les données de géolocalisation fourni par son opérateur de téléphonie, quels services de Wifi dans les hôtels elle avait utilisé etc. P. Broadwell n’a pas commis l’erreur la plus simple, celle d’envoyer les mails anonymes depuis sa propre connexion internet mais elle n’a pas utilisé de système de communications anonymes non plus. Mais à chaque nouvel hôtel où elle se rendait le nombre de suspects partageant la même adresse IP diminuait : il en suffit de trois ou quatre pour qu’un seul nom apparaisse.
Encore plus fort il apparaît que Petraeus et Broadwell échangeait des mails selon la technique connue qui consiste à ne pas envoyer mais à partager un compte et à sauver le mail dans un répertoire que l’autre consultera en se connectant à son tour. Ce système à l’avantage apparent de ne pas utiliser l’envoi de mail. Mais ce n’est qu’une illusion car de toutes façons le mail est enregistré dans le nuage (il transite donc dans le réseau que vous le vouliez ou non) et même d’un point de vue légal c’est pire : comme ce n’est pas une communication à proprement parler les enquêteurs n’ont même pas besoin d’une décision de justice pour forcer les opérateurs à le leur livrer.
Ce qui est également exemplaire dans cette affaire est l’enquête du FBI. C’est à mon avis là que se trouve le véritable scandale. Les informations ont été obtenues le plus simplement du monde : en demandant, c’est à dire que l’exécutif n’a même pas besoin du judiciaire ou d’une quelconque commission rogatoire. De plus cette affaire commence de manière anodine : c’est du Vaudeville au commencement, il ne faut pas l’oublier. Les enquêteurs auraient pu s’arrêter une fois l’identité de la personne à l’origine des mails pour lesquels il y avait une plainte, mais non ils ont poursuivi bien au delà du raisonnable la collecte d’informations (incluant des mails d’autre personnes, d’autres comptes n’ayant aucun rapport avec l’enquête originelle). Toute ressemblance avec La vie des autres, superbe film sur la surveillance généralisée en RDA, n’est pas fortuite.
Ce qui ressort de cette affaire est que vous pouvez supposer que si vous écrivez quelque chose par mail, le gouvernement finira par le savoir. Même s’il existe des techniques cryptographiques à l’épreuve de toutes les curiosités la moindre erreur, le moindre faux-pas peut permettre de dérouler le fil et de remonter les pistes. La seule véritable limite est la motivation et les moyens des enquêteurs. Or qui n’a jamais fait d’erreur ? Qui n’a jamais fait de « reply to all » au lieu d’une simple « reply » ? Si vous pensez que vous maîtrisez tout rappelez vous de ce qui est arrivé au directeur de la CIA un 9 novembre au soir.
C’était quand même la moindre pour un directeur de CIA de savoir qu’on n’envoie jamais un mail confidentiel en clair… Il suffirait simplement que la ligne soit écoutée, risque hautement plus probable dans son cas que dans celui du quidam anodin.
Pour la confidentialité, il suffit de mettre les données sur un dmg ou un iso crypté à 256 avec une longue phrase comme mot de passe et le tour est joué.
« … The Obama Putsch regime is now consolidating power and is purging the military of any flag officers that either have inside information that could blow the lid off the regime and/or men that they fear could organize a junta or counter-coup. And, as with Rohm and the SA, the modern American flag officer corps, as I have said many, many times, is a hive of sickening moral degenerates. Almost ALL flag officers today are adulterous fornicators who can be blackmailed exactly like Petraeus.
When I was a teenager back in Leavenworth, Kansas, I had occasion to become acquainted with a German lady who had just married a US Army flag officer that she met while working as a civilian contractor on a US Army base in Germany. Her husband was transferred to Ft. Leavenworth, which almost all flag officers pass through at some point. She was a strikingly handsome woman and super-sharp. She was very happy and was eagerly trying to get pregnant and start her family, as she was 35 or so at the time.
The last time I saw her, she was in a state of shock. She had left her husband, was filing for divorce, homeless and trying to organize getting back to Germany. Here is what happened.
She had finally become pregnant. She had just found out and hadn’t even told her husband yet. They had been invited to and were attending a party being thrown by the post commander at his home that evening. Most of the upper-echelon flag officers at Ft. Leavenworth would be there. She was very excited and happy that she and her husband were literally now moving amongst the highest levels of the top brass in the US military, and she planned to tell her husband that night after the party that she was pregnant.
They arrived at the party in the gorgeous and huge old home of the post commander. In the foyer, there was a large bowl that all of the men placed their car keys into upon entering the house. She figured that this had something to do with drunk driving protections, as there was certainly drinking at this party. She thought nothing of it.
As midnight rolled around, the party suddenly concluded. All of the couples then moved into the foyer. One by one, the wives stepped up to the bowl full of keys and drew out a set at random. The wives then matched the keys up with their male owners and then left with that man.
It was a wife-swapping party.
When my acquaintance realized what was going on she refused. Her husband was livid.
When she got home she packed a bag and left. The stress of going from being on top of the world and happier than she had ever been to having her marriage destroyed, being betrayed so casually and sickeningly by her husband, and being made essentially homeless and penniless in a span of about five minutes caused her to immediately miscarry the baby a few hours later… »
http://barnhardt.biz/
dommage que ceci n’ait aucun rapport avec l’article.
Et on est censé croire cette histoire? Parce que je ne vous connais pas, mais je suis tout-à-fait capable de vous raconter la même en France, par exemple, et tous nos lecteurs seraient censés penser que nos officiers supérieurs sont d’abominables fornicateurs sur le simple témoignage d’une » Allemande rencontrée dans mon adolescence »?
Je suis 100% avec vous sur le danger des lois liberticides sur la confidentialité des données personnelles numériques, souvent justifiées pour soit-disant contrer les réseaux terroristes. D’autant plus que cela procure, comme vous le montrez, un immense pouvoir à l’Etat et en conséquence à certains individus qui pourraient profiter d’un accès à ces informations.
Cependant, si ce cas particulier illustre bien les difficultés que peuvent avoir des individus à échanger de l’information discrètement, il n’en demeure pas moins qu’à un poste de direction de la CIA, ce n’est pas les moeurs de Petraeus qui sont causes de son éviction, mais la diffusion à sa maîtresse d’informations confidentielles liées à son travail. Or, dans le cadre de ses fonctions le général savait pertinemment ce qu’il risquait et qu’il était nécessairement étroitement surveillé. D’ailleurs, il y a peut-être de nombreuses exceptions dans la procédure judiciaire mis en oeuvre par le FBI, qui pourraient expliquer l’absence de commission rogatoire, pour ce cas particulier.
De là à généraliser cette affaire à la chute du mur de l’intimité, il y a sans doute un peu d’exagération, même s’il est évident que tous les moyens mis en oeuvre dans cette enquête doivent pouvoir s’appliquer à un individu quelconque…
Ce n’est pas tout à fait le cas : déjà Broadwell n’est pas une citoyenne random, outre sa spécialité c’est une lieutenant-colonel de réserve.
De plus si Petreaus a démissionné c’est à cause du scandale autour de son mariage et absolument pas à cause de problème de sécurité. Le seul aspect rassurant de cette affaire est que le FBI a voulu se payer la tête de la CIA par une sorte de compétition bien connue de services proches qui ainsi se neutralisent une peu. Vous pouvez consulter : http://www.washingtonpost.com/opinions/dana-milbank-petraeuss-behavior-is-no-scandal/2012/11/20/7a3357c4-334c-11e2-bfd5-e202b6d7b501_story.html
« Yet the investigation has found no smoking gun — just a few steamy e-mails. President Obama said he sees “no evidence” that national security was compromised, and there’s no serious allegation that the affair harmed Petraeus’s spy work, so it’s baffling that the director of national intelligence suggested, and the president accepted, Petraeus’s resignation. »
CIA – FBI – Big Brother – et tous les fantasmes qui se rattachent à la sécurité font parfois sourire les crédules. L’histoire est cependant truffée de cas analogues. Se souvient-on des mises en cause CIA-FBI lors du triste cas 9/11 ? Puis la chaleur du cas (…) Clinton-Lewinski… plus récemment DSK et son petit personnel hôtelier… Bien d’autres croustillants réjouissent les sordides tabloïd bas-de-gamme via paparazzi, puis par nos « bons » médias qui cherchent leur audimat et leur fric souillé par les voyeurs du grand-public lambda !
Ce qui est frustrant me semble cette récupération POLITICIENNE pratiquée partout aujourd’hui sur des histoires banales, telles celles de cul et d’affinité entre des personnes de sexes opposés. Ferait-on autant de randam sur des cas d’homosexualité tant légalisés ? Pas sûr !
Au-delà, ne versons pas dans la paranoïa.
Les français s’illustrent depuis (1976 – Simon Nora & Alain Minc ?) sur les questions de la protection de la vie privée. Jusqu’à avoir bétonné des aberrations législatives dans lesquelles nos politiciens savent exceller. Puis d’en faire le plat cauchemardesque qui hante toute notre culture actuelle !
Obama n’avait-il pas lui-m^me promu Paetrus à ce poste-clé ?
Qui a voulu le démettre ? Ceci n’est pas clair, mais procède de méthodes fort ordinaires, partout, avec la complicité de médias « bien intentionnées » …
«Ce qui est frustrant me semble cette récupération POLITICIENNE pratiquée partout aujourd’hui sur des histoires banales»
Qu’il y ait des motivations politiciennes, peut être, cependant, il faut relativiser.
Tolérer certains comportements moraux de la part de responsables est naïf, des comportements ne sont pas compatibles avec la fonction.
Il faut savoir qu’à ce niveau de responsabilité; la moindre faiblesse peut être exploitée par des services secrets adverses.
Quand on est chef de la CIA ou un haut responsable étatique, on doit avoir un comportement moral sans failles, sans quoi on prend le risque qu’il y ait des fuites.
C’est justement le fait de vouloir imposer une pureté irréaliste (« comportement moral sans faille ») qui crée le risque systémique. C’est un peu similaire, quoique dual, au problème lié au « too big to fail ». Le fait même que n’importe quoi (y compris des histoires entre adultes consentants) puisse être utilisé pour mettre un directeur sur un siège éjectable qui crée le risque : c’est parce qu’on considère que la moindre faiblesse peut être exploitée qu’elle l’est.
On observera en plus que dans l’affaire Petraeus sa maîtresse n’était pas une gogo danseuse russe (bien que je n’ai rien contre ces personnes là) aux accointances interloppes mais bien d’un officier supérieur de réserve de l’armée US dont le travail est la recherche en géopolitique.
oui, mais !
est-ce aussi simple, est-ce seulement « ça » qui fait tomber le patron de la CIA ?
version plus élaborée, plus plausible:
http://www.dedefensa.org/article-renforcement_du_point_om_ga_inverti_et_autodestruction_19_11_2012.html
http://www.dedefensa.org/article-notes_sur_l_effet-benghazi__12_11_2012.html
Je suis un libéral conservateur réactionnaire qui croit en la Vertu et ses vertus. Je crois qu’un responsable doit l’être en toute occasion; en l’occurrence,un officier du niveau de Petraeus, ex-commandant en chef de l’Armée américaine, ex-héros de la guerre en Irak puis en Afghanistan, chef qui a tenu la vie de ses subordonnés entre ses mains de responsable, devenu l’incarnation de la sécurité du Peuple américain, n’avait pas le droit, d’un point de vue de morale tant privée que publique, de finir en acteur de vaudeville. Il me fait penser au général Boulanger dont Clémenceau fit la cruelle épitaphe qui suit: » Il est mort comme il a vécu, en sous-lieutenant ».