Entretien avec Mathieu Laine pour le « Dictionnaire du libéralisme » – Première partie

À l’occasion de la sortie du Dictionnaire du libéralisme, nous avons posé quelques questions à Mathieu Laine. Sur l’ouvrage et sur le libéralisme en France de manière plus générale.

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mathieu laine

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Entretien avec Mathieu Laine pour le « Dictionnaire du libéralisme » – Première partie

Publié le 5 juin 2012
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À l’occasion de la sortie du Dictionnaire du libéralisme, nous avons posé quelques questions à Mathieu Laine. Sur l’ouvrage et sur le libéralisme en France de manière plus générale.

Combien d’entre nous (surtout les jeunes et les novices du libéralisme) se sont retrouvés, pris sous un feu roulant et croisés de questions, incapables de répondre à un déluge d’antilibéralisme facile plein d’arguments éculés ? Il n’est en effet pas rare, lors d’un débat entre amis ou entre adversaires, de rapidement atteindre les points Godwin du type « le libéralisme c’est pour les riches », « les libéraux sont des égoïstes intéressés par l’argent », « oui mais bon un patron ça peut rien faire sans employés alors… » etc.

Au bout d’un moment, les arguments viennent à manquer et là vos adversaires jubilent car ils sont persuadés d’avoir eu le dessus malgré la faiblesse de l’argumentaire. Rassurez-vous, ce temps-là est révolu ! Grâce au très bon Dictionnaire du libéralisme, écrit sous la direction de Mathieu Laine par plus de 65 auteurs, tout, tout, vous saurez tout sur le libéralisme.

Les lecteurs fidèles de Contrepoints auront remarqué la série d’articles intitulée « Idée reçue, le libéralisme… ».

Nous avons en effet d’abord décidé de vous présenter l’ouvrage au fil de l’eau, en reprenant les entrées les plus intéressantes du Dictionnaire. Mais il y aurait tant d’articles ! Les libéraux sont-ils contre les pauvres ? Égoïstes ? Anglo-Saxons ? Qui sont les principaux auteurs qui ont contribué à en définir les contours ?

Bref, toutes les questions relatives à cette doctrine sont traitées de manière synthétique, mais pas succincte. On pourra au choix picorer au hasard les articles qui nous intéressent ou le lire d’une traite. Enfin, dans l’idée parce que ledit ouvrage fait quand même 600 pages…

Pour sa sortie, nous avons posé quelques questions à Mathieu Laine. Sur le Dictionnaire et sur le libéralisme en France de manière plus générale. Vous trouverez ici la première partie de cet entretien.

 

Première partie de l’entretien

Contrepoints — Quels ont été les critères de sélection des auteurs ? Ont-ils tous facilement accepté ?

Mathieu Laine — Il était très important pour moi d’offrir à toute personne qui s’intéresse à la pensée libérale une vision complète et non caricaturale.

Parce qu’on associe à tort le libéralisme à un vulgaire économisme, à un anarchisme ou à une pensée anglo-saxonne, il était primordial et logique pour qui connaît vraiment ce courant intellectuel, de convier non seulement des économistes mais également des juristes, des philosophes, des historiens, des sociologues, des spécialistes de sciences politiques ou d’anthropologie.

J’ai aussi souhaité montrer la variété de cette pensée et rassembler dans un même livre la grande et passionnante famille des libéraux : les héritiers de Aron, de Tocqueville, de Constant, de Hayek, de Bastiat, de Rand et de Rothbard.

J’ai également voulu prendre les meilleurs, pour donner la chance à notre travail commun de devenir une référence.

Ainsi, le lecteur pourra lire les entrées de 65 auteurs de premier plan dont Florin Aftalion, Nicolas Baverez, Raymond Boudon, Patrick Cabanel, Monique Canto-Sperber, Jean-Pierre Dupuy, Guido Hülsmann, Denis Kessler, Augustin Landier, Alain Laurent, Philippe Nataf, Philippe Raynaud, Jean-Jacques Rosa, Pascal Salin, Michel Schneider, Alain-Gerard Slama ou David Thesmar.

J’ai également invité des étrangers comme le prix Nobel d’économie Gary Becker, l’économiste péruvien mondialement connu Hernando de Soto, le président du Minaret of Freedom Institute, Imad-Ad-Dean Ahmad, et l’économiste espagnol Jesus Huerta de Soto.

Je profite de cet entretien avec Contrepoints, un site que je lis avec gourmandise et dont je salue l’ambition et la qualité, pour remercier à nouveau tous ces penseurs et pour renouveler plus particulièrement ma gratitude à deux auteurs qui ont contribué énormément à l’ouvrage et ont été de formidables complices intellectuels dans cette aventure : Jean-Philippe Feldman et Frédéric Sautet, réciproquement professeurs de droit et d’économie. Tous les auteurs de ce dictionnaire, pourtant très occupés et abondamment sollicités, ont répondu favorablement et avec un enthousiasme égal à leur talent. Tous ont salué la démarche, l’envie de répondre aux idées reçues « par le haut », en allant au fond des sujets, et tous ont joué le jeu consistant à montrer non seulement ce qui unit mais également ce qui distingue les différentes approches du libéralisme, révélant ainsi son actualité, sa richesse et sa puissance conceptuelle.

Fruit de quatre ans de travail, c’est un bonheur pour nous tous de voir ce livre en librairie.

Pourquoi avoir écrit ce dictionnaire ? Quel effet espérez-vous de sa sortie ?

ML — Quoi de plus efficace qu’un dictionnaire spécialisé pour découvrir un sujet ? Quoi de plus agréable aussi car on peut picorer selon ses goûts, l’actualité d’un thème, l’envie de lire les entrées rédigées par tel ou tel auteur, etc.

Or le libéralisme n’avait pas son dictionnaire ! C’est en effet le premier dictionnaire du libéralisme, avec la définition large que je lui ai donnée, non seulement en langue française mais dans le monde. Il va d’ailleurs être traduit en de nombreuses langues.

La pensée libérale occupe une place primordiale dans l’histoire des idées politiques et économiques. Il fallait réparer ce manquement. Lorsque Véronique Sales, qui travaillait à l’époque chez Larousse, la « grande maison des dictionnaires », m’a proposé de diriger celui-ci, j’ai été très touché. Le pari était fou car cela impliquait un travail considérable (et je créais, dans le même temps, ma société de conseil en stratégie) mais j’ai immédiatement accepté car je suis passionné par ces idées, je suis infiniment convaincu qu’elles méritent un autre traitement que celui qui lui est généralement accordé, et je crois profondément à la capacité de chacun de juger en honnête homme dès lors qu’il a accès à des informations solides et référencées.

J’ai donc plongé, avec mes amis, dans cet univers intellectuel passionnant dont nous avons tenté de révéler, de manière accessible et sans tomber ni dans le scientisme, ni dans l’académisme, un certain nombre de trésors. J’espère de tout cœur que ce dictionnaire va devenir une source et une référence pour tous ceux qui écrivent sur le sujet ou veulent mieux le connaître.

Alors même que les hommes politiques rivalisent tous d’antilibéralisme, l’accueil très favorable réservé au dictionnaire par l’ensemble des médias français, de droite comme de gauche, est un signal très encourageant. Changer les mentalités et la culture est une tâche immense, mais j’espère que ce dictionnaire permettra de persuader les hommes et les femmes qui vivent dans notre pays qu’il existe une alternative à la pensée unique.

Pourquoi un dictionnaire plutôt qu’un livre pédagogique ?

ML — Il n’y a pas plus pédagogique qu’un dictionnaire, surtout quand il est précédé, comme nous l’avons fait, d’une longue et riche introduction sur les idées reçues et sur les temps forts de cette pensée. Et les éditeurs le savent, les Français aiment beaucoup les dictionnaires. Nous avons une longue tradition encyclopédique qui remonte aux Lumières et même avant.

Ce dictionnaire vient combler un vide dans cet espace où la pensée libérale n’était pas bien représentée. Il est aussi plus facile de consulter un dictionnaire spécialisé que de se plonger dans un cours ou un essai de quelques centaines de pages. Avec le dictionnaire on peut se concentrer sur un sujet à la fois, et découvrir, en deux ou trois pages, qui est Boisguilbert, Turgot ou Say et ce que pensent les différentes écoles libérales de la concurrence, de l’éducation, du catholicisme, du principe de précaution, de la révolution française ou de la paix.

Moi qui l’ai lu plusieurs fois, y compris dans l’ordre (de Action humaine à Max Weber), je dois dire que c’est assez jubilatoire car on passe d’un sujet à un autre, en deux ou trois pages, et on apprend plein de choses ! Nous avons enfin mis à la disposition du lecteur un index des noms propres et un index des concepts qui font de cet ouvrage un outil de travail précieux.

L’avez-vous conçu pour les néophytes, ou les personnes déjà confirmées ?

ML — Le dictionnaire s’adresse à toute personne souhaitant mieux connaître la pensée libérale et dépasser les caricatures. Il ne faut absolument pas être un spécialiste pour le lire. C’est la philosophie de cette collection chez Larousse et c’est la mienne dans la bataille des idées.

La lecture complète de ce dictionnaire permet-elle de cerner la totalité des aspects du libéralisme ?

ML — Bien sûr que non, le libéralisme est une pensée bien trop vaste et bien trop riche pour être encapsulée en un peu plus de 600 pages. Mais je crois pouvoir dire que nous en présentons non seulement l’essence mais également la plupart de ses représentants, de ses courants et de nombreuses applications. C’est a minima une très belle et très complète introduction.

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Entretien réalisé par PLG, pour Contrepoints.

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