Depuis qu’il a reçu le prix Nobel d’économie, Philippe Aghion s’exprime beaucoup sur les plateaux de télévision, notamment sur la fiscalité ; un domaine dont il reconnait pourtant lui-même qu’il n’est pas un expert. Donnons-lui crédit de son opposition à la taxe Zucman au motif (juste selon nous) qu’elle fragiliserait les entreprises et autres start-up innovantes. Mais il est quand même favorable à taxer les riches et son cheval de bataille est la holding familiale sur laquelle il faut « taper » ! Dans sa déclaration de politique générale du 14 octobre 2025, le premier ministre Sébastien Lecornu a lui aussi dénoncé l’optimisation fiscale qui passe par les holdings familiales et sa volonté de davantage les encadrer, voire les taxer.
Haro donc sur les holdings familiales : un terme d’autant plus facile à jeter en pâture au bon peuple qu’il évoque la méchante finance internationale (anglicisme oblige), permet tous les phantasmes, et que la plupart de nos concitoyens l’ignorent. Oui, en taxant ces structures considérées comme opaques on introduirait plus de « justice fiscale » et on pourrait soulager nos finances publiques qui sont dans l’état déplorable que l’on connait. Vraiment ?
Mais qu’est-ce qu’une holding familiale ? Une holding familiale est une société qui détient des parts dans d’autres entreprises (filiales) et centralise ainsi la gestion du patrimoine d’une famille. Grâce à la holding les actionnaires familiaux vont pouvoir gérer d’une même voix leurs participations dans leurs sociétés. Il s’agit donc avant tout d’un outil de gouvernance permettant d’éviter la dispersion des voix d’actionnaires individuels. C’est donc une structure largement utilisée par les familles fondatrices de sociétés industrielles et commerciales pour peser au sein des conseils d’administration des filiales. Il s’agit donc avant tout d’une technique de contrôle : la holding contrôle les filiales et le dirigeant de la holding, par hypothèse majoritaire dans cette dernière, contrôle l’ensemble. La holding familiale présente, également l’avantage de garantir l’inaliénabilité d’une partie du capital. Actionnaire de référence réunie en holding, la famille ainsi est toute puissante pour fixer la stratégie du groupe qu’elle contrôle. Au-delà de ces avantages de gouvernance, la holding familiale est également utilisée pour alléger le coût financier de l’acquisition du contrôle de sociétés par effet de levier (LBO) ; et pour faciliter la transmission d’une entreprise sociétaire aux héritiers (via le pacte Dutreil).
A l’heure où l’on cherche à protéger et développer les entreprises familiales il est curieux que l’on veuille taper sur cet outil de contrôle et de transmission des entreprises dont toutes ne sont pas des multinationales mais de grosses PME.
Sur le plan fiscal – et c’est là -dessus que se concentrent les critiques – la holding bénéficie du système d’imposition mère-filiale : les dividendes remontent donc en quasi-franchise d’impôt, vers la holding qui pourra utiliser les sommes en question pour ses besoins propres, par exemple, pour rembourser les emprunts qu’elle aura souscrit, voire procéder à des acquisitions d’entreprises. Ce régime fiscal favorable va se traduire aussi par l’accumulation de cash au sein de la holding. La dérive du système, naturellement dénoncée bruyamment par la classe politique, est l’utilisation de cette trésorerie importante pour réaliser des investissements personnels (immobilier, biens de luxe, etc.) n’ayant aucun rapport avec l’activité industrielle ou commerciale des filiales. C’est la raison pour laquelle certains parlementaires proposent de réintroduire un « précompte mobilier » sur les dividendes non distribués dans ces holdings, avec un taux proposé de 15 %. Ce mécanisme obligerait les holdings à payer un impôt sur les revenus qu’elles conservent. Mais nos Fouquier-Tinville des holdings oublient qu’elles bénéficient d’un mécanisme d’atténuation de l’impôt sur les sociétés parce que les dividendes qui leur reviennent ont déjà été taxés dans leurs filiales et le seront chez leurs actionnaires personnes physiques quand il leur sera distribué. Des mesures pour pénaliser les holdings auront forcément un impact à terme sur le développement des entreprises productrices qu’elles créent, détiennent et financent. .
Bercy, de son côté, planche aussi sur un dispositif visant spécifiquement la « trésorerie excédentaire » des holdings patrimoniales. Il s’agirait de taxer les fonds qui ne sont pas réinvestis dans des activités professionnelles, mais utilisés pour acquérir des biens personnels.
Il est difficile d’apprécier ce que ces diverses propositions rapporteront au budget de la France, mais a priori, cela sera nettement plus faible que la taxe Zucman qui portait sur 2 % du capital du patrimoine (y compris professionnel) des ultra riches. Mais à défaut de cette taxe, « taper » sur les holdings familiales permettra de montrer que le gouvernement s’attaque à l’ »injustice fiscale ». Attention à ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain et de tuer notre capitalisme familial.
3 réponses
Nos veules francais sont dans un état d esprit détestable…..aveuglés par les passions tristes ils sont prêts à se suicider économiquement
Il y a un petit côté nihiliste dans cette façon de vouloir tout détruire en France!!!!!
Ils y sont arrivés !
Il me semblait aussi que le fait d’acquérir des biens à usage visiblement personnel dans une holding, terme juridique qui n’existe pas en droit français, constituait un abus de bien social. Et qu’à ce titre, l’administration fiscale pourrait redresser la société détentrice. Mais peut-être que je peux me trompe ?