Journal d'actualité libéral
|
mercredi 19 novembre 2025

Informer sur la santé : le privé fait mieux que le public

Temps de lecture : 4 minutes

Depuis plusieurs mois, le sujet de la « désinformation en santé » préoccupe les pouvoirs publics. Pour le ministère de la Santé, il est nécessaire que l’État prenne en main le sujet avec détermination. Il serait plutôt judicieux de laisser faire les acteurs privés.

Après le colloque organisé, le 18 avril 2025, par le ministère de la Santé afin de lutter « contre l’obscurantisme et la désinformation en santé », nous avions tenté d’expliquer qu’il pouvait être risqué que l’État fasse de la « défense de la science une politique publique à part entière » comme l’avait alors suggéré le ministre chargé de la Santé et de l’Accès aux soins, Yannick Neuder. Une « science officielle » serait dangereuse, mais aussi littéralement incroyable, la parole étatique étant décrédibilisée depuis longtemps.

 Il est vrai que certains sont prêts à croire n’importe quoi. Les jeunes, par exemple, sont souvent « accros » à des influenceurs peu fiables mais qui savent capter leur attention et peser sur leurs choix. Ces influenceurs deviennent parfois « des figures d’autorité entrant en compétition avec les acteurs de la santé » (Pascale Ezan, professeur à l’université Le Havre Normandie).

L’assistant médical de Doctolib

Heureusement, des acteurs privés crédibles ont commencé à s’intéresser à l’information en matière de santé. Le dernier en date est Doctolib. On ne présente plus cette entreprise fondée en 2013 qui propose, en France et dans plusieurs pays d’Europe, un service de prise de rendez-vous médicaux et paramédicaux en ligne, mais aussi des solutions logicielles pour les professionnels de santé.

Il y a quelques jours, son PDG, Stanislas Niox-Chateau, a annoncé que Doctolib voulait lutter contre les « fake news » dans la santé et « remettre la science au centre, avec les soignants et les chercheurs français », en s’appuyant sur l’intelligence artificielle (IA).

L’assistant médical de Doctolib – « le compagnon de santé des Français », écrit Niox-Château – aura pour tâche d’informer et d’orienter. En aucun cas, de diagnostiquer et de prescrire.

Les parents seront les premiers à bénéficier du service avec le lancement de Doctolib Parents, mis au point avec l’appui de la Société française de pédiatrie (SFP), de l’Association française de pédiatrie ambulatoire (AFPA) et du Collège national des sage-femmes de France (CNSF).

Via l’application Doctolib, les parents d’enfants de 0 à 3 ans auront accès à des contenus éducatifs validés par des experts, adaptés à l’âge des enfants et à leurs besoins ; des outils pour alléger la « charge mentale » (suivi du sommeil, des repas, de la croissance et des rappels de santé personnalisés pour les vaccins et visites obligatoires) ; un assistant IA, proposant des réponses sur-mesure (s’appuyant uniquement sur les meilleures sources et recommandations officielles à jour sur la santé et le développement de l’enfant), et les orientant vers un soignant ou le 15 quand c’est nécessaire.

Doctolib Parents sera proposé en version gratuite ou payante pour ceux qui souhaitent un accompagnement plus personnalisé et complet ainsi qu’un usage illimité de l’assistant IA.

Google, acteur majeur du secteur de la santé

Le géant américain Google est actif depuis une vingtaine d’années maintenant dans le secteur de la santé. Il fournit des solutions d’intelligence artificielle pour améliorer les diagnostics (AMIE), des outils collaboratifs facilitant le travail entre équipes médicales, une plateforme cloud permettant le stockage sécurisé de lourds fichiers d’imagerie, une reconnaissance vocale destinée aux médecins ou encore des logiciels d’exploitation des bases de données de santé.

En matière d’information médicale, c’est plutôt sa filiale YouTube qui est à la manœuvre. Depuis 2023, la plateforme met en avant les contenus provenant de sources fiables et expliquées par des professionnels de santé experts. Concrètement, il s’agit de labelliser des vidéos produites par des professionnels. Elles apparaissent en tête des résultats de recherche et sont clairement identifiées.

Par exemple, si vous recherchez « infarctus » sur YouTube, deux vidéos vous sont d’abord proposées, rangées sous la bannière « Gestes de premiers secours provenant de sources santé ». Il est bien précisé qu’elles sont là « à titre informatif seulement » et qu’en cas d’urgence, il faut appeler le 15. La première vidéo s’intitule « Que faire en cas d’arrêt cardiaque ? ». Elle émane de la Croix-Rouge française et un encadré bleu indique que ce contenu est « publié par une chaîne en collaboration avec un médecin ou infirmier(ère) inscrit(e) au RPPS » (le répertoire partagé des professionnels intervenant dans le système de santé). La seconde vidéo traite de la prévention de l’infarctus du myocarde. Elle a été réalisée par le CHU de La Réunion. Elle est clairement identifiée comme émanant d’une « structure de soins approuvée par le ministère de la Santé » français.

Au début de 2025, le Conseil national de l’Ordre des médecins a rendu publics « Les 10 principes du médecin créateur de contenu responsable ». Cette charte, élaborée par des médecins actifs sur les réseaux sociaux et YouTube, a pour objectif de faciliter « le déploiement d’une information de santé fiable », dans le respect des obligations qui s’imposent déjà aux médecins. Elle vise aussi à lutter contre les « professionnels auto-proclamés qui promeuvent des médecines alternatives. »

L’usine à gaz du ministère de la Santé

Pendant ce temps-là, le ministère de la Santé, à la suite du colloque cité plus haut, a missionné trois experts pour cartographier les acteurs publics, associatifs et académiques mobilisés dans la lutte contre la désinformation, recueillir les expériences et bonnes pratiques, évaluer la coordination actuelle entre les acteurs et les dispositifs d’alerte et formuler des recommandations opérationnelles pour renforcer et pérenniser une stratégie nationale de lutte contre la désinformation en santé. Les travaux des trois experts viendront soutenir la création d’un Observatoire national de la désinformation en santé qui permettra « d’objectiver le phénomène et suivre ses évolutions grâce à des baromètres publics ».

Le ministère prévoit par ailleurs de mettre au point un « programme national d’éducation critique à la santé, avec une composante scolaire, un MOOC grand public labellisé et une mobilisation active des influenceurs ». Il est aussi question de constituer un « réseau d’ambassadeurs scientifiques agréés par le ministère de la Santé » et de soutenir les médias de fact-checking indépendants.

Les trois experts missionnés par le ministère doivent remettre leur rapport au mois de décembre 2025. Rêvons qu’ils concluent que la stratégie nationale de lutte contre la désinformation en santé n’a pas lieu d’être puisque des sociétés privées, avec l’appui de professionnels de santé, font déjà très bien le travail.

Recevez Contrepoints, le journal d'actualité libéral

Abonnez-vous gratuitement à notre journal d’actualité libéral. Recevez tous les matins une analyse libérale de l’actualité que vous ne trouverez nulle part ailleurs.


3 réponses

  1. Ne pas laisser à l’Etat le monopole de l’information sur la santé est capital. Lire sur le sujet le livre de Corine LALO qui a décortiqué le processus de désinformation conçu et orchestré lors de la crise COVID est édifiant. D’autant que les auteurs de contre-informations seront les premières cibles lors de la prochaine crise.

  2. Une fois encore le gouvernement ne comprend pas que son domaine d’action est le régalien et rien d’autre .
    Dans le domaine de la Santé , le Privé est plus performant et moins cher.
    Dans le domaine de l’Economie , les entrepreneurs sont plus performants que ces fonctionnaires qui dirigent sans rien connaître de l’entreprise . Un example ? Les concessions d’autoroute .
    Dans le domaine de l’Education, le Privé est plus efficient et performant que le Public et un élève du Privé coute environ 4 500 euros par an pour 9 200 euros dans le Public.
    Laissez nous faire bon sang.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *


Soutenez Contrepoints – Le média libéral de l’IREF

L’IREF (Institut de Recherches Économiques et Fiscales) est une association indépendante, sans but lucratif, financée uniquement par des dons privés.

Faites un don et soutenez un journal 100 % libre, libéral et sans subvention publique.