Journal d'actualité libéral
|
mercredi 19 novembre 2025

Niveau des élèves français en mathématiques : le naufrage d’une école égalitariste

Temps de lecture : 3 minutes

Depuis plusieurs décennies, le niveau des élèves français ne cesse de reculer, en particulier en mathématiques. Les comparaisons internationales les classent parmi les derniers de l’OCDE. Un constat qui laisse dubitatif sur l’efficacité des réformes pédagogiques menées depuis des années.

« En France, il y a des jeunes qui ont passé des années à l’école et même à l’université et qui n’ont pas les compétences d’un enfant de dix ans » : c’est, textuellement, le pavé dans la mare qu’a jeté il y a quelque temps Andreas Schleicher, le directeur du département d’Éducation et des Compétences de l’OCDE, à l’occasion de la publication du rapport de l’organisation sur l’éducation dans les pays membres.

La baisse de niveau généralisée des élèves dans les pays de l’OCDE est un phénomène avéré auquel l’IREF avait déjà consacré une étude. Le constat est en France de plus en plus évident. L’affaiblissement est tel que ce n’est plus seulement le niveau des élèves qui pose un problème : celui des professeurs suscite également les plus vives inquiétudes. Il est possible, dans le cas des professeurs des écoles dont le concours est départementalisé, d’être admis avec une moyenne de 6/20, même dans de grandes  académies comme celles de Versailles ou de Créteil.

L’Iref s’était penché il y a peu, sur l’apprentissage de la lecture, qui souffre de graves défauts. Intéressons-nous maintenant à cette chute vertigineuse des compétences en mathématiques au pays d’Henri Poincaré et de Descartes.

La baisse des compétences mathématiques touche durement la France

Comme le montre une étude du haut-commissariat à la stratégie et au plan, le niveau en mathématiques baisse de manière abyssale et continue, au moins depuis 1975. Le graphique suivant affiche les résultats des élèves en fonction de leur année de naissance ; ils sont calculés à des âges différents selon les enquêtes, la plus ancienne étant « Lire, écrire, compter ».

Le haut-commissariat précise que ces résultats ont été standardisés, c’est-à-dire que les différents modes de notations des enquêtes ont été mis sur une échelle commune. L’année 2005 est le pivot de la comparaison, le score des différentes enquêtes représentant l’écart observé avec les compétences en mathématiques des petits Français cette année-là.

 

Les résultats, assez parlants, montrent un effondrement du niveau, qui transcende d’ailleurs les classes sociales et les sexes. Entre 1987 et 2017, le score des enfants de cadres passe de 280 à 200, c’est-à-dire en dessous du niveau des enfants d’ouvriers en 1987, lequel suit la même tendance et passe de 240 points à 170.

La massification scolaire, l’influence des réseaux sociaux, le temps passé devant les écrans de plus en plus importants chez les plus jeunes, sont probablement pour beaucoup dans ce phénomène. Il touche l’ensemble des pays développés mais, en comparaison internationale, la France se retrouve souvent en queue de peloton.

Seuls les pays d’Asie de l’Est, avec une éthique de l’effort prononcée, résistent

L’enquête TIMSS (Trends in Mathematics and Science Study) réalisée en 2023, donne 484 points au niveau des élèves de CM2 français : c’est le pire de tous les pays de l’OCDE. A titre de comparaison, la moyenne générale est de 525 points ; le score des élèves coréens est de 594 points, japonais 591points, anglais 552 points, néerlandais 537 points… En classe de 4ème, les petits Français obtiennent 479 points, toujours largement distancés par les Coréens et les Japonais (596 et 595 points), les Anglais (525 points) et les Suédois (517 points), la moyenne s’établissant à 507 points.

Autre graphique, celui de l’enquête PISA (Programme international pour le suivi des acquis des élèves) : cette fois, la baisse de niveau touche tous les pays développés, seul le Japon faisant exception.

Au regard de ces résultats, il devient difficile de nier l’évidence : la France paie aujourd’hui le prix de décennies de réformes inspirées par le pédagogisme et le refus de l’exigence. L’école a sacrifié la transmission des savoirs sur l’autel de l’égalitarisme, produisant une génération d’élèves désarmés face aux défis du monde moderne. Pendant que l’Asie de l’Est récolte les fruits d’une culture de l’effort et du mérite, notre pays persiste dans le déni. Si la France veut éviter un décrochage irréversible, il lui faudra rompre avec cette logique de nivellement par le bas et renouer d’urgence avec l’excellence, l’autorité et la responsabilité.

Recevez Contrepoints, le journal d'actualité libéral

Abonnez-vous gratuitement à notre journal d’actualité libéral. Recevez tous les matins une analyse libérale de l’actualité que vous ne trouverez nulle part ailleurs.


20 réponses

  1. La France n’est plus un pays d’avenir pour nos enfants, les plus brillants partent à l’étranger pour y développer leurs talents dans de meilleures conditions. C’est pourquoi le RN veut maintenant taxer les Français qui vivent à l’étranger, quelle réponse minable à la décadence.

  2. l’effort un mot tabou, l’égalitarisme une utopie dévastatrice, la combinaison des deux en renonçant au premier pour développer coûte que coûte le second aboutit au résultat qui met à mal la compétitivité de la France pour les décennies à venir.
    Un fiasco documenté causé par une idéologie rétrograde.

  3. Il n’y a pas de sujet plus important. L’égalitarisme est tabou dans une grande partie du monde politique et intellectuel, et pas seulement à l’école.
    Un progrès immédiat, certes partiel mais simple à mettre en œuvre, serait de lever le contingentement du nombre d’enseignants dans le secteur privé sous contrat, qui est actuellement fixé à 20 %
    Mais les discussions politiques actuelles ne portent pas sur ce sujet

  4. Il est tout de même utile pour s’attaquer au problème de voir comme vous le soulignez que tout le monde est frappé en OCDE (Japon excepté mais ils ne sont pas occidentaux) . Plus qu’un problème technique, pédagogique, je vois personnellement à un problème existentiel qui frappe tout l’occident . Une sorte de dépression , de perte d’élan vital civilisationnel, et cela ne se règlera pas avec des mesurettes. Le problème est profond. L Occident déprime , vieillit , s’endort , et pendant ce temps là le soleil se lève sur l Orient (mais ils ont aussi leurs problèmes : dénatalité galopante : Chine , Corée ) . Bon , résistons à cette déprime et veillons .

  5. Le résultat est que les français élisent depuis 50 ans des députés à leur image qui pondent les lois les plus absurdes de l’OCDE.

  6. l’immigration n’arrange pas les statistique avec des enfants qui ne parlent pas français chez eux. le Japon n’accueil pas de vagues d’étrangers!!!

  7. Le pédagogisme ( demander aux enfants ce qu’ils aiment ou pas) , la psychologie dite  » positive » ( ne pas traumatiser les jeunes), et le syndicalisme des profs ( pas trop d’élèves dans la classe) sont une dévastation du projet d’instruction et de transmission des savoirs. En Asie, les classes de 100 élèves ne posent aucun problème : ils écoutent et font ce qu’on leur demande de faire. En Occident,c’est l’inverse : classes légères et élèves exigeants sinon capricieux. Cherchez l’erreur ……

    1. Quand j’étais en primaire entre 1960 et 1965, on était de 42 à 46 élèves en classe, confirmé par les deux bulletins qui ne sont pas passés à la poubelle, celui de la 9ème (actuel CE1) et celui de la 7ème (actuel CM2).
      Les notes étaient globalement dans une gaussienne centrées sur 11-12 avec les meilleurs à 16 et les moins bons vers 6-7
      On avait cours tous les jours sauf le jeudi et le dimanche
      PhB

    2. Des classes de 100 élèves en Asie !? merci d’indiquer vos sources, que je les transmette au nouveau ministre de l’instruction publique, ainsi qu’aux divers syndicats . Mon « bulletin » d’octobre 1955 indique 36 élèves, (école primaire publique St-Jean Strasbourg) il est vrai , tous de la même classe 1949 , personne n’ignore pourquoi ce nombre est impossible actuellement, chez nous.

  8. Le nouveau ministre de l’éducation nationale Édouard Geffray vient d’annoncer aujourd’hui qu’une de ses priorités était de développer la formation pédagogique des professeurs. Donc on ne change rien, on continue en accélérant le processus à développer l’égalitarisme au lieu de remettre l’exigence envers les élèves et l’autorité des professeurs au centre des préoccupations. Le conformisme de nos élites, l’incapacité de se remettre en cause et l’incapacité d’analyser le fond des problèmes est une des raisons de la décadence de notre système éducatif.

  9. Apparemment, tout le monde a oublié qu’il y a une grosse vingtaine d’années, le mot d’ordre des « responsables » et de beaucoup d’hommes politiques était: « Il faut briser la dictature des mathématiques ». « Ils » ont hélas réussi.
    La méthode:
    – on a réduit à presque zéro l’apprentissage de l’algèbre en 4ème et 3ème
    – on a reporté les sujets et les méthodes à la seconde et à la première
    – la réforme des programmes et du bac permettent (sur le papier) de choisir une orientation « scientifique » pratiquement sans mathématique (volontairement au singulier).
    Bien sûr, arrivés dans le supérieur, c’est la cata et on s’aperçoit qu’on manque d’ingénieurs.
    Enfin, l’enseignement de l’anglais est une catastrophe absolue.
    NB: je suis présent sur Linkedin et j’ai détaillé tout cela dans 3 ouvrages chez LIBRINOVA:
    Les politiques publiques en France (2020)
    Le contre-programme (Février 2022)
    Des compromis nécessaires (Novembre 2022)
    Gérard Néel neelgp@aol.com

  10. Et ces braves couillons deviennent parents et pérennisent la déliquescence générale en « dégenrant » leur progéniture et en se déconstruisant. Un petit tour dans une récente manif’ de gauchistes pour la Palestine peut en témoigner.

  11. Il est vrai que le nivellement par le bas nous enfonce un peu plus chaque année. Je connais bien un pays du sud est asiatique ou mon épouse était prof de maths: le classement des élèves est affiché en permanence, le port d’un uniforme, … mais cela n’explique surement pas tout.
    L’introduction de Pronote a aussi déconnecté une bonne partie des parents des études de leurs enfants.
    Il y a trop de paramètres à modifier pour remonter dans le classement. Si on chute probablement tout le monde s’en fout ici.
    Mais sur cette planète il y a des endroits ou notre avenir se construit.

    1. La désastreuse réforme Haby (collège unique) a été promulguée sous Giscard.
      Les dégâts de la Commission Lichnerowicz qui aura dégoûté bien des meilleurs talents datent de la même époque.

  12. Si je considère mon cas personnel, le problème des maths prend ses racines à la fin des années 60 ( j’étais en seconde)où nos cranes d’œufs ont lancé la détestable expérimentation des maths dites modernes où la manipulation des patatoïdes divergents, sécants, congruents ou fusionnels devait remplacer le calcul intégral et la résolution des équations à multiples inconnues. Mes études supérieures ont été rapidement réorientées vers des matières moins ésotériques et beaucoup plus terre à terre ( Oenologie!).

  13. Des énergies négatives gouvernent le mode de pensée hexagonal.
    La doctrine communiste reste influente en France des années 1950 aux années 1990.
    Encore aujourd’hui c’est le pays d’Europe ou cette doctrine est la plus répandue.
    Puis s’est ajoutée à cette doctrine sur-égalitaire les revendications de mai 1968.
    Depuis 1968, le questionnement psychologique des Français pris individuellement et de la collectivité nationale, nous conduit où nous en sommes aujourd’hui.
    Le questionnement autoritaire ne concerne en réalité que les individus et la collectivité, nullement les autorités , ce qui a permis de multiplier le nombre de fonctionnaires et de mettre en place une Nomenklatura socialiste.
    Si de nombreux retraités s’expatrient et si de nombreux actifs cherchent à en faire autant, c’est simplement parce la société française, devenue incroyablement conflictuelle grâce aux penseurs marxistes et sectaires, s’avère franchement invivable:
    Des faits divers atroces en quantité,
    Des quartiers sous le joug des trafiquants de drogue,
    Une pauvreté massive car endémique,
    Des polémiques quotidiennes sur n’importe quel sujet, même le nettoyage des vitres,
    Des dénigrements perpétuels de toutes les autorités,
    Les haros sur le baudet et sur les personnes qui ont des talents par exemple dans les mains,
    La multiplication des contrôles et obligations étatiques,
    L’avènement exponentiel du travail non déclaré qui mène encore de nombreux artisans au dépôt de bilan.
    Le besoin de montrer sa supériorité sur son voisin pour exister….
    Tout ceci en même temps !
    Le peuple français peut il exiger que soit remise en oeuvre une politique gouvernementale basée sur une intelligence pragmatique qui soit soucieuse de clarté et d’efficacité ?
    Sa survie peut dépendre de la réussite de cette démarche.
    Le peuple anglais a obtenu le brexit et s’efforce d’aller plus avant.
    Le peuple allemand a obtenu l’arrêt du nucléaire.
    Le peuple français a obtenu la mise en Å“uvre du traité de Lisbonne après avoir voté contre……
    Étonnant non ?

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *


Soutenez Contrepoints – Le média libéral de l’IREF

L’IREF (Institut de Recherches Économiques et Fiscales) est une association indépendante, sans but lucratif, financée uniquement par des dons privés.

Faites un don et soutenez un journal 100 % libre, libéral et sans subvention publique.