Le macronisme a poursuivi ses dégâts politiques, gardant le pouvoir par une politique de gauche au titre des retraites comme en matière fiscale, notamment dans la réintroduction masquée de l’ISF. Tout ça pour éviter qu’une censure ne vienne écarter un budget qui ne sera d’ailleurs peut-être pas voté. Mais n’aurions-nous pas pu vivre sans budget ?
 Seul le monde politique s’inquiète de la situation, craignant de perdre son moulin à produire des lois coûteuses et des impôts. Certes, les lobbies qui ont négocié leurs prébendes et leurs privilèges à fixer dans la loi de finances s’impatientent aussi. Pourtant, nous pourrions vivre sans budget et sans dommage. Les exemples étrangers nous rassurent.
Plus de trois ans sans gouvernement
 En Espagne, le défaut de majorité a empêché l’adoption d’une loi de finances pour 2024 et 2025. Pragmatique, le ministre de l’Économie espagnol, Carlos Cuerpo, observait que cela exigeait « un peu d’ingénierie budgétaire pour réassigner les postes de dépenses d’un secteur à un autre » sans que cela entraîne de difficultés majeures. A défaut de majorité politique, le chef du gouvernement Pedro Sanchez envisage d’ores et déjà de continuer à vivre en 2026, pour la troisième année consécutive, sans budget. Il est vrai que l’absence de budget souligne la faiblesse du gouvernement, mais elle réussit au pays. Depuis 2023, l’Espagne connaît une croissance inégalée en Europe (3,5% en 2024 contre 1,2% en France) et son taux de chômage baisse.
Pour sa part, la Belgique a vécu avec un gouvernement démissionnaire pendant 541 jours entre 2010 et 2011, en se coulant dans le cadre budgétaire de l’année précédente. Elle a dû accepter une période d’austérité ensuite pour faire face, avec retard, à la crise ouverte par la chute de Lehman Brothers, mais sans guère de dommages pour elle. Puis le 18 décembre 2018 le gouvernement belge de Charles Michel est tombé avant d’adopter le budget 2019. En gérant les affaires courantes pendant 493 jours, le gouvernement a travaillé en « douzièmes provisoires », dépensant chaque mois au plus un douzième du budget de l’année précédente. Après les élections législatives fédérales du 9 juin 2024, la Belgique a dû attendre encore 239 jours de négociations avant de retrouver un gouvernement dirigé par le chef des conservateurs flamands, Bart De Wever. En 2010 sa croissance a été de 2,7% contre 2% en France et en 2019, de 1,9% contre 1,6 en France (sources Banque mondiale). Le chômage a baissé sensiblement en 2010/2011 comme en 2028/2019.
Il est vrai que l’Espagne et la Belgique sont des pays moins centralisés que la France. Les structures régionales espagnoles sont fortes et disposent de budgets autonomes importants qui représentent 30% du budget national. En Belgique, régions et communautés gèrent de nombreuses compétences avec des gouvernements locaux de plein exercice. Mais la limitation imposée par le défaut de budget au gouvernement central y a été plutôt bénéfique.
Aux États-Unis, le shutdown, qui empêche l’Etat fédéral de payer ses fonctionnaires lorsque le Congrès ne parvient pas à adopter un budget, entraîne une paralysie partielle des administrations. Après un premier shutdown d’une durée de 16 jours en 2013, le bras de fer entre Trump, déjà , et le Congrès en a suscité un deuxième, le plus long de l’histoire américaine – un mois et trois jours – en 2018. Ce « vide » budgétaire a eu un coût pour divers services, mais il a aussi permis de faire avancer des réformes. Donald Trump semble, en cet automne 2025, avoir déclenché sciemment son second shutdown pour nettoyer ses écuries d’Augias, notamment pour réduire le poids de diverses administrations centrales.
Des économies contraintes
Faute de budget, toute nouvelle initiative politique est difficile. Un gouvernement intérimaire et/ou sans budget a plus de mal à faire de nouvelles dépenses. En cas de rejet de loi de finances par les parlementaires, et à défaut de ce cas précisément prévu par la Constitution, le gouvernement devrait trouver des expédients, peut-être en invoquant l’article 47 de la Constitution : « Si la loi de finances fixant les ressources et les charges d’un exercice n’a pas été déposée en temps utile pour être promulguée avant le début de cet exercice, le Gouvernement demande d’urgence au Parlement l’autorisation de percevoir les impôts et ouvre par décret les crédits se rapportant aux services votés. » Il vivrait sans doute par douzièmes du précédent budget voté, sans pour autant être obligé de dépenser tout son crédit mensuel. Il pourrait faire des économies. Dans bien des domaines, il serait obligé d’être sobre, pour le plus grand bien du pays. Non seulement ses dépenses seraient bridées, mais par manque de majorité, il lui serait difficile de faire passer des lois et la machine législative tournerait au ralenti. La politique occuperait moins d’espace, la liberté individuelle en gagnerait autant.
Ainsi, le gouvernement répondrait sans le vouloir à l’injonction de Pompidou adressée en 1966 à Jacques Chirac, jeune collaborateur de Matignon, qui venait lui présenter un parapheur rempli de décrets : « Arrêtez d’emmerder les Français ! Il y a trop de lois dans ce pays, on en crève, laissez-les vivre, et vous verrez ça ira beaucoup mieux. » En arrêtant d’enquiquiner les Français, on libère leurs initiatives. Moins de lois, c’est aussi plus de stabilité, plus de prévisibilité.
D’ailleurs, la bourse déroutée par la démission surprise de Sébastien Lecornu n’en a pas été émue longtemps. Seuls les élus restent persuadés qu’ils sont indispensables. Ils s’agitent pour justifier leur présence, ils créent le besoin d’eux-mêmes comme les cohortes administratives qui leur soufflent les lois et réglementations susceptibles de les entretenir dans leurs fonctions et d’étoffer les équipes sur lesquels ils règnent. Certes, il faut gérer la maison commune, mais sans en étendre le périmètre et en changer les règles sans cesse.
L’incapacité budgétaire pourrait convaincre les citoyens qu’ils peuvent vivre mieux sans Etat, du moins sans l’Etat nounou qui nous infantilise et nous annihile dans l’abaissement de notre servitude volontaire.
3 réponses
Le budget doit se pencher uniquement sur la réduction des dépenses, la suppression des doublons en France, la réduction des élus, nous avons pas besoin de autant de sénateur, de députés et encore moins de tout c’est étages, communes , communautés communes, métropole, département, régions, état.
Avant nous avions , la commune, le département et l’état et ça fonctionnait mieux et tout était plus rapide. Deux députés et un sénateur par département cela serait amplement suffisant.
Aucun élu de gauche comme de droite, mettra en œuvre cela, ces gens pensent uniquement à leur fin de mois, et avoir les poches bien remplies.
Ah ! l’Etat providence !!!! Heu, non. L’état en déliquescence !
L’avantage du budget, c’est que l’on sait de combien on le dépasse : en 2024 +50% !! (212 mrds/450 mrds.
Il est donc utile.
La France (comme les autres pays, à ma connaissance) utilise une comptabilité en partie simple, que l’on utilisait dans les entreprises au début du 20ème siècle. Une comptabilité type « entreprises » , avec une séparation très nette entre les investissements et les charges, permettrait d’y voir plus clair. Car s’il est de bonne gestion d’emprunter pour investir, il est de très mauvaise gestion d’emprunter pour des charges, surtout récurrentes.